S’y retrouver dans l’enquête sur les emplois présumés fictifs au Parlement européen
S’y retrouver dans l’enquête sur les emplois présumés fictifs au Parlement européen
Le Monde.fr avec AFP et Reuters
Au total, trois enquêtes sont ouvertes sur les soupçons d’emplois fictifs d’assistant d’eurodéputé : une visant spécifiquement le FN et, l’autre, spécifiquement le MoDem.
Après Marine Le Pen, Yannick Jadot ou encore Michèle Alliot-Marie, Jean-Luc Mélenchon. Le parquet de Paris a élargi son enquête sur les soupçons d’emplois fictifs d’assistant parlementaire au Parlement européen à l’ancien eurodéputé du Parti de gauche (2009-2017), a-t-on appris mardi 18 juillet. Une enquête en plusieurs volets qui vise des élus de tous bords.
Quelle est l’origine de l’enquête ?
A la suite d’une première dénonciation de l’élue du Front nationale au Parlement européen, Sophie Montel, le parquet de Paris a ouvert, le 22 mars, une enquête préliminaire pour « abus de confiance ». Les enquêteurs cherchent à savoir si des fonds européens, dévolus à l’embauche d’assistants parlementaires, ont été détournés afin de rémunérer des cadres employés à d’autres tâches au sein de leur formation politique.
Cette enquête, qui vise 19 eurodéputés ou ex-eurodéputés de tous bords, a été élargie à Jean-Luc Mélenchon après un second signalement à la justice de Mme Montel, fin juin. Interrogée sur cette nouvelle dénonciation, elle explique au Parisien :
« Jean-Luc Mélenchon se présente comme un chevalier blanc, toujours prompt à donner des leçons aux autres. Aujourd’hui, il est président d’un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, et un adversaire politique. Pourquoi la justice ne se pencherait-elle pas sur ses anciennes pratiques au Parlement européen comme elle le fait pour nous ? »
Sont notamment concernés :
A droite. Les ex-ministres Brice Hortefeux et Michèle Alliot-Marie ainsi que Jérôme Lavrilleux, ancien haut responsable de l’UMP au cœur de l’affaire Bygmalion, et Marc Joulaud, qui fut suppléant de François Fillon à l’Assemblée nationale ;
A gauche. L’ancien syndicaliste Edouard Martin (PS), l’écologiste Yannick Jadot, un élu du Front de gauche Patrick Le Hyaric.
Jean Arthuis (ex-UDI), soutien de La République en marche, est aussi dans la liste.
Quels sont les différents volets ?
Deux autres enquêtes distinctes sont ouvertes. L’une vise le MoDem, la seconde, le Front national.
Début juin, un ex-employé du MoDem, Matthieu Lamarre, avait adressé un courrier à la justice : il assurait avoir été en partie rémunéré, de décembre 2010 à novembre 2011, comme assistant parlementaire de l’eurodéputé Jean-Luc Bennahmias, affirmant n’avoir jamais travaillé pour lui « en particulier » mais « uniquement pour le siège du parti ». Le 8 juin, Radio France publiait une liste de dix assistants parlementaires dont le quotidien consistait à travailler pour le parti, à Paris, plutôt que pour les eurodéputés qui pourtant les salariaient.
Des révélations qui ont déclenché, le 9 juin, l’ouverture d’une enquête spécifique au MoDem qui a envoyé six élus au Parlement de Strasbourg entre 2009 et 2014.
Le volet qui concerne le Front national est antérieur. Le parti frontiste est sous le coup, depuis 2015, d’une double procédure, en France et devant le Parlement européen. L’enquête française a été confiée en 2016 à des juges d’instruction et a connu une nette accélération depuis le début de l’année.
La formation de Marine Le Pen est soupçonnée d’avoir massivement utilisé les crédits dévolus par l’Europe à l’embauche d’assistants pour les eurodéputés pour rémunérer des cadres du parti employés à d’autres tâches. Dix-sept eurodéputés FN, dont Marine Le Pen et son père Jean-Marie Le Pen, sont visés par cette enquête qui porte sur une quarantaine d’assistants. Le préjudice pour le Parlement européen s’élèverait, d’après ses calculs, à cinq millions d’euros de 2012 à 2017.
Où en est l’enquête visant le Front national ?
Marine Le Pen au Parlement européen, en octobre 2016. | FREDERICK FLORIN / AFP
Trois personnes ont été mises en examen :
- Marine Le Pen a été mise en examen le 30 juin. Elle est soupçonnée d’abus de confiance en sa qualité de députée européenne, pour l’utilisation de fonds du Parlement européen pour sa chef de cabinet au FN, Catherine Griset, et pour son garde du corps, Thierry Légier, sur la période 2009-2016. Mme Le Pen est également mise en examen pour complicité d’abus de confiance pour des faits commis entre 2014 et 2016 en sa qualité de présidente du FN.
- Charles Hourcade, assistant parlementaire de l’eurodéputée FN Marie-Christine Boutonnet a été mis en examen le 6 mars pour « recel d’abus de confiance ».
- Catherine Griset, la cheffe de cabinet de la présidente du Front national, a été mise en examen pour recel d’abus de confiance le 22 février.
Par ailleurs, en juillet 2016, l’OLAF, organisme anti-fraude de l’Union européenne, a conclu à une fraude concernant Marine Le Pen et ses deux assistants parlementaires, Catherine Griset et Thierry Légier. Une mesure administrative de recouvrement des salaires qui auraient été indûment versés, à hauteur de 340 000 euros, avait alors été mise en place sous la forme de retenue des indemnités de Mme Le Pen.
Depuis que l’élue frontiste a quitté le Parlement européen pour l’Assemblée nationale, après avoir été élue députée du Pas-de-Calais, en juin, ces retenues ont de facto été interrompues. Le Parlement européen doit désormais attendre l’issue de l’information judiciaire ouverte en France afin de pouvoir recouvrer la totalité de l’argent public qui a été possiblement détourné.
Où en est l’enquête visant le MoDem ?
Suite à l’ouverture de l’enquête spécifique au MoDem, trois membres du premier gouvernement d’Edouard Philippe ont démissionné : Marielle de Sarnez (ministre des affaires européennes), Sylvie Goulard (ministre des armées) et le président du MoDem, François Bayrou (ministre de la justice).
Ce dernier a toujours nié l’existence de tels emplois fictifs et récusé surtout l’idée qu’un système organisé ait pu exister. Des témoignages d’anciens élus ou employés du parti jettent toutefois le trouble.
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Durée : 02:48