Corinne Diacre est la nouvelle sélectionneuse des Bleues. / FRED TANNEAU / AFP

Il y a des occasions auxquelles il est difficile de tourner le dos deux fois. Déjà approchée l’an passé pour prendre la tête de l’équipe de France féminine de football, Corinne Diacre a, cette fois-ci, accepté le rôle. Mercredi 30 août, l’entraîneuse de Clermont en Ligue 2 a été nommée à la place d’Olivier Echouafni au poste de sélectionneuse. Dix ans après la fin de règne d’Elisabeth Loisel (1997 à 2007), seule femme à avoir occupée ce poste, la Nordiste aura fort à faire pour redresser les résultats de la sélection.

Après un Euro manqué, où les Bleues ont été incapables de franchir les quarts de finale, et à deux ans d’une Coupe du monde qui aura lieu en France pour la première fois de son histoire, il fallait un nouvel élan. Les coéquipières de Wendie Renard vont connaître un troisième sélectionneur en quatre ans après le règne relativement court de Philippe Bergeroo (2013 à 2016) et celui, très bref, d’Echouafni (2016 à 2017).

A 43 ans, Corinne Diacre arrive avec une grande légitimité : d’abord celle de son passé irréprochable de joueuse, longtemps recordwoman des sélections, avec 121 capes, puis avec celle d’une expérience inédite de dix ans dans le coaching. Elle a débuté en occupant conjointement le poste d’adjointe du sélectionneur Bruno Bini et celui d’entraîneuse de Soyaux en division 1 pendant six ans. Avant de devenir pendant trois saisons la première femme à entraîner une équipe professionnelle masculine en France, avec un certain succès puisque, sous sa responsabilité, l’équipe de Clermont, aux moyens limités, s’est maintenue sans difficulté en Ligue 2 (12e, 7e et 12e).

« Le Graët est allé chercher la compétence »

Très respectée, Diacre possède toute la confiance du président de la Fédération française de football, Noël Le Graët, qui lui a d’ailleurs fait signer un contrat de quatre ans. « Je pense que beaucoup de gens vont apprécier cette nomination dans le milieu du foot. Plus qu’une femme, le président est allé chercher la compétence », réagit Bernadette Constantin, qui a été l’entraîneuse de Corinne Diacre pendant neuf ans à Soyaux.

Le timing de cette intronisation apparaît parfait. « Corinne avait besoin de faire au moins deux ou trois saisons à Clermont. Elle a démontré que cette première n’était ni une erreur ni une utopie, estime Nicole Abar, ex-pionnière des Bleues dont elle a porté le maillot de 1977 à 1987. Elle s’est rendue crédible aux yeux de tous et elle a dû progresser encore, notamment en termes de gestion de la pression. »

Pour cette militante de la place des femmes dans le football, fondatrice notamment de l’association Liberté aux joueuses, Corinne Diacre est le choix idéal : « Elle est super intelligente et perspicace ».

Discrétion, travail et force de caractère

Discrète, aussi. Corinne Diacre a très souvent refusé de répondre aux sollicitations concernant son statut de pionnière dans le foot masculin, peu à l’aise avec l’exercice médiatique. En mai, lors d’un reportage du Monde à Soyaux, où elle a passé vingt ans, elle avait bravé sa timidité pour accepter une interview sur ce club amateur qui joue dans la cour des grandes. « Corinne est une personne d’une grande élégance morale, avec un comportement irréprochable sur le terrain et en dehors. Sa grande discrétion ne l’empêche pas de tout faire pour réussir ses projets », admire Nicole Abar.

Corinne Diacre, la dame et coach de Clermont tient le choc !
Durée : 04:03

La Sojaldicienne Bernadette Constantin, qui occupe également une place importante à la FFF – elle est chargée des compétitions féminines – complète un portrait très flatteur : « Elle a une force de caractère peu commune. Quand elle entreprend quelque chose, elle va au bout. Elle est très pro, perfectionniste et dure au travail. A Soyaux, elle a fait d’un groupe de joueuses complètement amatrices des joueuses qui se comportaient comme des pros. C’est tout l’art de Corinne : montrer aux gens qu’ils peuvent s’élever. »

Alors que l’équipe de France ne jouera son prochain match à enjeu que le 1er juin 2019 lors du match d’ouverture de la Coupe du monde 2019, Corinne Diacre a deux ans devant elle pour redonner confiance aux Bleues et leur faire franchir un palier. A domicile, il faudra au moins atteindre un premier podium pour une équipe qui n’a jamais fait mieux que quatrième (Mondial 2011 et JO 2012).

En acceptant ce poste, Corinne Diacre met un terme momentané à sa carrière dans le football masculin. « Elle ne renonce absolument pas au foot masculin, précise Nicole Abar. Ce n’est pas une minoration de carrière. En cas de succès, elle aura même toute la légitimité d’y revenir. »