Utopia 56 annonce son départ en octobre du centre humanitaire de Paris, où sont hébergés les migrants de la capitale. « Nous espérions que ce centre, ouvert le 10 novembre dernier, à l’initiative d’Anne Hidalgo, maire de Paris, serait un modèle pour cinq centres similaires en France, sur le parcours des migrants. Or, nous constatons que le traitement administratif des réfugiés qui entrent dans ce centre n’a rien d’humanitaire et que l’accueil aux alentours s’est transformé en une traque », estime Yann Manzi, cofondateur de cette association également présente à Calais. A Paris, Utopia 56 va donc sortir du centre où il venait en appui à Emmaüs Solidarité. Cette sortie amènera l’association bretonne à intensifier son aide aux migrants dans la rue en même temps qu’elle développera son réseau d’hébergement citoyen, ouvert en mai.

Ce geste, à forte charge symbolique, veut s’opposer à la politique « de tri et d’expulsion » menée par l’Etat, selon cette association de 6 000 adhérents, nouvelle venue dans la famille de l’humanitaire. Ses fondateurs dénoncent surtout par ce geste la capacité de l’Etat à se saisir des initiatives de maires favorables à un accueil digne, pour en détourner l’objet et en faire des outils d’une politique qu’ils estiment être d’exclusion.

Un « piège administratif »

En 2016, Utopia 56 s’était retiré du camp de Grande-Synthe, ouvert par Damien Carême, lorsque l’Etat avait commencé à le financer. Cette fois, Utopia 56 déplore que les migrants accueillis au centre humanitaire de Paris aient « obligation de passer par le CESA – le Centre d’examen de situation administrative – créé spécifiquement pour le centre humanitaire. Or, au lieu de favoriser les réfugiés, ce passage obligé au CESA piège administrativement de nombreux réfugiés et les prive de leur droit à l’asile. Ils auraient mieux fait de rester à la rue et d’aller à la permanence d’une association citoyenne de juristes. Souvent, même, ils ont cru avoir déposé leur demande d’asile, ce qu’ils n’ont pas fait et se retrouvent ensuite dans des procédures d’expulsion », déplore Valérie, cofondatrice de l’association.

Utopia 56 dénonce le fait que tous ceux qui sont accueillis dans le centre de la porte de la Chapelle doivent passer par un centre administratif qui trie les migrants entre ceux qui arrivent juste en France et n’ont laissé d’empreinte nulle part, ceux qui seront renvoyés dans un pays européen qu’ils ont foulé avant la France et ceux qui, déboutés de l’asile, ne peuvent qu’être renvoyés.

En septembre, la convention qui lie l’Etat à la mairie de Paris pour ce parcours migratoire doit être renégociée. Le texte avait été signé pour une année entre les deux parties.