Le chantier de l’EPR d’Olkiluoto (sud-ouest de la Finlande), en mars 2010. / JACQUES DEMARTHON / AFP

Le chantier du réacteur nucléaire finlandais d’Areva n’en finit plus d’accuser du retard. Son client, l’électricien finlandais Teollisuuden Voima (TVO), a annoncé, lundi 9 octobre, un nouveau report de la mise en service de l’EPR d’Olkiluoto (OL3). Elle est désormais prévue en mai 2019 (et non plus à la fin de 2018) alors qu’à la signature du contrat (2003), puis au lancement des travaux (à la mi-2005), le démarrage était prévu en... 2009. Un retard qui a entraîné un triplement du devis initial pour un coût final de l’ordre de 9 milliards d’euros, et la saisine d’une cour d’arbitrage internationale.

Chez Areva, on confirme que la mise en service commerciale est désormais prévue en mai 2019. Le chargement du combustible (uranium enrichi) se fera en août 2018 et la connexion au réseau électrique en décembre, les essais et la montée en puissance prenant encore quatre mois. Le constructeur français explique ce retard par les analyses des retours d’expérience plus longues que prévu et par le temps de formation des opérateurs de la centrale.

Ces justifications n’ont pas apaisé le consortium finlandais. « TVO a été informé par le constructeur du site, le consortium Areva-Siemens, d’une révision du calendrier du chantier, souligne-t-il dans un communiqué.  « Nous sommes très déçus par ce nouveau délai, a pour sa part réagi le responsable du projet, Jouni Silvennoinen. Il reste un travail substantiel à accomplir sur le chantier et il est essentiel que toutes les ressources techniques, humaines et financières soient engagées. »

Principale crainte exprimée depuis plus de deux ans par TVO : l’éventuel impact négatif de la refonte de la filière nucléaire française. « Cette restructuration ne doit pas compromettre le chantier de l’EPR », a prévenu M. Silvennoinen. Areva NP, fabricant des réacteurs EPR, doit être racheté par EDF à la fin de 2017.

Appel auprès de la Cour de justice de l’UE

Mais le groupe d’électricité français refusant de porter l’énorme risque d’OL3, celui-ci sera cantonné dans Areva SA, recapitalisé de 2 milliards pour la circonstance. Les Finlandais n’en soupçonnent pas moins Areva SA ne pas donner assez de moyens pour achever la construction – un soupçon démenti, côté français.

TVO a annoncé, le 13 septembre, avoir formé un appel auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) contre la décision de la Commission d’autoriser cette restructuration et cette recapitalisation d’Areva sur fonds publics.

En attendant la mise en service du réacteur, un lourd contentieux oppose toujours TVO et Areva devant la Chambre de commerce international (CCI). Le premier réclame 2,6 milliards d’euros de dédommagements pour les retards et surcoûts accumulés au fil des années ; le second impute ces retards aux Finlandais, notamment aux lenteurs de l’autorité de sûreté nucléaire locale, et demande 3,4 milliards.

La CCI a pris, en 2016 et 2017, deux décisions partielles en faveur de la société finlandaise, a indiqué TVO. La balance penche « en faveur de TVO », avait alors affirmé son directeur général adjoint, Risto Siilos. Pour autant, la cour arbitrale ne statuera pas sur la question des montants réclamés par chacune des deux sociétés avant le début de 2018.

Mais les agences de notation ont mis Areva SA sous surveillance. Fin septembre, SP Global Ratings a abaissé sa note à « B - », jugeant l’entreprise exposée à un « risque accru » dans l’arbitrage l’opposant à TVO.