Ankara n’exclut pas un maintien de Bachar Al-Assad en Syrie
Ankara n’exclut pas un maintien de Bachar Al-Assad en Syrie
Par Marie Jégo (Istanbul, correspondante)
Avant le sommet de Sotchi, la Turquie est prête à faire des concessions aux Russes pour marginaliser les forces kurdes.
Les ministres des affaires étrangères turc (à droite), Mevlüt Çavusoglu, et iranien, Mohammad Javad Zarif (troisième en partant de la gauche), dimanche 19 novembre, à Antalya. / STR / AFP
Les ministres des affaires étrangères turc, Mevlüt Çavusoglu, russe, Sergueï Lavrov et iranien, Mohammad Javad Zarif, se sont retrouvés, dimanche 19 novembre à Antalya, dans le sud de la Turquie, pour une rencontre en vue du sommet tripartite qui se déroulera mercredi 22 novembre dans la ville russe de Sotchi.
Garants des accords d’Astana, qui ont permis l’instauration de quatre « zones de désescalade » en Syrie, Moscou et Téhéran (qui soutiennent Bachar Al-Assad), ainsi qu’Ankara, qui représente les intérêts de l’opposition, ambitionnent de trouver une solution politique au conflit syrien. A cet effet, un sommet se tiendra mercredi 22 novembre à Sotchi en présence des présidents turc, Recep Tayyip Erdogan, russe, Vladimir Poutine, et iranien, Hassan Rohani.
« Nous allons évaluer ce qui reste à faire. Pouvons-nous restaurer la paix et la stabilité en Syrie ? Comment est-il possible d’intégrer les deux processus, celui de Genève et celui d’Astana ? », a déclaré le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Çavusoglu, avant la rencontre. La Russie, qui conduit le processus, cherche à faire passer au second plan les négociations sous l’égide de l’ONU entre le régime et l’opposition, dont la prochaine session doit s’ouvrir à Genève le 28 novembre.
Après avoir longtemps réclamé le départ de Bachar Al-Assad, la Turquie s’est considérablement rapprochée de la position russe. « La Russie tient ses promesses. Le processus d’Astana commence à porter ses fruits. Sur le terrain, la situation est bien meilleure qu’il y a un an ou qu’il y a six mois », a tenu à souligner M. Çavusoglu lors d’un briefing avec la presse étrangère, vendredi 17 novembre à Istanbul.
Pas de calendrier politique fixé
« Il est temps de penser à une solution politique », a-t-il martelé. Toutefois, ses grandes lignes restent à définir. « L’Iran et la Russie veulent qu’Assad reste pendant la transition. Les Russes ont besoin d’Assad. C’est par lui qu’ils ont été invités à intervenir. Ceci n’est pas de notre ressort et nous verrons bien qui se montrera le plus flexible. »
Aucun calendrier politique n’a encore été fixé. « Il faut d’abord en parler avec l’opposition. Désormais, la Russie et l’Iran ne sont pas les seuls à dire que Bachar Al-Assad peut rester. L’Arabie saoudite et la France disent la même chose. Il ne faut pas être trop émotionnel, mais réunir tout le monde autour de Bachar Al-Assad ne sera pas chose facile. »
Ankara a mis un sérieux bémol à sa critique du tyran de Damas, privilégiant une solution politique susceptible de préserver l’unité du pays. Les « gains territoriaux » des milices kurdes YPG au nord de la Syrie inquiètent Ankara au plus haut point. « Les YPG n’ont jamais lutté pour la liberté du pays, pas plus qu’ils n’ont combattu Daech pour son idéologie maléfique, en réalité ils ont fait cela pour obtenir des gains territoriaux », a assuré le ministre.
Dimanche à Antalya, M. Çavusoglu a rappelé à ses partenaires russe et iranien qu’il n’était pas question que les kurdes syriens du Parti de l’union démocratique (PYD), une filiale du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit en Turquie), ou que les YPG, leur bras armé, prennent part aux négociations sur l’avenir de la Syrie.