La chancelière allemande, Angela Merkel, quitte la résidence présidentielle à Berlin, où elle a rencontré le président après l’échec des négociations pour former une coalition, le 20 novembre 2017. / ODD ANDERSEN / AFP

Malgré sa réputation de négociatrice, Angela Merkel a échoué à convaincre les conservateurs de la CSU bavaroise, les libéraux du FDP et les Verts de former une nouvelle coalition gouvernementale pour diriger l’Allemagne. La chancelière allemande, dont le parti, l’Union chrétienne-démocrate (CDU), ne dispose pas, seul, d’une majorité suffisante au Parlement à l’issue des élections législatives de septembre, s’est entretenue, lundi 20 novembre, avec le président de la République fédérale, Frank-Walter Steinmeier, sur les suites à donner à ce constat d’échec.

Si les différents protagonistes de ce qui aurait conduit à former une coalition « jamaïcaine » (aux couleurs noire, jaune et verte) n’ont pas abouti après plus d’un mois d’âpres discussions, c’est qu’ils n’ont réussi à s’accorder que sur peu de choses : conserver un budget équilibré, moderniser les infrastructures Internet, accroître les prestations familiales. Les dissensions ont été plus fortes. En l’occurrence, les négociateurs ne sont pas parvenus à s’entendre sur quatre grands sujets.

  • Asile et intégration

Sur l’immigration, les Verts exigent de renoncer au plafonnement à 200 000 par an du nombre de réfugiés susceptibles d’être accueillis en Allemagne, ainsi qu’à l’interdiction du regroupement familial pour ceux bénéficiant de la « protection subsidiaire ». Une loi de 2016 empêche en effet les réfugiés qui n’ont obtenu qu’un titre de séjour d’un an renouvelable de faire venir leur famille, jusqu’en mars 2018.

Or, les conservateurs, en particulier la CSU bavaroise, veulent prolonger cette interdiction. La décision de Mme Merkel d’ouvrir les frontières du pays à des centaines de milliers de migrants, en 2015, reste très controversée au sein de son parti.

Les concessions des écologistes n’ont pas convaincu. Ils étaient prêts à céder en échange d’un allongement de la liste des « pays d’origine sûrs » et sur la multiplication des centres d’accueil pour demandeurs d’asile afin de mieux contrôler leur présence sur le territoire.

  • Transition énergétique

Sur l’environnement, les dissensions se concentrent sur l’ampleur des réductions des émissions CO2 et les moyens d’y parvenir. L’Allemagne s’est engagée à baisser de 40 % ces émissions d’ici à 2020, par rapport à leur niveau de 1990. Les Verts estiment qu’il faudrait diminuer les émissions d’au moins 90 millions de tonnes. Pour les conservateurs et les libéraux, une baisse de 32 millions de tonnes serait suffisante.

Afin d’y parvenir, les Verts demandent notamment des engagements précis en matière de fermeture des centrales à charbon. La CDU/CSU et le FDP brandissent les menaces de coupures électriques et considèrent cette proposition comme un non-sens économique. Les conservateurs de Rhénanie-du-Nord - Westphalie s’y opposent particulièrement, en raison de l’importance du secteur dans ce Land industriel.

Les Verts ont rejeté le compromis proposé par Mme Merkel de diminuer la production des centrales à charbon de 7 GW d’ici à 2020. Ils avaient déjà renoncé à certaines exigences, comme l’arrêt de la production de véhicules à moteur à explosion en 2030 et leur projet de taxe sur le diesel.

  • Fiscalité et Europe

Les libéraux réclament davantage de baisses d’impôts. Ils souhaitent en particulier supprimer en 2019 la taxe dite « de solidarité » servant à soutenir les régions économiquement défavorisées de l’ex-RDA. La CDU préférerait l’éliminer par étapes. Les Verts sont contre, estimant que cette suppression priverait de financement une grande partie des investissements dans l’éducation et la numérisation.

Contrairement aux Verts, le FDP s’oppose aussi à l’appel du président français, Emmanuel Macron, pour un budget propre à la zone euro et souhaite diminuer le montant du fonds de sauvetage européen. Les libéraux rejettent toute aide future aux pays qui se sont plongés eux-mêmes dans des situations désespérées, comme la Grèce.

  • Education

Le président du FDP estime que la question de l’éducation, qu’il considère cruciale, « a jusqu’ici été traitée de façon plutôt marginale ». Les libéraux prônent une réforme du fédéralisme en la matière, demandant plus de responsabilité de l’Etat. Plus précisément, tout en soulignant des « propositions constructives » de Mme Merkel, M. Lindner souhaite abolir l’interdiction de coopération entre le gouvernement fédéral et les Länder, entrée en vigueur en 2006.

Des controverses persistent aussi sur « les transports, la politique étrangère et la sécurité intérieure ainsi que la justice sociale », soulignaient les Verts sur leur site, le 16 novembre.