En Espagne, le sécessionnisme accusé de l’échec de Barcelone à obtenir l’Agence européenne du médicament
En Espagne, le sécessionnisme accusé de l’échec de Barcelone à obtenir l’Agence européenne du médicament
LE MONDE ECONOMIE
Barcelone était candidate pour accueillir le siège de l’Agence européenne du médicament, qui doit quitter Londres. Mais c’est Amsterdam qui a été choisie.
« C’est un des préjudices directs causés par le processus indépendantiste », a tranché la ministre de la santé espagnole, Dolors Montserrat, depuis Bruxelles, après l’annonce de l’élimination, dès le premier tour, de la candidature de Barcelone pour accueillir le siège de l’Agence européenne du médicament (AME). La ville espagnole est arrivée en cinquième position, avec 13 points.
Le résultat du vote qui a eu lieu le 20 novembre à Bruxelles aurait-il été différent si la Catalogne ne s’était pas lancée ces derniers mois sur le chemin de la sécession qui a abouti le 27 octobre à une déclaration unilatérale d’indépendance, aussitôt contrée par la mise sous tutelle de la région par Madrid ? A un mois des élections régionales du 21 décembre, les reproches ont immédiatement fusé entre les partis anti-indépendantistes espagnols, qui ont expliqué l’échec de Barcelone par l’instabilité politique, et les formations nationalistes catalanes, pour qui le gouvernement espagnol est l’unique responsable.
Techniquement, la ville méditerranéenne avait toutes les chances de son côté : de bonnes connexions aériennes, d’importantes infrastructures hôtelières, un édifice emblématique, en plein centre de Barcelone, prêt à accueillir les salariés qui avaient désigné la capitale catalane comme leur destination de préférence. Barcelone est en outre un pôle de recherche biomédicale et compte une industrie pharmaceutique forte.
La crainte d’un « catalanexit »
Mais, selon une source gouvernementale espagnole, lors d’une réunion technique avec des responsables municipaux et régionaux, les représentants de l’AME leur avait demandé, ironiques, s’ils savaient « pourquoi ils quittaient Londres ». La menace de la sécession et donc d’une possible sortie de l’Union européenne, un « catalanexit », n’était pas propice à l’instauration d’un climat de confiance.
Depuis le référendum illégal sur l’indépendance du 1er octobre, plus de 2 500 entreprises ont d’ailleurs déménagé leur siège social, dont 6 des 7 compagnies catalanes de l’Ibex 35, l’indice vedette de la Bourse espagnole. Et ce n’est sans doute pas la seule conséquence économique du virage indépendantiste de la Catalogne, région qui représente 19 % du PIB espagnol. En septembre, le rythme des créations d’entreprises a baissé de 26 % en Catalogne, contre 9 % dans l’ensemble de l’Espagne. Les associations de commerçants se plaignent de la baisse des ventes. Et dans la région, le chômage a connu le mois dernier sa plus forte hausse pour un mois d’octobre depuis 2008.
« Si le sujet de la Catalogne n’était pas sur la table », les taux d’intérêt de la dette espagnole seraient « plus bas » et « les agences de notation auraient remonté la note de l’Espagne », a également déclaré le ministre de l’économie, Luis de Guindos, le 15 novembre. L’Autorité indépendante de responsabilité fiscale (AireF) a estimé que l’impact pour l’Espagne de la crise en Catalogne pourrait représenter « entre 0,4 et 1,2 point de PIB » en 2018, soit entre 4,3 et 13 milliards d’euros. Le gouvernement a déjà revu à la baisse ses prévisions de croissance du PIB pour l’an prochain, de 2,6 à 2,3 %.