Le procès pour « détournement de fonds publics » du maire de Dakar s’est ouvert jeudi 14 décembre pour être aussitôt renvoyé au 3 janvier. Le tribunal correctionnel de Dakar « renvoie d’office au 3 janvier en audience spéciale » le procès de Khalifa Sall, en détention préventive depuis le 7 mars, et de ses coprévenus, a déclaré son président, Maguette Diop.

Les huit accusés doivent répondre de dépenses « non justifiées » de plus de 2,7 millions d’euros prélevés sur plusieurs années, selon la justice, dans les caisses de la mairie de Dakar, ce qu’ils nient. Les avocats de la défense ont dénoncé la « précipitation » avec laquelle l’instruction a été bouclée, affirmant en avoir appris la clôture par la presse vendredi.

Le président du tribunal a appelé les protagonistes à « rester sereins » lors des débats, parfois houleux, en présence de nombreux partisans de Khalifa Sall qui occupaient la majeure partie des sièges du palais de justice. Au terme de l’audience, le maire de Dakar, en boubou blanc comme l’ensemble des prévenus, a salué de la main, souriant, ses soutiens qui l’acclamaient en scandant son prénom : « Khalifa président ! » Un important dispositif de sécurité était déployé autour du tribunal pour prévenir tout débordement, mais aucun incident n’a eu lieu.

Soutien de la mairie de Paris

Considéré comme un probable candidat à l’élection présidentielle de 2019 contre Macky Sall, au pouvoir depuis 2012, le maire de Dakar a été élu député aux législatives du 30 juillet malgré sa détention. Mais l’Assemblée nationale a levé le 26 novembre son immunité, ouvrant la voie à un procès.

Ses partisans imputent ses déboires judiciaires à son statut de dissident du Parti socialiste (PS), membre de la coalition présidentielle – des soupçons rejetés par les responsables du pouvoir. Khalifa Sall a présenté à Dakar une liste dissidente victorieuse aux élections locales de 2014. Il a ensuite multiplié les critiques contre la coalition présidentielle, appelant notamment à voter non au référendum constitutionnel du 20 mars 2016.

Le Conseil de Paris a adopté mardi un « vœu » visant à créer un « observatoire international des maires en danger » afin d’aboutir à un statut protecteur pour ces élus, citant le cas de Khalifa Sall, « emprisonné à cause de son bilan et de ses ambitions politiques ». La mairie de Paris a également annoncé que, pour veiller à un procès équitable, elle sollicitait l’intervention d’avocats français de renom, qui se sont associés à la demande de renvoi de la défense.

Toutes les démarches depuis des mois pour une remise en liberté du maire de Dakar ont échoué. Début décembre, le doyen des juges d’instruction a refusé le dépôt d’une caution qui lui aurait permis de comparaître libre.