On a testé… « #WarGames », le jeu vidéo qui se joue avec les yeux
On a testé… « #WarGames », le jeu vidéo qui se joue avec les yeux
Par Perrine Signoret, Florian Reynaud
Sam Barlow, le créateur du jeu d’enquête « Her Story », revient avec une série TV subtilement interactive, sur l’histoire d’une bande de copains hackers. Original et frustrant.
« #WarGames » est la dernière création de Sam Barlow, créateur du jeu « Her Story ». / Eko
Ni tout à fait jeu vidéo, ni tout à fait série TV, mais un hybride audacieux autant qu’une expérience un peu frustrante : c’est le bilan mitigé du nouveau jeu expérimental du britannique Sam Barlow.
Après le succès de son jeu vidéo d’enquête Her Story, sorti en juin 2015 et récompensé l’année suivante, l’ancien scénariste de Silent Hill : Origins et Silent Hill : Shattered Memories était attendu au tournant. Le créateur a finalement dévoilé son dernier projet le 14 mars. Baptisé #WarGames, il relate l’expérience d’un groupe de jeunes hackers, passés (un peu malgré eux) du statut d’anonymes organisant des canulars à celui de cyberactivistes à la renommée internationale.
C’est dans un film datant de 1983 que Sam Barlow a puisé son inspiration. Dans War Games, réalisé par John Badhan, un complexe militaire américain décidait, en pleine guerre froide, de confier la gestion des ogives nucléaires américaines à une intelligence artificielle, après que plusieurs employés eurent refusé lors de tests d’appuyer sur le « bouton rouge ». David Lightman, lycéen bidouilleur interprété par Matthew Broderick, se connecte frauduleusement au serveur et, croyant jouer à un jeu vidéo, pousse l’IA à menacer le monde entier d’une guerre nucléaire.
Du canular aux secrets d’Etat
Dans le jeu du même nom, on retrouve bien le thème central, de jeunes hackers opposés à un ou des gouvernements, et les questions sur les dangers des nouvelles technologies quand elles sont utilisées dans un but militaire. On retrouve également un « Lightman », à la différence près qu’il s’agit cette fois d’une femme, nommée Kelly.
Dans le premier épisode de la saison une – #WarGames étant organisée comme une véritable série –, on retrouve cette dernière dans son lit, après une soirée difficile. Ses amis Torch et Zane la sortent de sa torpeur matinale avec un appel vidéo. Ils ont prévu d’offrir une petite frayeur à un chanteur. Parce que ce dernier a accepté de donner un concert pour un homme politique controversé, ils décident de le traquer chez lui à l’aide d’un drone, jusque dans sa piscine.
Capture d'écran / Eko
Après ce canular un peu raté, la série bascule rapidement dans un autre registre. Sans que l’on comprenne vraiment comment ni pourquoi, l’équipe de hackers se retrouve à vouloir venger une ancienne militaire accusée de trahison, puis à devoir révéler au monde entier des secrets d’Etat. Globalement, les enchaînements entre chaque temps fort du scénario sont brusques, souvent maladroits. Alors que certains passages regorgent d’intimité et de vie – c’en est parfois presque dérangeant –, certaines relations entre les personnages apparaissent forcées, ou un brin trop cliché.
Une interactivité limitée
Pour conter cette histoire, Sam Barlow et les studios Eko ont choisi un format hybride, à mi-chemin entre le jeu vidéo et la série interactive. On ne suit les personnages qu’au travers des objectifs de leurs téléphones, de leurs webcams ou de caméras de surveillance – un format qui donne une saveur toute particulière aux scènes à suspense. Le rôle du joueur, à deux ou trois exceptions près, se borne à première vue à basculer d’un écran à un autre.
Le jeu, en fait, n’évolue pas tant en fonction de ce que fait le joueur, mais de ce qu’il regarde, de ce qui l’intéresse. S’il s’attarde sur un personnage en particulier, l’histoire sera présentée de manière légèrement différente.
Ainsi, au début du jeu, notre équipe de hackers utilise un drone. Selon que le joueur s’attarde sur un personnage ou un écran plutôt qu’un autre, le drone s’écrasera dans une piscine, ou sera abattu d’un coup de fusil. Dans d’autres cas, on comprend que se concentrer sur tel écran, sur tel personnage, est affaire de psychologie. Lors d’une dispute, veut-on entendre la personne en colère, ou les arguments de celui qui cherche à se justifier ?
Déjà, dans Her Story, Sam Barlow avait placé l’histoire au cœur du jeu : dans une sorte d’interrogatoire virtuel, il nous donnait des extraits de l’intrigue, des enregistrements d’une suspecte de meurtre, et nous obligeait à poser les bonnes questions pour dévoiler plus d’éléments. Cependant, là où le joueur avait un rôle essentiel dans Her Story, #WarGames donne souvent l’impression de ne pas avoir besoin de lui. Hormis une discrète indication à l’écran, on se demande souvent si, et comment nos choix modifient ce que l’on voit. Si bien qu’une fois le jeu terminé – ce qui demandera environ une heure et demie – on se demande si cela vaut vraiment la peine de le recommencer.
L’avis de Pixels
On a aimé :
Le format innovant, ni jeu ni série
Des moments humains et immersifs
On n’a pas aimé :
Le manque d’informations sur le rôle du joueur
Une personnalisation limitée
Une histoire un peu bancale
C’est plutôt pour vous si…
Vous adorez les jeux narratifs
D’ailleurs vous ne jouez aux jeux que pour les cinématiques
Vous avez toujours rêvé d’avoir des hackers à capuche pour copains
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
Les histoires vous ennuient et vous voulez simplement tirer sur des méchants
Le manque d’action vous rend nerveux
Vous êtes un hacker et la moindre erreur technique vous fait enrager
Vous ne parlez pas anglais (le jeu n’est disponible que dans cette langue, avec des sous-titres également en anglais)
La note de Pixels
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