Isabelle Autissier. / COP Paris/ Flickr/CC0 1.0

Après avoir examiné, dans un rapport publié le 18 avril, les dispositifs de soutien public aux énergies renouvelables, la Cour des comptes s’intéresse à l’un des acteurs majeurs du combat pour la défense de l’environnement, le World Wildlife Fund (Fonds mondial pour la nature) de France, plus connu sous son acronyme de WWF France et surtout par son logo à l’effigie d’un panda.

Lundi 23 avril devait être rendu public le document de synthèse sur l’état des comptes de l’association, qui figure parmi les ONG les plus influentes dans le champ de la protection de l’environnement grâce à son réseau, fort d’une centaine de bureaux nationaux et de nombreux donateurs – la seule antenne française en compte 220 000 (Greenpeace France en dénombrait 195 000 fin 2017).

L’examen des exercices 2011-2012 à 2015-2016 du WWF France – dont Le Monde s’est procuré une copie – relève des missions ordinaires de la Cour des comptes. Depuis 1991, la loi lui attribue la compétence de contrôler les « organismes bénéficiant de la générosité publique ». Il y a quelques années, les magistrats s’étaient penchés sur les finances d’autres grandes structures associatives, notamment la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) et Greenpeace France.

Pas plus que pour ces deux ONG, ils ne relèvent d’irrégularité dans le fonctionnement du WWF France. Les experts de la Cour considèrent que les dépenses sont globalement conformes aux objectifs poursuivis et saluent même les efforts de redressement financier de l’association, déficitaire pour les exercices 2011-2014 mais bénéficiaire à partir de 2014-2015.

Confiance

Pour autant, l’ONG n’est pas exempte de toute critique. La Cour l’invite à renforcer sa gouvernance et à améliorer la transparence des informations transmises aux donateurs, constatant que « les appels à dons sont centrés sur la protection d’espèces emblématiques mais ne mentionnent pas explicitement que le don peut être utilisé pour des actions de sensibilisation, qui représentent 40 % des emplois en missions sociales ». Autrement dit, les campagnes de souscription, souvent focalisées sur les espèces animales menacées, manquent de clarté, puisque les collectes ne vont pas exclusivement à la cause défendue.

L’organisme de contrôle se déclare, par ailleurs, « dans l’incapacité de se prononcer sur l’emploi des fonds représentant environ 16 % des ressources collectées auprès du public, versés à WWF International et aux autres WWF ».

Dans un contexte marqué par les révélations de harcèlement ou d’abus sexuels qui secouent des réseaux internationaux tels que Oxfam ou MSF, le WWF France sait que le risque existe d’altérer le lien de confiance avec ses donateurs. L’ONG, qui tire plus de 60 % de ses ressources de l’appel à la générosité publique, évolue pour le moment sur une courbe ascendante de dons et de legs : de l’ordre de 10,7 millions d’euros en 2011-2012, ils ont grimpé à 12,9 millions en 2015-2016, soit une hausse de 20 %.

Au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis), où le WWF France a son siège depuis août 2017, les reproches de la Cour des comptes sont par conséquent pris au sérieux. Depuis le contrôle, « certaines améliorations ont été faites, notamment par la création d’un comité d’audit, l’une des recommandations de la Cour », souligne la présidente du bureau France, Isabelle Autissier. En matière de gouvernance, par exemple, l’ONG examine désormais tous les mandats des membres de son conseil d’administration pour éviter tout risque de conflit d’intérêts.

« Dans les bulletins “Sur les traces du panda” [la lettre d’information envoyée aux donateurs], on insiste davantage sur les campagnes de sensibilisation qui font partie de nos missions sociales », ajoute Isabelle Autissier. La présidente du WWF France admet que des efforts de transparence restent à accomplir et reconnaît par ailleurs que l’appartenance à un réseau international complique la donne.

L’ONG ne conteste pas la difficulté des magistrats à suivre les versements au profit du réseau international mais explique, dans la réponse annexée au rapport, que « le fonctionnement d’une organisation présente dans plus de cent pays ne facilite pas le contrôle au regard des règles appliquées par une entité nationale comme la Cour des comptes ».