A Bourges, un festival de tonalités féminines
A Bourges, un festival de tonalités féminines
Par Sylvain Siclier (Bourges (Cher), envoyé spécial)
Dom La Nena, Sandra Nkaké et Mélanie De Biasio ont marqué la deuxième journée de la 42e édition du festival berruyer.
La 42e édition du festival berruyer se déroule du 24 au 29 avril 2018. / LE PRINTEMPS DE BOURGES-CRÉDIT MUTUEL
Un point d’exclamation derrière le mot « Femmes ». Tel est le titre de l’exposition de pochettes de disques, photographies et documents, et d’un cycle de conférences à la Maison Printemps, structure vitrée installée place Séraucourt, l’une des animations parallèles aux multiples concerts du Printemps de Bourges-Crédit mutuel. En lien avec cette thématique, la 42e édition du festival de musique, à dominante chanson et rock, du 24 au 29 avril, tend à la parité. Sinon tout à fait exacte, mais pas loin. Il y a « 40 % de spectacle exclusivement féminins et 10 % mixtes », a confirmé Boris Vedel, directeur du festival, dans La Croix, mardi 24 avril.
Ce Printemps particulièrement au féminin, c’est déjà un effet d’affichage, en ouvrant le festival, mardi 24, avec Naya, Juliette Armanet, Catherine Ringer et Véronique Sanson sous le vaste chapiteau du W, qui accueille jusqu’à 6 000 personnes. L’on peut le voir aussi, pour elles et pour d’autres programmées durant la semaine, comme la marque d’une actualité récente, le festival étant pour une bonne part le reflet des sorties de disques des mois passés et des tournées qui les accompagnent. Mercredi 25, si la soirée rap fait pencher la balance vers le masculin avec la seule Lala&ce pour quatre garçons, l’ensemble du programme du jour affichait aussi majoritairement des noms d’interprètes féminines, en solo ou en groupe.
DOM LA NENA - SCENIC WORLD
Durée : 02:25
Et parmi elles, la violoncelliste et chanteuse Dom La Nena, la chanteuse Sandra Nkaké et la flûtiste et chanteuse Mélanie De Biasio. Trois univers aux approches inventives, aux musiques qui sortent des cadres de leurs plus évidentes références. Avec Dom La Nena, à l’Auditorium, c’est un beau moment de charme, de douceur mélodique. Brésilienne, née à Porto Alegre, venue vivre en France, elle superpose des parties de violoncelle, archet et pizzicati, à des sonorités de claviers, quelques percussions, sa voix, promenade évocatrice de bossa ou samba, chanson légèrement pop, entre brésilien et français. Sans que les effets débordent, masquent la musique, simple, allègre. A un moment, sans micro, sa voix s’impose avec le seul accompagnement d’un ukulélé.
Dédié à Jacques Higelin
Au Théâtre Jacques Coeur, c’est un envol – le mot « fly » (voler) revient souvent dans les textes de ses chansons –, un voyage musical intense, que mène Sandra Nkaké. Elle avait été l’une des interprètes les plus exactes d’un hommage à Nina Simone, lors du festival en 2015, avec son rendu de Four Women.
Sandra Nkaké - "Change" [Official Video]
Durée : 04:03
Cette fois, Sandra Nkaké est là avec son répertoire – de superbes versions de Fly, justement et Change –, ses musiques, des ambiances qui viennent du rock, de la pop, mais sans appuyer, avec des touches de jazz ici, un élément de reggae fugitif, un rythme qui viendrait de l’un de ceux de l’Afrique noire. La précision de la diction, la force, l’énergie expressive de son chant emportent. Avec elle, le flûtiste et chanteur Ji Drû, la guitariste et chanteuse Tatiana Paris, la bassiste et chanteuse Mathilda Haynes et le batteur Mathieu Penot. Elle dédie son concert à Jacques Higelin. Elle a été radieuse de bout en bout.
Melanie De Biasio - Your Freedom is the End Of Me «the arena of failed obsessions» (Official Video)
Durée : 03:52
Après elle, Mélanie De Biasio. Aux sources du jazz, elle prend l’improvisation, le lyrisme de John Coltrane – sa reprise d’Afro Blue, de Mongo Santamaria, est plus dans la veine de la version de Coltrane, en croisements avec My Favorite Things –, de Pharoah Sanders, que cela soit dans le jeu à la flûte ou quand elle tourne autour de mots répétés, en vocaliste, au plus profond du son des mots. De la pop, elle tire plutôt des souvenirs du psychédélisme, avec le son du clavier électrique (Pascal Mohy), une sorte de manière planante. Son chant va vers le chuchotement, le retenu, une soudaine détente, pour mieux reprendre un jeu avec le silence, le souffle. Une forme de blues, Lilies, apporte comme une fantaisie, dans cet ensemble à l’envoûtante exigence.
Printemps de Bourge-Crédit mutuel, jusqu’au dimanche 29 avril, dans une dizaine de lieux. Programme complet et tarifs sur le site Internet : printemps-bourges.com