Migrants : 4 associations demandent à être reçues par Emmanuel Macron après ses critiques des ONG
Migrants : 4 associations demandent à être reçues par Emmanuel Macron après ses critiques des ONG
Le Monde.fr avec AFP
Le président avait accusé mardi le navire « Lifeline » d’avoir « coupé le signal » et d’être « intervenu en contravention de toutes les règles et des gardes-côtes libyens » en portant secours à 233 migrants.
Pour les quatre associations actives dans l’aide aux migrants, les déclarations d’Emmanuel Macron « marquent une étape supplémentaire dans le cynisme et l’hypocrisie de la politique migratoire française ». / POOL / REUTERS
Quatre associations actives dans l’aide aux migrants ont demandé mercredi à « être reçues collectivement » par le président Emmanuel Macron après ses critiques de l’ONG Mission Lifeline, qu’il a accusée de faire « le jeu des passeurs » au large de la Libye lors d’un récent sauvetage.
« En prétendant que les ONG font le jeu des réseaux de trafiquants, le président de la République porte une atteinte inédite à l’action de la société civile », ont affirmé Amnesty International France, La Cimade, Médecins du monde et Médecins sans frontières (MSF), qui se sont dites « consternées devant cette confusion de valeurs ».
Emmanuel Macron avait accusé mardi le navire de l’association allemande, le Lifeline, d’avoir « coupé le signal » et d’être « intervenu en contravention de toutes les règles et des gardes-côtes libyens » en portant secours à 233 migrants :
« On ne peut pas accepter durablement cette situation car au nom de l’humanitaire cela veut dire qu’il n’y a plus aucun contrôle. A la fin, on fait le jeu des passeurs en réduisant le coût du passage pour les passeurs. C’est d’un cynisme terrible. »
Pour les associations, ces déclarations « marquent une étape supplémentaire dans le cynisme et l’hypocrisie de la politique migratoire française mais aussi européenne » :
« En favorisant le refoulement et le maintien en Libye de milliers de personnes qui ont enduré des mois voire des années de privations, d’extorsion et de tortures, le président de la République renie les valeurs fondamentales du droit humanitaire. »
M. Macron est « capable de donner des leçons d’accueil au monde et en même temps, dans son propre pays, criminaliser les bénévoles, maintenir le refoulement illégal aux frontières même de mineurs ou encore passer sous silence les brutalités infligées aux personnes migrantes et la confiscation de leurs biens », ont-elles encore déploré.
Des propos « inappropriés »
De son côté, le directeur général de France Terre d’asile (FTDA), Pierre Henry, a déploré des propos « inappropriés, inopportuns et incongrus », car « l’Aquarius et le Lifeline obéissent simplement au droit maritime qui impose de sauver des vies de naufragés », ce qui « ne se discute pas ». « Une parole de président est symbolique, et Emmanuel Macron ne peut ignorer qu’il fait la joie des extrêmes droites en Europe, qui vont reprendre ses arguments à qui mieux mieux », a-t-il ajouté.
« C’est une ONG allemande que le président Macron accuse d’être d’un “cynisme terrible”. Il reprend ainsi une accusation qui était jusqu’ici le “privilège” de l’extrême droite italienne », a pour sa part affirmé sur Twitter le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure.
Pour Laurent Giovannoni, du Secours catholique, ces déclarations s’inscrivent dans « une dérive générale de l’Europe qui veut faire une gestion de la question migratoire par l’enfermement et l’externalisation ». La situation est « catastrophique », a-t-il affirmé.
La France « salue le travail des ONG » mais celui-ci doit « se faire dans le respect du droit international », a déclaré pour sa part le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, pour qui M. Macron « a eu raison d’attirer l’attention sur le fait qu’on peut parfois être ce que Lénine appelait les “idiots utiles”, c’est-à-dire les complices involontaires » des passeurs.
Le gouvernement maltais a accepté d’accueillir le Lifeline bloqué depuis des jours au large de ses côtes, que l’Italie avait refusé, mais avec un accord pour répartir les migrants parmi des pays membres volontaires. Parmi eux figurent le Portugal, la France mais aussi l’Italie.