Le gouvernement a tranché : à partir du 1er juillet, les tarifs du gaz vont augmenter de 7,45 %, la plus importante hausse depuis 6 ans pour les consommateurs. Pour un ménage moyen se chauffant au gaz, cette hausse se traduira par un surcoût d’environ 90 euros par an sur sa facture.

C’est un paradoxe : les ressources en gaz n’ont jamais été aussi abondantes et accessibles sur la planète, mais les tarifs payés par les 11,5 millions de consommateurs français vont continuer à augmenter. Après une période de très forte hausse en 2012, ceux-ci avaient fortement baissé en 2015 et 2016, avant de remonter progressivement.

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) avait proposé à la mi-juin au gouvernement d’augmenter les tarifs de 6,5 %. L’exécutif a donc choisi d’aller plus loin.

Flambée des prix du pétrole

Trois raisons expliquent cette augmentation de la facture des ménages. D’abord, la hausse des coûts d’approvisionnement : le gaz est acheté en partie sur des marchés de gros, dont les prix varient en fonction des contingences géopolitiques et des fluctuations du marché. La complexe formule de calcul de ces coûts dépend en partie des prix du pétrole, en très forte hausse ces derniers mois. C’est la hausse des prix du gaz sur les marchés de gros qui a poussé le gouvernement à décider d’une augmentation aussi importante.

Mais ce n’est pas la seule raison. Le CRE a également justifié sa proposition par la hausse du coût des infrastructures, en particulier dans le transport, le stockage et la distribution. Le réseau français a connu d’importants investissements ces dernières années, qui se sont répercutés sur la facture de gaz. Le réseau de transport de gaz, GRTGaz, a ainsi investi 600 millions d’euros par an sur 10 ans pour moderniser ses infrastructures.

L’installation du compteur communicant de gaz Gazpar, mis en œuvre par le réseau de distribution GRDF est également intégrée dans ces coûts. De même, la mise en place de nouvelles règles pour le stockage de gaz, essentiel pour pouvoir assurer un passage de l’hiver sans encombre, a des répercussions sur la facture.

Fin des tarifs réglementés

A cet ensemble de facteurs, s’ajoute aussi une logique propre aux tarifs réglementés, qui sont aujourd’hui presque exclusivement commercialisés par Engie (ex-GDF Suez). Ces tarifs sont censés refléter les coûts de commercialisation de l’énergéticien. Ils sont en augmentation, même si la CRE a demandé à Engie de fournir des « efforts supplémentaires (…) afin de limiter la hausse des coûts commerciaux ».

Pourtant, ces tarifs vivent un curieux moment : ils sont appelés à disparaître. Le Conseil d’Etat a estimé, à l’été 2017, qu’ils étaient en contradiction avec le droit européen de la concurrence, à la grande satisfaction des concurrents d’Engie.

Près de 5 millions de ménages sont toujours clients d’Engie aux tarifs réglementés de vente (TRV), définis par l’Etat, alors que plus de 6 millions ont basculé sur des offres moins chères, chez Engie ou chez des concurrents, comme ENI, Total Spring ou EDF. Mais ces offres alternatives sont très souvent indexées sur les TRV. Une augmentation de ces tarifs touche donc la quasi-totalité des clients du gaz en France.

Les fournisseurs alternatifs de gaz espéraient que ces tarifs disparaissent rapidement, mais le gouvernement en a décidé autrement : ils ne vont s’effacer, progressivement, que d’ici à 2022. Et de nombreux détails manquent sur la manière dont le gouvernement compte s’y prendre pour les supprimer.

Hausse de la fiscalité

Cette augmentation s’ajoute à des hausses précédentes cette année, particulièrement celle de janvier, qui visait à intégrer dans les tarifs la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel (TICGN), en hausse de 44 %. Cette hausse, votée par le Parlement en 2017, va se poursuivre pendant les cinq prochaines années, pour atteindre 172 % d’augmentation cumulée en 2022.

Cette taxe finance notamment le chèque énergie de 150 euros, destiné aux 4 millions de foyers les plus modestes. Elle augmente également après la hausse important de la contribution climat énergie, autrement appelée taxe carbone, qui est l’une de ses composantes.

« Pour un certain nombre de ménages, c’est déjà trop élevé, et pourtant, la facture continue d’augmenter », déplore Nicolas Mouchnino, chargé de l’énergie à l’UFC Que Choisir. Les associations de consommateurs recommandent à ces derniers de privilégier des offres à taux fixe, sans variation pour une période donnée, pour mieux résister aux fluctuations du marché. « Mais il faut aussi intégrer le fait que les tarifs de l’électricité ou du gaz vont continuer à augmenter et que les consommateurs ont intérêt à réduire leur consommation. Pour cela, l’Etat doit améliorer les financements de la rénovation énergétique », estime M. Mouchnino.