• Gérard Pesson
    Musique de chambre, Cantates

    Marion Tassou (soprano), ensemble vocal Exaudi, L’Instant donné

Pochette de l’album « Musique de chambre, Cantates », de Gérard Pesson. / NOMADMUSIC

Probablement suscité par le soixantième anniversaire du compositeur Gérard Pesson, ce double CD est un magnifique cadeau dont profite aussi l’auditeur, accueilli par chaque œuvre comme à une table d’hôtes. Le premier disque fait la part belle à des partitions anciennes, telles que La lumière n’a pas de bras pour nous porter (fantomatique solo de piano où les notes jouent à cache-cache avec divers frottements du clavier) et Cinq chansons (sur des textes de Marie Redonnet qui appellent une incarnation fugitive). On y découvre aussi Etant l’arrière son, théâtre d’un lyrisme plus à découvert que par le passé. Sensualité éthérée, rythmique suggestive, expression parcellaire, les constantes de Gérard Pesson ne varient pas mais leur traitement se renouvelle d’un morceau à l’autre par une culture de l’oreille que le compositeur pratique en érudit et en poète. L’étonnant triptyque Cantate égale pays (CD 2) en témoigne. Localement proche de l’Arte povera, Pesson s’y impose aussi en maître d’un nouvel Ars subtilior. Pierre Gervasoni

2 CD NoMadMusic.

  • Kip Hanrahan
    Crescent Moon Waning

Pochette de l’album « Crescent Moon Waning », de Kip Hanrahan. / AMERICA CLAVÉ-ENJA YELLOW BIRD/L’AUTRE DISTRIBUTION

« La musique que nous interprétons sonne comme aucune autre musique », indique, dans le livret de Crescent Moon Waning, Kip Hanrahan, producteur, chef d’orchestre, organisateur de cet univers de fait assez unique, depuis bientôt quarante ans. L’album a été enregistré entre août 2015 et décembre 2016, avec des parties provenant d’une répétition en 1994 et en conclusion un extrait d’un concert de 1984. Un assemblage de percussions et d’assises mélodico-rythmiques de la basse, de fines interventions solistes de saxophones et de violons, parfois une guitare, des voix féminines et masculines ici murmurées, presque parlées, là dans un chant de sensualité frémissante. En une combinaison inventive d’éléments de jazz et de musiques afro-cubaines, tout en surprises, décalages et croisements. Avec lui, une trentaine de musiciennes et musiciens, fidèles depuis des années, dont les bassistes Steve Swallow, Fernando Saunders, Jack Bruce, mort en 2014, présent sur le thème de 1984, le violoniste Alfredo Triff, les saxophonistes Charles Neville (mort le 26 avril) et Chico Freeman, le haut du panier des percussionnistes, dont Robby Ameen, Milton Cardona, Giovanni Hidalgo, Ignacio Berroa… Intense, rêveur, emporté ou sur le fil de la brisure, profondément musical. Sylvain Siclier

1 CD American Clavé-Enja Yellowbird/L’Autre Distribution.

  • Rolling Blackouts Coastal Fever
    Hope Downs

Pochette de l’album « Hope Down », de Rolling Blackouts Coastal Fever. / SUB POP/PIAS

Si Hope Downs est le premier album de Rolling Blackouts Coastal Fever, ce groupe indie rock australien existe depuis 2011 et compte déjà plusieurs singles et deux mini-albums, Talk Tight (2017) et The French Press (2017). Pris sous la houlette du label américain Sub Pop (Nirvana, The Shins), la formation de Melbourne s’illustre dans le registre de la pop romantique et accrocheuse. Son principal atout ? Trois guitaristes et autant de compositeurs, qui plus est talentueux, qui se partagent le chant – les cousins Fran Keaney et Joe White, les frères Tom et Joe Russo (basse) –, qui puisent ainsi dans un vivier d’inspiration où se fondent les six-cordes racées des Strokes et le sens mélodique d’un R.E.M. Le nerveux Talking Straight, premier single au refrain entêtant, inaugure une collection tout aussi réjouissante de mini-hymnes sur le reste de ce long format. Et de perpétuer dignement la flamme de leurs regrettés aînés, The Go-Betweens. Franck Colombani

1 CD Sub Pop/PIAS.

  • Ben Howard
    Noonday Dream

Pochette de l’album « Noonday Dream », de Ben Howard. / TÔT OU TARD/ISLAND RECORDS

Après s’être imposé en deux albums, Every Kingdom (2011) et I Forget Where We Were (2014), comme l’un des plus brillants héritiers britanniques du « songwriting » folk, Ben Howard s’éloigne de l’orthodoxie des complaintes guitare-voix, pour creuser une veine atmosphérique planant telle une brume envoûtante sur Noonday Dream, son troisième opus. Plus proche ici des expériences oniriques de John Martyn, période Solid Air (1973), que du classicisme boisé des premiers Joni Mitchell ou Simon and Garfunkel, ce mélodiste amoureux de méditation bucolique et maritime habite ses longues rêveries d’une palette instrumentale capable de brasser fluidité cristalline et distorsion orageuse, nappes aériennes et rythmiques tendues. Le tout baignant dans les sons réels ou fantasmés de son environnement. Stéphane Davet

1 CD Tôt ou Tard/Island Records.