Au Botswana, les éléphants victimes du « pire épisode de braconnage en Afrique »
Au Botswana, les éléphants victimes du « pire épisode de braconnage en Afrique »
Au moins 90 cadavres de pachyderme ont été dénombrés par l’ONG Eléphants sans frontières au cours de son dernier recensement aérien conduit fin août.
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime que le très rémunérateur trafic de l’ivoire a tué plus de 300 000 éléphants au cours de la dernière décennie en Afrique. / Charmaine Noronha / AP
Leurs défenses d’ivoire avaient été méthodiquement arrachées. Au moins 90 cadavres d’éléphant ont été dénombrés par l’ONG Eléphants sans frontières au cours de son dernier recensement aérien de la population de pachydermes du Botswana, conduit fin août en partenariat avec le ministère de la faune sauvage et des parcs nationaux.
« Nous avons commencé notre recensement le 10 juillet, a expliqué mardi 4 septembre le responsable de l’ONG, Mike Chase, « et nous retrouvons chaque jour plus d’éléphants morts ». La plupart ont été tués par « des balles de gros calibre », selon M. Chase, près de points d’eau de la célèbre réserve du delta de l’Okavango, dans le nord de pays. « Il s’agit du pire épisode de braconnage en Afrique dont j’ai jamais été informé », a souligné le défenseur de la faune.
Rangers désarmés
Ces tueries interviennent quelques semaines après la décision controversée des autorités de Gaborone de désarmer leurs « rangers » spécialisés dans la lutte antibraconnage.Le ministre du tourisme, Tshekedi Khama, a confirmé l’étendue du massacre, et s’est dit « très préoccupé, très inquiet ».
« Nous avons été épargnés par les braconniers pendant longtemps, nous réalisons maintenant à quel point ils sont sophistiqués. (...) Malheureusement, nous apprenons parfois nos leçons de la pire façon. »
Coincé entre la Zambie et l’Afrique du Sud, le Botswana abrite la plus grande population africaine d’éléphants en liberté, évaluée à encore 135 000 animaux en 2015. La richesse de sa faune en a fait un sanctuaire très prisé des amateurs de safaris haut de gamme et un des pôles de développement de son économie, qu’il protège grâce à un arsenal antibraconnage jusque-là considéré comme exemplaire. Jusqu’au mois de mai, ses rangers étaient ainsi lourdement armés et autorisés à tirer sur les braconniers.
En mai, le gouvernement du nouveau président, Mokgweetsi Masisi, en place depuis le mois précédent, avait ordonné le désarmement de ces unités, sans vraiment expliquer pourquoi. Son prédécesseur, Ian Khama, était considéré comme un défenseur passionné de la faune sauvage de son pays.
300 000 éléphants tués en dix ans
Le Fonds international pour le bien-être animal (IFAW) s’est dit choqué par l’ampleur du massacre. « Jusque-là, les troupeaux d’éléphants étaient largement laissés en paix au Botswana », a relevé son vice-président, Jason Bell, « mais désormais ils sont dans la ligne de mire des braconniers ». Selon Mike Chase, de l’ONG Eléphants sans frontières, les auteurs de cette vague de braconnage viennent de pays voisins comme l’Angola et la Zambie. « Là-bas, ils ont tué tant d’éléphants qu’ils ont presque disparu », a-t-il souligné.
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime que le très rémunérateur trafic de l’ivoire a tué plus de 300 000 éléphants au cours de la dernière décennie en Afrique, faisant chuter leur nombre de 415 000 à 111 000.