Droit d’auteur et numérique : les mots pour comprendre la directive du Parlement européen
Droit d’auteur et numérique : les mots pour comprendre la directive du Parlement européen
L’adoption du texte soulève un intense débat sur les bénéfices ou les dangers qu’il représenterait pour les contenus culturels sur Internet. Ce lexique vous aide à saisir les termes de la discussion.
Le Parlement européen a finalement adopté, mercredi 12 septembre, une directive qui doit adapter le droit d’auteur à l’heure du numérique. Ce vote intervient après une campagne intense de lobbying à propos de ce texte, dont une première version avait été rejetée par le Parlement en juillet.
Pour les partisans de la directive – industries culturelles, médias, artistes… –, elle est en effet nécessaire pour assurer une meilleure rémunération des créateurs et des éditeurs dans l’économie actuelle d’Internet. Pour les opposants – les grandes entreprises du Web et les défenseurs des libertés numériques –, il s’agit d’un texte européen dangereux à la fois pour leur business et leur fonctionnement, ainsi que pour la liberté d’expression.
Pour bien comprendre les enjeux liés à ce texte (qui doit encore être négocié entre la Commission, le Conseil européen et le Parlement européen, avant d’être traduit dans les législations nationales de chaque pays membre de l’UE), voici un lexique précis des mots et expressions qui reviennent le plus souvent à son sujet.
Article 11
Cet article de la directive européenne crée le principe d’un « droit voisin » dont vont pouvoir se réclamer les entreprises de presse. Il contraint les grandes plates-formes du numérique à rémunérer les médias lorsqu’elles affichent des extraits d’articles ou d’autres contenus sur leurs services.
Droits voisins
Le droit d’auteur est un droit de propriété intellectuelle sur une œuvre de l’esprit. Les « droits voisins du droit d’auteur » peuvent être accordés à des personnes physiques ou morales qui jouent un rôle dans la création de cette œuvre de l’esprit, sans en être directement l’auteur : les entreprises de presse sont concernées car elles permettent à des journalistes de publier des articles de presse, sans en être directement l’auteur. Celles et ceux qui bénéficient d’un « droit voisin » peuvent toucher des droits patrimoniaux lorsque l’œuvre est utilisée, et ont un droit moral sur le respect de l’œuvre. Ils existent déjà dans la musique pour les artistes interprètes et les producteurs, par exemple.
Snippets et « mots individuels »
Un élément clef des débats sur l’article 11 consiste à définir ce qui constitue, ou non, une « exploitation » d’un article de presse. Le texte adopté vise assez spécifiquement les « snippets », c’est-à-dire les courts extraits d’un article qui sont affichés par exemple lorsqu’on les partage sur Facebook ou qu’on parcourt Google actualités. L’article 11, dans la version adoptée mercredi 12 septembre, précise toutefois que les liens seuls ne sont pas concernés, et que ces derniers peuvent être accompagnés de « mots individuels » – une notion floue que les Parlements nationaux devront vraisemblablement préciser.
Article 13
Cet article vise à contraindre les grandes plates-formes d’Internet (Google, Facebook…) à négocier des accords avec les titulaires de droits – ce qui est déjà largement le cas, mais les ayant droit estiment que ces accords leur sont défavorables. A défaut d’accord, les grandes plates-formes devront s’engager à empêcher leurs utilisateurs de publier des contenus protégés par le droit d’auteur.
Blocage automatique
Très critiqué, le principe d’un blocage automatique de tous les contenus ne respectant pas le droit d’auteur est déjà en place sur certaines plateformes, dont YouTube. Ce système, dit « content ID », scanne automatiquement les morceaux de musique et les vidéos mis en ligne sur la plateforme pour y détecter des « signatures numériques », théoriquement uniques et propres à chaque morceau ou vidéo. Lorsque YouTube détecte qu’une vidéo utilise du contenu soumis au droit d’auteur, il le bloque ou, si les ayant droit l’acceptent, laisse la vidéo en ligne, mais reverse une partie des revenus qu’elle génère aux détenteurs originaux des droits.
Exceptions au droit d’auteur
Les adversaires de l’article 13 notaient que les systèmes de filtrage automatique ne respectent que très partiellement les droits des internautes sur les exceptions au droit d’auteur. Dans la plupart des pays européens, la loi prévoit notamment des dérogations plus ou moins étendues pour les parodies, les remix, ou le droit de citation.