« J’ai participé à une simulation de l’ONU, avec 2 500 étudiants du monde entier »
« J’ai participé à une simulation de l’ONU, avec 2 500 étudiants du monde entier »
Par Claire Ané
Grâce à son engagement dans une association étudiante de Sciences Po Lille, Inès Ameur est partie au Panama tenir le rôle d’une diplomate lors d’une gigantesque simulation des Nations unies.
Ines Ameur, à droite, a porté les couleurs de Science Po Lille en mars, au Harvard World MUN, à Panama, auprès de plus de 2 000 étudiants internationaux.
Ines Ameur, étudiante en deuxième année à Sciences Po Lille, raconte son engagement au sein de l’association Munwalk (Model United Nations Worldwide Association for Leadership and Knowledge), qui lui a permis de participer, en mars, à la plus grande simulation mondiale des Nations unies, à Panama.
« Quand j’ai commencé à Sciences Po Lille, j’entendais partout parler de Munwalk, une association qui forme à l’art de la diplomatie au sein de l’ONU (Organisation des Nations unies), en anglais. Passionnée par les relations internationales, j’ai décidé de la rejoindre.
Nous étions une centaine à participer aux entraînements, qui ont lieu deux fois par semaine, durant deux heures. Un investissement lourd dans une école où la charge de travail est déjà importante, mais qui permet de participer à l’une des simulations des Nations unies organisées par l’association Harvard Model United Nations : le Harvard National MUN, qui se tient à Boston (Etats-Unis), près de leur campus, le New York MUN, dans les vraies tribunes de l’ONU, et le Harvard World MUN, le plus important, qui change de ville chaque année.
J’ai appris le fonctionnement des Nations unies, à préparer des discours, à diriger une coalition ou encore à négocier, en anglais toujours. Après nous avoir observés débattre sur des sujets tels que le trafic d’armes, les compagnies militaires privées ou le sort des minorités, les membres de Munwalk ont sélectionné dix-huit d’entre nous, en décembre, pour partir au Harvard World MUN, à Panama, défendre les couleurs de Sciences Po Lille face aux plus grandes universités mondiales comme Yale, la LSE ou encore l’université de Chicago.
Tenter de briller en anglais devant des centaines de personnes
Les étudiants de Harvard ont réparti les rôles entre les deux mille cinq cents participants attendus : avec une de mes camarades de la filière franco-britannique, nous étions chargées de représenter le gouvernement d’Indonésie dans le comité des droits humains sur la crise des Rohingya. Une préparation intensive a débuté, avec l’aide de membres du bureau de Munwalk ayant déjà participé à des simulations : nous avons écrit des discours pour défendre la position de notre pays, des argumentaires en vue des négociations en comité, appris à rédiger une résolution de l’ONU et d’autres documents…
Lors du départ, en mars, nous étions tous tendus à l’idée de nous confronter à des étudiants plus expérimentés et souvent beaucoup plus âgés — et de fait, ma coéquipière et moi, qui avions 18 ans, avons travaillé là-bas avec des étudiants diplômés de plus de 25 ans ! Le président panaméen, Juan Carlos Varela, était l’invité d’honneur de la conférence inaugurale.
Ce fut une semaine de stress et de rebondissements, où il fallait chaque jour tenter de briller en anglais devant des centaines de personnes, en majorité anglophones. Nous nous retrouvions souvent dès 7 h 30 dans le hall avec nos collègues de travail afin de discuter des avancées de la veille et de nos stratégies du jour. Et passions nos soirées, toujours accompagnés des responsables de notre délégation Munwalk, à écrire de nouveaux discours, à préparer notre argumentation, à écouter les conseils de chacun…
Challenge et dépassement de soi
Nous étions très motivés, et notre délégation lilloise a plutôt bien réussi : avec une de nos camarades qui participait au comité de l’Unicef (Fonds des Nations unies pour l’enfance), nous avons été distinguées par des Verbal Commendation Awards, décernés par des muners expérimentées de Harvard. Ces prix sont encore assez peu connus et reconnus en France, mais ils sont très appréciés quand on postule pour un stage dans le monde anglophone notamment, ainsi que dans les universités américaines. Ils sont même un enjeu pour certains étudiants étrangers : obtenir un prix lors d’un MUN leur permet d’être remboursés de leurs frais de scolarité !
Au-delà du challenge et du dépassement de soi, le MUN nous a permis de rencontrer des étudiants du monde entier passionnés comme nous par les relations internationales, de parler de nos études et de nos modes de vie. Nous avons eu des discussions avec des Vénézuéliens bloqués à l’extérieur de leur pays en raison de la crise politique et économique, avec des Mexicaines qui ne peuvent pas sortir librement dans la rue… Ces problèmes que nous connaissions par des notifications sur nos téléphones sont devenus bien plus réels. Nous avons aussi pris conscience de la chance que nous avons d’évoluer dans un environnement loin des problèmes d’insécurité.
Participer à une telle expérience m’a aussi permis de prendre confiance en moi, de progresser en anglais et d’acquérir des compétences de négociation et d’art oratoire. Selon les anciens muners, c’est très utile dans le monde professionnel, et avoir fait partie de l’association, mieux connue à l’étranger que la Sorbonne, HEC ou Sciences Po Paris, ouvre aussi beaucoup de portes. Par exemple, l’ancien président de l’association est en stage à la direction des Nations unies du ministère des affaires étrangères. L’actuel vice-président de Munwalk a lui obtenu, après une candidature spontanée, un stage au sein du cabinet du ministre de la justice de Côte d’Ivoire.
Faire grandir le poids de la France dans ces rencontres
Cette année, je suis devenue membre du bureau Munwalk de l’école. Nous organisons le « MUN France », la plus grande simulation française, en 2019 à Lille, et invitons de nombreux établissements et associations européens à y participer. Il s’agit de développer la sensibilité des étudiants aux relations internationales, et aussi de faire reconnaître les compétences acquises lors des simulations de l’ONU, comme c’est le cas dans le monde anglo-saxon.
Nous aimerions aussi faire grandir le poids de la France dans ces rencontres prestigieuses, et développer l’accès aux conférences sur des fondements méritocratiques. Même si de nombreuses entreprises nous soutiennent déjà, j’ai dû débourser près de 600 euros pour partir à la conférence au Panama l’an dernier. Une des membres de l’association est chargée de signer de nouveaux accords, pour mieux financer les départs. Le prochain Harvard World MUN étant organisé à Madrid, nos délégués devront débourser environ 350 euros. Notre but est que le prix ne soit plus un obstacle. »