Benjamin Griveaux à la sortie du conseil des ministres du 19 décembre, au palais de l’Elysée à Paris. / JULIEN MUGUET POUR "LE MONDE"

C’est le cœur du pouvoir qui a été visé, samedi 5 janvier, par les « gilets jaunes ». Une quinzaine de personnes, dont certaines portaient un gilet jaune, ont enfoncé la lourde porte du ministère du porte-parolat à l’aide d’un engin de chantier. Evacué en urgence de son bureau, Benjamin Griveaux a dénoncé une « attaque inadmissible contre la République ».

Le parquet de Paris a ouvert une enquête confiée au 3e district de police judiciaire. Il n’y a pas eu pour l’instant d’interpellation. Une telle intrusion dans un ministère est très rare. La dernière en date remonte à 1999 avec le saccage par des agriculteurs du bureau de Dominique Voynet au ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement.

« Débordements factieux »

L’intrusion a déclenché de vives réactions au sein de la majorité. « Honte aux pyromanes de la République », a tweeté le secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement, Marc Fesneau, dont les bureaux sont dans le même lieu que ceux de M. Griveaux. Le secrétaire d’Etat Laurent Nuñez a pour sa part évoqué sur le plateau de BFM-TV des « débordements de factieux extrêmement violents » émanant d’individus qui « cherchent à faire tomber la démocratie ».

Sans faire référence à cet incident en particulier, le président Emmanuel Macron a dénoncé une « extrême violence » venue « attaquer la République – ses gardiens, ses représentants, ses symboles ». « Justice sera faite », a-t-il encore promis.

C’est une réponse « à la violence du gouvernement », estime pour sa part l’Insoumis Juan Branco, ex-avocat de Jean-Luc Mélenchon, qui dit avoir été aux côtés des auteurs. Ces manifestants étaient des « gilets jaunes lambda » , affirme-t-il, qui ont « répondu en investissant le lieu censé porter leurs mots ».

Le leader de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, a lui mollement condamné cette action. « Qui sème le vent, récolte la tempête. Benjamin Griveaux parlait d’aller plus loin dans le changement, d’être plus radicaux” : il a dû évacuer son ministère. Je condamne les violences, mais aussi la volonté de l’exécutif d’envenimer la situation », a-t-il affirmé.

Violence « inadmissible »

La porte-parole des Républicains, Lydia Guirous, tout en condamnant « fermement » des violences « inadmissibles », a cité Molière en déclarant que « le mépris est une pilule qu’on peut avaler mais qu’on ne peut mâcher ».

Selon le porte-parole du PS, Pierre Jouvet, « aucune contestation ne justifie de frapper des policiers à terre, d’attaquer un ministre, de casser, de brûler ». « Ces violences sont l’œuvre de voyous qui veulent faire dégénérer le mouvement et discréditer les revendications » des « gilets jaunes », a-t-il écrit sur Twitter.

Les « gilets jaunes », dont certains ne cachent pas leur souhait de renverser le pouvoir en place, ont à plusieurs reprises tenté de briser les cordons de police pour s’approcher de l’Elysée au cours des manifestations qu’ils mènent tous les samedis depuis la mi-novembre. L’un des leaders du mouvement, Eric Drouet, interrogé sur ce qu’il comptait faire si la manifestation arrivait devant l’Elysée, avait ainsi répondu : « On rentre dedans ».

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