France 3, mercredi 16 janvier à 21 heures, enquête

Dépressifs, violents, décédés, leurs parents sont dans l’incapacité de les prendre en charge : 341 000 mineurs sont ainsi placés en France par l’aide sociale à l’enfance, soit en maison d’enfants, soit en foyer d’urgence, soit en famille d’accueil, afin de leur garantir un cadre de vie serein – en théorie­.

Parti à la rencontre de ces mineurs, le magazine « Pièces à ­conviction » va découvrir une ­réalité tout autre. Aux Cèdres Bleus, à Pornic (Loire-Atlantique), maison d’enfants qui en accueille une quarantaine, Missa, 11 ans, s’effondre en pleurs lorsqu’elle comprend « qu’elle ne rentrera pas chez elle ce soir ». « Souvent les enfants croient que c’est leur faute s’ils sont là », explique un des vingt éducateurs qui se relaient auprès des jeunes pensionnaires. Des larmes qui ne surprennent pas en un tel lieu.

Lyes Louffok, ancien enfant placé : « Dans chaque département, je peux signaler un centre en dysfonctionnement »

Placé à la naissance, Lyes Louffok, 24 ans, s’est fait connaître en publiant Dans l’enfer des foyers (Flammarion, 2014), dans lequel il révèle les maltraitances qu’il a subies, ballotté de foyers en familles d’accueil. Aujourd’hui membre du Conseil national de la protection de l’enfance, il affirme : « Dans chaque département, je peux signaler un centre en dysfonctionnement. »

Caméra cachée

Une lettre ouverte titrée « Les enfants sacrifiés de la République » met les journalistes de « Pièces à conviction » sur la piste du foyer d’Eysines, en Gironde, qui héberge 400 jeunes. Deux anciens employés racontent « la violence endémique » qui y règne. Sur les vidéos tournées en caméra cachée, les insultes fusent (« Va te faire enc… ») ; un agent de sécurité brutalise un garçon. « C’est insoutenable », déclare la directrice adjointe du foyer, devant les images. Selon une éducatrice, une petite fille de 4 ans a été vue faisant une fellation à un garçon de 10 ans. « Oui », les enfants sont en danger, dit-elle.

Huit milliards d’euros sont distribués chaque année aux départements, décisionnaires sur ce sujet. Mais responsables politiques et sociaux apparaissent dépassés. « Vous voulez qu’on en fasse quoi de ces gamins ? », interroge la vice-présidente du département chargée de la protection de l’enfance, Emmanuelle Ajon. A 18 ans, ils partiront pour un ailleurs pas forcément meilleur. « Un SDF sur quatre est un ancien enfant placé », rappelle Lyes Louffok.

Enfants placés, les sacrifiés de la République, de Sylvain Louvet (100 min). www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-3/pieces-a-conviction/