Comment les îles Tonga ont vécu deux semaines sans Internet
Comment les îles Tonga ont vécu deux semaines sans Internet
Le Monde.fr avec AFP, AP et Reuters
Le câble reliant cet archipel du Pacifique au réseau mondial a été endommagé, perturbant sérieusement la vie de ses 100 000 habitants.
L’archipel des Tonga regroupe environ 170 îles et 100 000 habitants. / David Broad / CC BY 3.0
A quoi ressemble la vie, en 2019, quand on se retrouve soudainement coupé d’Internet ? Les 100 000 habitants des îles Tonga l’ont découvert le 20 janvier, quand le câble sous-marin connectant cet archipel du Pacifique au réseau mondial a été endommagé. Le problème a finalement été réglé samedi 2 février, mais les Tongiens risquent de se souvenir longtemps de cet épisode.
Pendant deux semaines, ils ont été privés d’Internet, avec des conséquences particulièrement problématiques pour les activités commerciales et touristiques du pays. Les paiements par carte bleue, par exemple, ont été très perturbés, et les appels internationaux rendus impossibles. Les transferts d’argent, que les expatriés envoient fréquemment à leurs familles, ont aussi connu des difficultés, privant certains foyers d’une part notable de leur budget.
Des heures de file d’attente
Dans la capitale, Nuku’alofa, des opérateurs ont mis à disposition des connexions par satellite, avec un débit très limité. Priorité a été donnée aux agences gouvernementales, aux banques et aux compagnies aériennes. Mais interdiction d’utiliser les réseaux sociaux, trop gourmands en bande passante. « Nous savons que les gens ont besoin de Facebook. Mais on ne peut pas se concentrer sur le luxe quand on est coincé sur une île sans nourriture », a déclaré Piveni Piukala, l’un des dirigeants de Tonga Cable Ltd, qui opère le câble, à l’agence Associated Press (AP). La coupure n’a toutefois pas été assez longue pour que les îles Tonga se retrouvent privées de ressources, bien que les commandes de marchandises aient été fortement perturbées.
Là où des connexions par satellite étaient possibles, de longues files d’attente se sont formées, de personnes espérant se connecter quelques minutes. Tony Matthias, propriétaire d’une agence de voyage, a par exemple expliqué au New York Times qu’il avait dû faire la queue deux fois par jour, souvent plusieurs heures, pour répondre à ses clients potentiels – faute de quoi il risquait de les perdre.
« J’ai un hôtel et je n’ai aucune idée de qui a réservé sur Booking.com ou Expedia », a de son côté témoigné Kjell Stave, propriétaire du Mystic Sands, auprès de l’agence Reuters. La responsable du Scenic Hotel Tonga a quant à elle raconté qu’après quelques jours sans pouvoir recevoir de paiements, et quelques annulations de la part de clients, elle avait bénéficié d’un statut « prioritaire » de la part du gouvernement pour bénéficier d’un accès par satellite. D’autres plus petits établissements n’ont pas eu cette chance, regrette-t-elle.
L’hypothèse d’un sabotage
Heureusement, samedi 2 février, « nous nous sommes réveillés avec une nouvelle bien agréable », a annoncé le porte-parole du gouvernement tongien, Lopeti Senituli, pour annoncer le retour d’Internet. « Ces deux dernières semaines ont été calmes, alors les gens essaient de rattraper le temps perdu dans les potins et les nouvelles », a-t-il ajouté.
Cet épisode aura coûté cher aux îles Tonga, sans compter les coûts de réparation du câble, évalués à 870 000 euros. Se pose aussi la question d’un « plan B », dans le cas où un autre problème de ce genre se reproduise. « Malheureusement, et c’est le cas pour beaucoup d’îles du Pacifique, il n’y a qu’un seul câble et il n’y a pas assez de budget pour en avoir deux », regrette Christian Patouraux, responsable de l’opérateur Kacific, interrogé par AP.
Si le câble a été réparé, les causes de sa rupture sont encore floues. La première hypothèse avançait qu’un pétrolier aurait arraché par accident le câble avec son ancre. Mais les constats de l’équipe chargée de la réparation mettent en doute cette hypothèse, avec des dégâts repérés à plusieurs miles marins les uns des autres. Piveni Piukala a évoqué la possibilité d’un sabotage.