A l’Elysée, Emmanuel Macron célèbre le « romantique » Michel Houellebecq
A l’Elysée, Emmanuel Macron célèbre le « romantique » Michel Houellebecq
Par Olivier Faye
Le romancier a été décoré chevalier de la Légion d’honneur, jeudi 18 avril, par le chef de l’Etat, en présence notamment de Nicolas Sarkozy.
Il est sorti de l’Elysée à côté de sa femme, la cigarette aux lèvres et le pas léger, un peu comme si la gloire républicaine le faisait flotter sur le gravier de la cour d’honneur. Michel Houellebecq a été décoré, jeudi 18 avril, chevalier de la Légion d’honneur par Emmanuel Macron. Une distinction que le romancier a accueillie devant une petite trentaine de convives, dûment sélectionnés par ses soins.
Nicolas Sarkozy et Bruno Le Maire, du côté des responsables politiques, côtoyaient Jérôme Coumet, le maire du 13e arrondissement de Paris, où l’écrivain réside et s’est marié, en septembre 2018. Teresa Cremisi, l’éditrice de Houellebecq chez Flammarion, était là, elle aussi, tout comme les romanciers Frédéric Beigbeder et Marin de Viry, ou le philosophe Alain Finkielkraut.
Sortie de l’ÉlyséeMichel Houellebecq et son épouse Lysis après la remise de la Légion d’honneur par @EmmanuelMacron https://t.co/q40yMkMRxv
— jerome_coumet (@Jérôme Coumet)
Côté journalistes, David Pujadas est arrivé en retard, mais il s’est rattrapé en allant dîner avec l’honoré du soir dans un restaurant du quartier. Geoffroy Lejeune et Charlotte d’Ornellas, figures de proue de l’hebdomadaire ultraconservateur Valeurs actuelles – qu’affectionne particulièrement Houellebecq – étaient bien à l’heure, eux. Ce grand pourfendeur de la construction européenne doit d’ailleurs participer à un débat organisé par le journal sur l’Europe, le 25 avril. Ambiance « chaleureuse » et « bon enfant », donc.
« Roman français »
Brigitte Macron a fait visiter les salons du palais à quelques-uns à l’issue de la cérémonie – Nicolas Sarkozy était déjà parti. Pendant ce temps-là, d’autres profitaient sur la terrasse des premières chaleurs du printemps.
Dans son discours, Emmanuel Macron a joué avec les différences apparentes qui le distinguent du romancier. « Vous êtes viscéralement antieuropéen, je suis le plus européen des présidents français, a dit en souriant le chef de l’Etat. On vous accuse d’être réactionnaire, misogyne, islamophobe ; tandis que je me bats pour le progressisme, les droits des femmes et le refus des discriminations. »
Pourquoi, dès lors, célébrer ce chroniqueur d’un Occident désenchanté ? Car le président de la République croit distinguer derrière le pessimisme de l’auteur de Soumission une forme de romantisme. « Vous êtes un romantique perdu dans un monde qui est devenu matérialiste », a déclaré l’ancien ministre de l’économie de François Hollande. « Vous avez réinventé le roman français », a-t-il poursuivi.
« Ancienne splendeur »
« Macron a beaucoup de considération pour la réussite, analyse un participant à la fête. Il lit dans Michel Houellebecq des choses qui l’intéressent, sur le besoin de transcendance notamment. Il est un peu en recherche de ça. » On peut se revendiquer agnostique et louer en même temps « l’histoire millénaire » de Notre-Dame de Paris.
Dans un entretien croisé avec Geoffroy Lejeune accordé au numéro de mai de la revue américaine First Things, une publication religieuse conservatrice, Michel Houellebecq a exalté les « catholiques non chrétiens », d’Auguste Comte à Eric Zemmour, qui « admirent l’Eglise catholique romaine pour son pouvoir de direction spirituelle des êtres humains, et surtout d’organisation des sociétés humaines, sans pour autant être chrétiens ».
« La restauration du catholicisme dans son ancienne splendeur peut-elle réparer notre civilisation endommagée ?, s’interroge l’exégète de Huysmans. Là nous sommes d’accord, c’est beaucoup plus simple, évident presque : la réponse est oui. » Un véritable propos de bâtisseur de cathédrales.