Démission en bloc de journalistes politiques russes du journal « Kommersant »
Démission en bloc de journalistes politiques russes du journal « Kommersant »
Le Monde.fr avec AFP
Les démissionnaires protestent contre le renvoi de deux collègues à la suite d’un article sur la présidente du Sénat, faisant craindre un nouveau coup porté à la presse en Russie.
Les journalistes démissionnaires ont indiqué avoir rédigé une lettre de démission en solidarité avec les deux reporters Maxime Ivanov et Ivan Safronov. / ALEXANDER NEMENOV / AFP
Une démission en bloc en signe de protestation. Onze journalistes du service politique de l’influent journal russe Kommersant ont démissionné en bloc, lundi 20 mai, pour protester contre le renvoi de deux collègues à la suite d’un article sur la présidente du Sénat, faisant craindre un nouveau coup porté à la presse en Russie. Maxime Ivanov, membre du service politique du journal, a confirmé l’information, s’abstenant de tout commentaire.
Les démissionnaires ont indiqué avoir rédigé une lettre de démission en solidarité avec les deux reporters Maxime Ivanov et Ivan Safronov. Ivan Safronov, envoyé spécial de Kommersant, a expliqué sur son compte Facebook :
« Nous quittons Kommersant non pas pour convenances personnelles mais après des critiques virulentes de l’actionnaire contre la publication sur une éventuelle démission de Valentina Matvienko », la présidente de la chambre haute du Parlement russe, personnalité russe influente et réputée très proche de Vladimir Poutine.
« L’actionnaire a le droit de prendre une décision sur le personnel, et le personnel n’a qu’un seul droit, celui de partir pour exprimer son désaccord », a réagi de son côté, également sur Facebook, le rédacteur en chef adjoint chargé de la politique, Gleb Tcherkassov, qui fait partie des 11 journalistes démissionnaires.
« Intervention brutale d’actionnaires »
Cette réaction, d’une virulence rare en Russie, a fait craindre un nouvel affaiblissement du journalisme en Russie où les médias ont été repris en main depuis l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine il y a vingt ans. L’Union de journalistes de Russie s’est dite lundi « profondément préoccupée par la situation », dénonçant une « intervention brutale d’actionnaires dans la politique rédactionnelle ».
Kommersant, quotidien autrefois considéré comme un bastion du journalisme, perd de son prestige depuis qu’il a été racheté en 2006 par le milliardaire Alicher Ousmanov. Fin 2011, 35 journalistes de Kommersant avaient déjà accusé M. Ousmanov de chercher à les « intimider », dans une lettre ouverte, après le limogeage de deux des dirigeants de l’édition pour la publication de propos jugés injurieux à l’encontre de Vladimir Poutine, alors premier ministre. Le milliardaire avait alors juré ne pas avoir « l’intention d’interférer dans la politique rédactionnelle » de Kommersant.
« Le journalisme russe perd des professionnels avec une vitesse incroyable », a déploré lundi le site d’informations en ligne Meduza, installé à Riga, capitale de la Lettonie, pour échapper au contrôle des autorités russes.
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