La cathédrale Saint-Antoine, un des lieux de culte attaqué le 21 avril, à Colombo, Sri Lanka, un mois après les faits. / DINUKA LIYANAWATTE / REUTERS

Les kamikazes des attentats de Pâques au Sri Lanka il y a un mois ont recouru à du TATP, un explosif prisé des djihadistes. Cette découverte est un élément crucial dans l’enquête sur une éventuelle implication étrangère dans ces attaques qui ont fait 258 morts et 500 blessés. Les autorités pensent que les djihadistes locaux ont fabriqué eux-mêmes les bombes transportées dans des sacs à dos, mais ont bénéficié dans ce processus de l’expertise de l’organisation Etat islamique (EI), qui a revendiqué le bain de sang, ont indiqué à l’Agence France-Presse (AFP) des sources proches de l’enquête.

Des kamikazes du mouvement islamiste local National Tawheed Jamaath (NTJ) ont causé un carnage dimanche 21 avril en frappant des hôtels de luxe et des églises chrétiennes en pleine messe de Pâques. Les enquêteurs croyaient initialement que les assaillants avaient recouru à du C4, explosif de prédilection de la guérilla tamoule pendant la guerre civile, mais les tests ont révélé qu’ils avaient utilisé du TATP, aussi connu sous le nom de peroxyde d’acétone.

Quatre-vingt-neuf suspects en détention

Cet explosif, qui cause davantage de brûlures que le C4, est l’explosif favori de l’EI et surnommé par ses combattants « la mère de Satan ». Le TATP a été utilisé par exemple dans les attentats de Paris en 2015, à Manchester en 2017 et contre des églises en Indonésie l’année dernière. « Le groupe avait un accès facile à des produits chimiques et engrais pour obtenir les matières premières nécessaires à la fabrication de TATP », a déclaré à l’AFP une source proche de l’enquête.

Mais les enquêteurs estiment qu’il leur a fallu un contact direct avec l’EI pour parvenir à fabriquer leurs bombes, le TATP nécessitant une certaine expertise. « Ils ont dû avoir une rencontre en face-à-face pour transférer cette technologie. Ce n’est pas quelque chose que vous pouvez fabriquer en regardant une vidéo YouTube », a ajouté cette source. La police a également confirmé que les 100 kg d’explosifs saisis en janvier dans une cache dans le nord-ouest de l’île étaient également du TATP. Colombo passe au peigne fin les voyages des kamikazes et de suspects étrangers pour tenter de déterminer où et quand le commando a pu être formé à la fabrication de cet explosif.

« Il semble qu’ils aient utilisé un mélange de TATP et plastic et de produits chimiques dans les attentats de Pâques. Il leur manquait les 100 kg de TATP brut qui avaient été saisis en janvier », a déclaré la source proche de l’enquête. Les forces de sécurité sri-lankaises ont procédé à une série de raids depuis les attentats-suicides. Quatre-vingt-neuf suspects sont actuellement en détention, a indiqué dimanche le porte-parole de la police, Ruwan Gunasekera.

Assistance internationale

Le chef de l’armée, Mahesh Senanayake, a déclaré la semaine dernière qu’au moins deux suspects ont été arrêtés au Qatar et en Arabie saoudite, signe du caractère international de ces attentats. Cinq jours après les attaques de Pâques, six djihadistes, trois veuves de kamikazes et six de leurs enfants ont péri lors d’une opération policière contre une cache du NTJ dans la ville de Kalmunai, sur la côte orientale du Sri Lanka. La police y a découvert de grandes quantités de produits chimiques et engrais, probablement destinés à fabriquer des bombes, selon les autorités.

L’Etat sri-lankais a été visé par des critiques virulentes pour n’avoir pas su empêcher ces attentats, alors qu’il disposait d’informations préalables spécifiques émanant des services de renseignements indiens. Huit pays au total aident l’île dans son enquête. Une équipe du FBI américain se trouve au Sri Lanka, tandis que la Grande-Bretagne, l’Australie et l’Inde ont apporté leur expertise et fourni un soutien technique. La Chine a offert des véhicules pour renforcer la mobilité des forces de sécurité dans leur chasse à l’homme.

Attentats au Sri Lanka : le résumé des événements
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