Roland-Garros : l’effet domino du tableau féminin
Roland-Garros : l’effet domino du tableau féminin
Par Clément Martel
Les quarts de finale de Roland-Garros débutent mardi, et dans le tableau féminin décimé de ses têtes de série, la tenante du titre, la Roumaine Simona Halep, est l’une des rares survivantes.
Rare tête de série encore en lice, Simona Halep est favorite pour défendre son trophée. / KENZO TRIBOUILLARD / AFP
Même Game of Thrones paraît plus précautionneux avec ses héros. Depuis le début de l’édition 2019 du tournoi de Roland-Garros, le tableau féminin se dépeuple plus rapidement qu’un épisode de la série de HBO. Chaque jour, une nouvelle tête (de série) tombe, au point que l’on en vienne à se demander s’il est judicieux de désigner une favorite au trophée, alors que les quarts de finale débutent mardi 4 juin.
Angelique Kerber (tête de série n° 5) a été le premier domino à tomber, quelques heures à peine après le coup d’envoi officiel du tournoi. Et l’Allemande a rapidement été rejointe – dans le désordre – par la Néerlandaise Kiki Bertens et la Tchèque Karolina Pliskova, deux sérieuses prétendantes au titre au vu de leur saison sur terre. Avant les tremblements de terre (battue) de la journée de samedi, ayant vu les éliminations coup sur coup de la Japonaise Naomi Osaka (n° 1 mondiale) et de l’Américaine Serena Williams au troisième tour.
Résultat, seules trois des dix premières têtes de séries ont franchi la première semaine : la Roumaine Simona Halep, l’Américaine Sloane Stephens et l’Australienne Ashleigh Barty. Un constat qui grésille, d’autant que le tableau masculin a été reçu dix sur dix - une première depuis 1970 dans un tournoi du Grand Chelem - à ce stade.
Les adolescentes déboulent
Cette hécatombe n’est pas, à proprement parler, une surprise. « C’est tellement ouvert cette année qu’[une favorite] est très difficile à trouver », estimait la quadruple vainqueure du tournoi, Justine Hénin, avant le tournoi, anticipant « beaucoup de concurrence. » « Aucune joueuse ne se démarque vraiment des autres sur le circuit de terre battue, et tout le monde se dit “je peux y arriver” et peut avoir des opportunités cette année. »
Tout le monde, à l’image de l’adolescente américaine Amanda Anisimova, 17 ans, première joueuse née dans les années 2000 à se qualifier pour les quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem. Comme elle, sa compatriote Sofia Kenin – 20 ans, et tombeuse de Serena Williams – ou la Polonaise Iga Swiatek – 18 ans – ont déboulé dans le tableau. Et envoyé valsé quelques totems.
Après des années de régence, où les numéros 1 mondiales valsaient avec la régularité d’un coucou suisse, le circuit féminin pensait avoir trouvé sa nouvelle reine. Première joueuse à remporter deux tournois du Grand Chelem d’affilée (l’US Open puis l’Open d’Australie), Naomi Osaka assumait son statut.
Las, obnubilée par le Grand Chelem calendaire (victoire de tous les Majeurs la même année), la Japonaise en a oublié de jouer. « J’étais tendue, tout le temps, a admis la joueuse après sa défaite contre Siniakova. J’avais le sentiment de porter un poids. »
L’importance d’être constantes
« On voudrait un peu plus de constance de la part des joueuses, analysait Justine Hénin avant la compétition. Cela permettrait d’identifier les meilleures et de mettre en scène de belles rivalités. » Une fois encore, ce ne sera pas pour cette année, où le tableau est plus ouvert que jamais. Mais n’allez pas parler de « montagnes russes » à Naomi Osaka et lui dire que tout le monde semble en mesure de l’emporter. « Ça donne l’impression qu’il n’y a aucune régularité ! »
Et pourtant, à la différence du tableau masculin, où les positions sont claires, et les premiers du classement ont creusé le trou avec les joueurs les suivant, aucune aristocratie ne se détache chez les femmes. A l’image de la Lettone Jelena Ostapenko, vainqueure surprise de Roland-Garros en 2017, celles qui ont brillé peuvent être redescendues dans les tréfonds du classement, offrant au tableau du tournoi d’impressionnantes rencontres dès les premiers tours.
« C’est complètement absurde », s’est amusée la finaliste de l’an passé, Sloane Stephens avant sa rencontre, en huitièmes de finale, contre l’Espagnole Garbine Muguruza, vainqueure en 2016. « Je ne comprends rien au fonctionnement des têtes de séries. De toute façon, les tableaux sont faits pour s’effondrer. » Pour le moment, celle qui affronte la Britannique Johanna Konta en quarts mardi demeure debout, et est l’une des rares favorites encore en lice.
Quatre des huit quart-de-finalistes sont des néophytes à ce stade en Grand Chelem. La Tchèque Marketa Vondrousova (38e mondiale), la Croate Petra Martic (n° 31), Johanna Konta (n° 26) et la très jeune Amanda Anisimova (51e) découvrent le grand huit.
Opposée à cette dernière, la tenante du titre, Simona Halep (n° 3 mondiale) semble avoir une voie royale pour défendre son trophée. « Les deux ou trois premiers matchs sont toujours plus difficiles dans un Grand Chelem, souligne la Roumaine, qui monte en puissance, et si vous passez, vous vous sentez mieux. »
Reste qu’avec un mois d’avance sur le tour de France, l’expression « chute à l’avant » pourrait encore se faire entendre dans le tableau féminin.