Lors de la manifestation à Paris contre les féminicides le 6 juillet. / MARTIN BUREAU / AFP

« Je vous demande 74 secondes de bruit », lance la comédienne Muriel Robin. Plus d’une minute de cri, de colère et d’indignation pour rendre hommage aux 74 femmes, recensées depuis le début de l’année, assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint. Samedi 6 juillet, les collectifs Osez le Féminisme, Nous Toutes ou encore la Fondation pour les Femmes ont réuni des centaines de personnes venues manifester contre les violences faites aux femmes.

Jeudi 4 juillet, un collectif féministe publiait dans Le Monde une tribune exhortant Emmanuel Macron à prendre « cinq mesures immédiates » pour mieux protéger ces femmes. Devant la foule réunie place de la République, à Paris, la militante féministe Caroline De Haas, membre du collectif Nous Toutes, appelle à prendre des mesures d’urgence : prise et traitement systématique des plaintes, augmentation d’ordonnances de protection délivrées dans chaque département (1300 par an actuellement contre plus de 20 000 en Espagne), ouverture de 200 places d’hébergement supplémentaires et généralisation du bracelet électronique anti-rapprochement.

Anne Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des Femmes somme, elle aussi, d’agir face à ce massacre : «  Les femmes sont en danger, c’est une évidence. Quand on creuse chaque dossier, on se rend compte que de nombreuses plaintes ne sont pas prises en compte. Nous demandons aux ministres et aux syndicats un Grenelle des violences faites aux femmes. Il faut une prise de parole forte du gouvernement. Sortons de ce massacre silencieux. »

« Couillocratie » et « terrorisme patriarcal »

Dans l’assemblée, des femmes en colère portent des couronnes de fleurs, lèvent le poing et brandissent des banderoles aux formules percutantes : « Couillocratie », « le féminisme ne tue personne, le machisme tue tous les deux jours » ou encore « les féminicides c’est plus d’un bataclan par an ». « Les chiffres sont là : il y a plus de femmes battues qui meurent sous les coups de leurs conjoints ou ex que de victimes du terrorisme », lance Cécile Loliveret, ancienne femme battue et ancienne proche de Julie Douib, victime en mars d’un féminicide. La jeune femme avait porté plainte six fois avant d’être assassinée.

Elles hurlent. Les hommes aussi. Noël Agossa, porte-parole du collectif « Plus jamais ça » a rejoint la cause depuis le meurtre de sa nièce. Il exhorte à son tour le gouvernement à protéger les femmes : « Les dysfonctionnements sont multiples. À toutes les étapes du parcours, on apprend qu’elles auraient pu être sauvées. “Protégez-les”, ce n’est pas seulement un slogan. C’est un mot d’ordre. Les lois existent, mais qui les appliquent ? Combien faudra-t-il de meurtres, d’orphelins et de marches blanches pour enfin prendre conscience de la gravité des problèmes ? Je demande solennellement au président Emmanuel Macron qu’il soit le premier homme politique français à mettre fin à ce massacre. »

Selon le ministère de l’intérieur, 130 ont été assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint en France en 2017, contre 123 en 2016. Face à ce nombre croissant, la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, a assuré que le gouvernement « mettrait tout en oeuvre pour que ces chiffres baissent ».

Venantia Petillault