• György Ligeti
    Bagatelles. Kammerkonzert. Dix Pièces
    Les Siècles, François-Xavier Roth (direction)

Pochette de l’album Ligeti par l'ensemble Les Siècles. | MUSICALES ACTES SUD/HARMONIA MUNDI

Articulé autour d’un Kammerkonzert, qui impressionne toujours autant près d’un demi-siècle après sa création, ce superbe portrait du « premier » Ligeti (années 1950 et 1960) est servi par une interprétation sobre et fidèle, qui ne tend pas vers la démonstration moderniste. Toutefois, restituée avec l’ambivalence caractéristique du compositeur, chaque œuvre apparaît comme une pièce maîtresse de son époque et György Ligeti (1923-2006) comme l’une des principales références de son temps. Partition vertigineuse par son ouverture sur l’infini (apesanteur) et sur l’infinitésimal (micro-intervalles), le Kammerkonzert est encadré par deux célèbres cycles pour quintette à vent : six Bagatelles et dix Pièces que l’ensemble Les Siècles livre comme autant de concentrés de « ligetisme », doses d’arsenic fourrées dans des bonbons acidulés. Pierre Gervasoni

1 CD Musicales Actes Sud/Harmonia Mundi.

  • Igor Stravinsky
    Threni. Requiem Canticles. Anthem. Da Pacem Domine
    Collegium Vocale Gent, Orchestre philharmonique royal des Flandres, Philippe Herreweghe (direction)

Pochette de l’album « Igor StravinskyThreni. Requiem Canticles. Anthem. Da Pacem Domine ».

Grand interprète d’Igor Stravinski (1882-1971), Philippe Herreweghe ? Oui, et pour longtemps. Après la réussite d’un premier disque paru en 2010 (chez Pentatone), le chef belge et son Collegium Vocale Gent nous emmènent à la découverte des dernières œuvres sérielles de l’auteur du Sacre du printemps. Des pièces sacrées Comme Threni (vaste fresque dodécaphonique) et Requiem Canticles (dernier chef-d’œuvre quasi testamentaire), qui témoignent de l’obsession spirituelle du compositeur à la fin de sa vie. Une fois encore, la qualité du chœur est impressionnante : homogénéité, projection et surtout un luxe et une variété de couleurs quasi infinis. La direction rigoureuse et précise de Philippe Herreweghe à la tête de la Philharmonie royale des Flandres, son souci des masses et des équilibres, son expressivité et son engagement, livrent une lecture à la fois profonde et poétique du legs stravinskien et de son interrogation mystique au seuil de la mort. Marie-Aude Roux

1 CD PHI/Outhere Music.

  • Guillaume Perret
    Free

Pochette de l’album « Free », de Guillaume Perret. | KAKOUM RECORDS/HARMONIA MUNDI

Dans les notes imprimées sur la pochette intérieure de son album en solo Free, le saxophoniste Guillaume Perret précise que la musique enregistrée l’a été sans ajouts d’effets en postproduction, provenant de l’utilisation de son saxophone muni d’un appareillage de micros et capteurs et du recours à des pédales, déclencheurs de boucles musicales, etc. L’on va ainsi du son pur du saxophone à des sonorités de percussions, de cordes (comme un violon, une guitare électrique), d’autres vents. En référence ludique au jazz par endroits (En Good, fanfare chaloupante, She’s Got Rhythm, évident clin d’œil à l’Ellington des années 1920-1930), en voyage vers l’Orient (Walk, Inside Song, Pilgrim), dans des atmosphères qui évoquent la nature (Seduction, Cosmonaut), en ancrage dans le rock ou l’électro (Heavy Dance, en version studio et lors d’un concert, Inner Jail). Le tout sans que se fasse sentir l’envie d’une démonstration technicienne et virtuose. Avec un art de la conception de l’album, manifestement pensé comme un tout, ce très réussi Free emporte l’auditeur par la qualité de ses compositions, des contrastes, des ambiances, la diversité de ses approches de bout en bout parfaitement musiciennes. Sylvain Siclier

1 CD Kakoum Records/Harmonia Mundi. Sur le Web : guillaume-perret.fr

  • Fleetwood Mac
    Mirage

Pochette de l’album « Mirage », de Fleetwood Mac, réédité en coffret. | WARNER MUSIC

Des différentes formations du groupe Fleetwood Mac, fondé à Londres par le guitariste Peter Green, le batteur Mick Fleetwood et le bassiste John McVie en 1967, c’est le quintette anglo américain au succès international à partir du milieu des années 1970 qui est le plus connu. Outre Fleetwood et McVie, il comprend la claviériste et chanteuse Christine McVie, le guitariste et chanteur Lindsey Buckingham et la chanteuse Stevie Nicks. Lesquels ont enchaîné un triplé impeccable dans le genre pop-rock-folk, les albums Fleetwood Mac (1975), Rumours (1977) et Tusk (1979). Suivit, en juin 1982, Mirage, certes moins brillant, mais avec toujours en points forts les alliances vocales, une clarté mélodique, une simplicité de surface, des arrangements à la sophistication discrète. Comme ses trois prédécesseurs, Mirage est dorénavant réédité sous forme d’un coffret avec, outre une remasterisation de l’album, son mixage original stéréo et en version 5.1, un CD d’inédits et de versions différentes et un document de concert. Pour (re) découvrir notamment Love in Store, Gypsy, Hold Me, Can’t Go Back, Eyes of the World ou Wish You Were Here. S. Si.

1 coffret de 3 CD, 1 DVD et 1 vinyle 33-tours Warner Bros./Warner Music.

  • Baba Zula
    Do Not Obey

Pochette de l’album « Do Not Obey », de Baba Zula. | MILAN/UNIVERSAL

Drôles de zèbres et de gazelles que cette bande mixte d’énergumènes vêtus à la « bab’comme j’te pousse » (tissus chamarrés, turbans et babouches…). Depuis vingt ans, ils bousculent avec humour et poil à gratter la bande-son d’Istanbul avec leur « Turkish psychedelic music ». Une mixture qui brasse sonorités électriques et électro, scansion façon hip-hop bancal, instruments traditionnels du cru – luth saz, tambour davul…) et mélodies orientales. Le titre de ce huitième album, Do Not Obey (ne pas obéir), enregistré avant le coup d’Etat raté de juillet 2016, prend évidemment une résonance toute particulière en ces temps agités sur les rives du Bosphore. Drôles et engagés, les Baba Zula rêvent d’un autre monde. Ils incarnent le bouillonnement musical éclectique d’Istanbul que montrait déjà le réalisateur Fatih Akin avec son documentaire Crossing the Bridge (2005). Baba Zula y figurait naturellement au générique. Patrick Labesse

1 CD Milan/Universal. Sur le Web : www.babazula.com