Maison connectée : le pari des sociétés françaises
Maison connectée : le pari des sociétés françaises
LE MONDE ECONOMIE
Start-up et grands groupes hexagonaux s’allient pour s’imposer sur un marché évalué à 45 milliards d’euros.
François Fillon, candidat à la présidentielle (LR), jeudi 5 janvier, au CES. | Gene Blevins/ZUMA/REA
La maison connectée est encore à l’honneur cette année au CES (Consumer Electronics Show), le salon de l’électronique grand public qui se tient à Las Vegas jusqu’au 8 janvier. Toutefois, dans l’espace qui lui est réservé dans le Sands Expo, les enseignes qui s’affichent ne sont plus les mêmes. On y croise désormais des industriels réputés comme le géant des réseaux électriques Legrand (5 milliards d’euros de chiffre d’affaires), qui pour la première année dispose d’un stand en son nom propre. Imposant, idéalement placé à l’entrée du Hall C, il met en valeur la nouvelle collaboration nouée, et révélée à cette occasion, avec Netatmo, une entreprise française spécialisée dans les objets connectés.
A la clé, une nouvelle gamme de produits pilotables depuis son smartphone, permettant de gérer ses équipements électriques et d’être alerté en cas de dysfonctionnement. Sur les 80 familles de produits que compte Legrand, 20 sont déjà connectées, elles seront bientôt 40, avec l’objectif de réaliser une croissance à deux chiffres sur ce périmètre (+23 % en 2015, pour 300 millions de chiffre d’affaires). Pour Netatmo, c’est évidemment une immense opportunité que de pouvoir s’associer à un tel partenaire, qui bénéficie d’un accès privilégié aux domiciles. Les deux sociétés ont collaboré dans la conception industrielle des produits, mais Legrand a en outre pris une part minoritaire au capital de Netatmo. A l’occasion du CES, la start-up a également annoncé un partenariat avec le danois Velux, autre acteur important du bâtiment.
Hub numérique
Pour MyFox, les choses sont encore allées plus loin : il y a à peine plus de deux mois, l’entreprise toulousaine, qui a bâti son succès sur les caméras connectées, a été rachetée par Somfy, groupe savoyard, champion mondial de l’automatisation des ouvertures et des fermetures de la maison et du bâtiment. C’est donc sous les couleurs de Somfy – qui vient également de racheter le français Okidokeys, désormais baptisé Open Doors, producteur basque de serrures connectées – que MyFox a présenté sa nouvelle caméra connectée, la Somfy One. Comme l’explique Jean-Marc Prunet, désormais directeur de la sécurité connectée chez Somfy, « on assiste à un mouvement de consolidation ». « On se parle de plus en plus avec ceux qui assurent les réseaux, ceux qui assurent la distribution, voire ceux qui assurent la construction », dit-il en évoquant « des projets avec Bouygues immobilier ». Une accélération des choses qui fait que « la barrière à l’entrée sur ce secteur s’élève ».
La consolidation passe également par des propositions qui facilitent la vie des consommateurs, qui ne souhaitent pas avoir une application distincte pour chaque objet connecté de la maison. Egalement présent au CES, Leroy-Merlin a annoncé le lancement en mars 2017 de l’application Enki, qui promet de gérer déjà les produits de 15 marques (en attendant d’autres partenaires), et de créer des scénarios d’actions combinées. De la même manière, La Poste était une nouvelle fois présente à Las Vegas pour soutenir son hub numérique présenté en 2015, soutenu par le programme French IoT (Internet of Things, pour Internet des objets), auquel prennent part des entreprises comme Legrand. L’application permet de gérer toute une série d’objets connectés, dont ceux liés à la domotique. De son côté, Withings, autre pépite française, a présenté Home Plus, une nouvelle version de sa caméra de surveillance connectée, désormais compatible avec Home Kit, l’application d’Apple consacrée à la maison connectée… une autre manière de s’ouvrir au plus grand nombre de clients.
Gestion d’immeubles et de la ville
Tandis que se confirme l’intérêt des grands groupes pour la maison connectée, se dessine parallèlement une étape d’ampleur plus grande encore : la duplication de ces technologies à la gestion des immeubles et au-delà à la ville. En témoigne la présence d’Engie au CES pour la deuxième année consécutive, qui a emmené avec lui plusieurs partenaires (comme Leroy Merlin) ou des start-up intéressées par la maison connectée. Ainsi Frizbiz propose des services de proximité pour faciliter l’installation à domicile d’objets connectés.
De son côté, Connit a proposé ses services à 15 000 et bientôt 30 000 foyers dans le pays de Gex dans l’Ain, pour valoriser le service rendu par les compteurs d’eau connectés (prévenir les dépassements de consommation ou les possibles fuites). Il a aussi développé une solution pour prévenir les cas de légionellose en s’assurant du maintien des canalisations d’eau à la bonne température pour combattre la bactérie. Engie teste également un dispositif d’objets connectés dans les écoles de Paris pour réduire la consommation d’énergie en régulant le chauffage en fonction de la fréquentation de chaque salle de classe, avec des réductions de coût de 20 % à 25 %.
Gestionnaire d’immeubles au sein desquels il propose de garantir la performance énergétique, mais également interlocuteur régulier des collectivités locales, Engie assoit ainsi progressivement son expertise dans les objets connectés en multipliant les partenariats avec des start-up présentes sur le secteur, pour proposer un service toujours plus étendu.
En 2015, le marché de la maison connectée a généré 46,97 milliards de dollars de chiffre d’affaires (44,59 milliards d’euros) à travers le monde et devrait atteindre 121 milliards de dollars en 2022, selon des chiffres de Marketsandmarkets et de Statista.