Sélection galeries : Hassan Musa et Iris Levasseur
Sélection galeries : Hassan Musa et Iris Levasseur
Par Philippe Dagen
Les deux artistes exposent à Paris, l’un chez Maïa Muller, l’autre chez Odile Ouizeman.
- Hassan Musa
Galerie Maïa Muller
Hassan Musa est un habitué des bazars, rayon tissus imprimés pour nappes ou draps. Il y découvre des motifs de toutes sortes, papillons ou « big mac ». Il les découpe, les hybride, les coud, y introduit des motifs par la peinture et des inscriptions écrites. Il obtient des compositions dont l’œil perçoit d’abord la somptuosité des couleurs avant d’entrer dans le détail des mots, desfigures et des symboles. Il s’aperçoit alors que ces draperieschamarrées sont tissées de dérision et d’humour noir et que les allusions aux mythes antiques ou bibliques sont cruelles. Le corps d’Ophelia flotte au large de Lampedusa. Leda est – littéralement – la poule d’un cygne. Suzanne est l’allégorie de l’Afrique que les occidentaux épient pour lui prendre ses secrets. Ils se nomment Kipling, Picasso, Griaule ou Magnin. Quant à Icare, c’est un jeune émigré camerounais qui se tue en tombant de l’avion dans lequel il s’était caché pour gagner l’Europe. L’art avec lequel Musa brode ses satires politiques fait de lui l’un des créateurs les plus intéressants d’aujourd’hui.
« Suzanne et les vieillards », d’Hassan Musa, encre sur textile. / GALERIE MAÏA MULLER
« Nage Icare », Galerie Maïa Muller, 19, rue Chapon, Paris 3e. Tél. : 09-83-56-66-60. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 7 octobre. www.maiamuller.com
- Iris Levasseur
Galerie Odile Ouizeman
Depuis plusieurs années, dans de grandes œuvres sur papier, Iris Levasseur tient la chronique de son quotidien, qui est aussi le nôtre. Ce principe l’a conduite vers une question difficile : que faire, avec des crayons et des couleurs, pour dire l’horreur de la destruction en Irak et Syrie ? De longue date attentive aux arts anciens de la Mésopotamie, elle les fait réapparaître par fragments, alors qu’ils sont menacés par destructions et pillages. Parmi ces fantômes, elle glisse des allégories animales de la souffrance, chat et hyène mutilés, et des oiseaux, qui sont à peu près les seules créatures dont les migrations ne soient pas encore interdites à travers la Méditerranée. Elle prend le parti de la sobriété et du refus du pathos. Ce qui l’expose au risque de l’incompréhension mais est de loin préférable à l’exhibitionnisme opportuniste de certains artistes que l’on voit dans les biennales.
« Comme si j’étais éternelle », Galerie Odile Ouizeman, 10-12, rue des Coutures-Saint-Gervais, Paris 3e. Tél. : 01-42-71-91-89. Du mardi au vendredi de 14 heures à 19 heures, samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 28 octobre. www.galerieouizeman.com