Yézidis, Amazon et un marathonien oublié : trois documentaires en replay
Yézidis, Amazon et un marathonien oublié : trois documentaires en replay
Chaque samedi, La Matinale du Monde vous propose une sélection d’émissions à regarder en différé.
LES CHOIX DE LA MATINALE
Restons sérieux ce week-end, avec trois documentaires de qualité visibles pendant encore plusieurs mois sur Arte.tv.
Une voix pour les persécutées
LE COMBAT DE NADIA MURAD + DR MUKWEGE VF
Durée : 00:31
Le 9 août 2014, l’ancien président américain Barack Obama accuse l’organisation Etat islamique (EI) de viser la destruction systématique des yézidis. Le groupe djihadiste vient de prendre Sinjar, dans le nord-ouest de l’Irak, l’un des fiefs de ce peuple de bergers et d’agriculteurs, attaché à ses traditions et à ses croyances ancestrales, héritage de l’antique civilisation de la Mésopotamie.
Des dizaines de milliers de yézidis fuient. Malgré les frappes aériennes américaines, des centaines de civils sont massacrés par les terroristes, des centaines de femmes sont enlevées, battues, violées et réduites à l’esclavage sexuel.
Parmi elles, Nadia Murad, 21 ans au moment des faits. Sous ses yeux, dix-huit membres de sa famille sont tués ou faits prisonniers. Humiliée, avilie, insultée, violée, torturée, elle passera entre les mains de treize différents « propriétaires ». Après avoir réussi à s’enfuir, elle parvient à gagner le Kurdistan irakien, puis en septembre 2015, l’Allemagne, où une organisation d’aide aux yézidis lui permet de retrouver sa sœur.
Nadia Murad jure alors de témoigner du sort des milliers de jeunes filles encore aux mains de l’EI. C’est cette campagne médiatique, politique et diplomatique menée pendant plusieurs mois entre Berlin, Athènes, Ottawa et New York que raconte le film d’Alexandria Bombach, sorti début 2018 – donc avant que Nadia Murad reçoive le prix Nobel de la paix cette année, partagé avec le docteur Denis Mukwege. Antoine Flandrin
« Le combat de Nadia Murad », d’Alexandria Bombach (Etats-Unis, 2018, 95 minutes). Disponible sur Arte.tv jusqu’au 8 mars 2019.
Un géant encore affamé
Un entrepôt d’Amazon en Allemagne. / RBB / PUMPERNICKEL FILMS
Anything. Anywhere. Anytime. Ou, en français sous-titré : « Tout. Partout. Tout le temps. » Telle est la promesse faite par Amazon et son PDG, Jeff Bezos. Pourtant, bien malin celle ou celui qui aurait pu croire que, en lâchant Wall Street en 1994 pour s’enfermer dans un pavillon de la banlieue de Seattle (Etat de Washington), ce dernier allait donner naissance à un monstre tentaculaire à l’appétit gigantesque et au pouvoir sans égal ou presque.
Dès 1997, Jeff Bezos avait prévenu : Amazon serait l’entreprise « la plus centrée sur ses clients ». Et peu importe si les employés sont tracés.
A voir circuler ces fourmis dans ces gigantesques entrepôts comme il en existe tant, il n’est pas difficile de comprendre que les conditions de travail ne sont certes pas insoutenables, mais si loin d’être humaines.
N’oublions pas qu’en plus de ses différents rachats (dont le prestigieux quotidien Washington Post), de sa position de monopole, Amazon est certainement le plus grand capteur de nos données personnelles, maîtrisant nos profils, analysant nos comportements, prévoyant ce qu’il nous faudrait pour être pleinement heureux. Ce n’est pas pour rien qu’Amazon Web Services (fournisseur de services Cloud) compte parmi ses clients la CIA. Et que le Pentagone songe à en tirer parti, notamment pour fournir à ses soldats des informations en temps réel.
Rien d’impossible non plus pour l’insatiable Jeff Bezos, lequel, par le biais de Blue Origin, veut développer le tourisme spatial et rêve de coloniser la Lune (y déplacer une part de nos industries permettrait de sauver la Terre, selon lui). Emilie Grangeray
« L’Irrésistible ascension d’Amazon », de David Carr-Brown (Allemagne, 2018, 88 minutes). Disponible sur Arte.tv jusqu’au 17 décembre.
Le marathonien oublié
El ouafi Bouguera, le marathonien de l'Histoire - Un champion oublié | ARTE
Durée : 06:01
Qui aurait misé quelques francs sur cet inconnu ? Le 5 août 1928, aux Jeux olympiques d’Amsterdam, Ahmed Boughera El-Ouafi, 29 ans, est loin d’être le favori du marathon. Les suiveurs de l’athlétisme se sont bien trompés… Ce petit Français d’Algérie, discret et paisible, dossard numéro 71, gère sa course et réussit à doubler tous ses adversaires pour passer la ligne d’arrivée en tête, en 2 h 32’ 57’’.
Vingt-huit ans après Michel Théato, El-Ouafi devient le deuxième marathonien à triompher à des Jeux et le troisième champion olympique de l’histoire de l’athlétisme tricolore… L’ouvrier de Renault à Boulogne-Billancourt change de dimension, mais sa médaille d’or va lui porter malchance.
Après sa victoire, un Américain lui propose de courir pour lui. Et voilà Boughera El-Ouafi en Amérique où il affronte des… animaux. De retour en France, il est exclu de la Fédération française d’athlétisme pour professionnalisme. En effet, à cette époque, les sportifs olympiques n’ont pas le droit de toucher de l’argent quand ils exercent leur discipline. Cruelle décision qui va plonger le marathonien dans une extrême précarité.
Le 18 octobre 1959, trois jours après son anniversaire, Boughera El-Ouafi meurt à 61 ans dans une fusillade dans un bar de Saint-Denis, peut-être causée par des membres du FLN algérien. Il a été le premier athlète tricolore médaillé d’or olympique provenant du continent africain. Malgré cette performance, il a été effacé des mémoires du sport français.
C’est à ce marathonien méconnu qu’Arte.tv consacre un web-documentaire en quatre épisodes qui raconte l’itinéraire tragique de cet homme à travers des images d’archives, des dessins et une voix off lyrique. Mustapha Kessous
« El-Ouafi Boughera, le marathonien de l’histoire », d’Olivia Laurin (France, 2018, 4 × 7 minutes). Disponible sur Arte.tv jusqu’au 31 mars 2019 et sur YouTube.