brar_j / Flickr ©2.0

Ah, ah, ah. XXX. Lol.  Clap, clap, clap. J’en peux plus ! Vous imaginez la correspondance entre Elsa Triolet et Aragon – « Je te reproche de vivre depuis trente-cinq ans comme si tu avais à ­courir pour éteindre un feu. Elsa » – accompagnée d’un gif de la Reine des neiges ? C’est quoi, cette manie ? S’agit-il de manifester son contentement, tel un chien qui remue la queue ?

J’avoue : il m’est arrivé de ­céder à la tentation ­d’envoyer par SMS une aubergine à un confrère concupiscent, ou un nœud coulant à mon boss pour qu’il comprenne que là, ben non. Mais l’emoji, c’est comme le quadra qui ponctue toutes ses phrases par « chanmé », ou le trentenaire qui te salue d’un « ouaich ma gueule ». Aussi, me suis-je longuement interrogée sur ces trois « X » au bas du parchemin. Et puis un jour, tel Maître Gims assis sur Ophélie Winter, Dieu ne m’a pas donné la foi mais j’ai vu la ­ lumière : bah, c’est un cœur, ma petite licorne. Et non le signe d’une origine honteuse (née « sous XXX ») ou un symptôme d’illettrisme ­(signé Rojé… et puis, merde : XXX).

Sans ces acronymes et onomatopées, serions-nous, petite humanité ­accablée, incapables de saisir le second degré (« Dis donc, ton mouflet sur Facebook, c’est un pic. Clap, clap. C’est un cap. 😉 Que dis-je ? C’est une péninsule ! XXX ») ? Au mieux, ça peut éviter un malentendu (« J’ai perdu ton fils au supermarché – verre de champ’, lunettes de soleil, danseuse de flamenco. »)  Et, surtout, ça permet de faire passer la pilule : « Salut Nat, t’es virée – clin d’oeil, médoc, flingue. »