A neuf mois de la fin de son mandat, le président américain, Barack Obama, effectue, dimanche 24 et lundi 25 avril, sa cinquième et vraisemblablement dernière visite officielle en Allemagne. Certes, par bien des aspects, sa présidence a déçu les Allemands. Ceux-ci lui en voudront longtemps d’avoir laissé la NSA écouter le portable de leur chancelière, Angela Merkel. Malgré tout, l’Allemagne qui, sur le plan diplomatique, souffre toujours d’un complexe d’infériorité vis-à-vis de Londres et de Paris, n’est pas peu fière d’avoir été capable de convaincre le président américain de procéder à un exercice inhabituel pour l’hôte de la Maison blanche : inaugurer la foire de Hanovre, grand messe dédiée au culte du « made in Germany ».

Qu’Angela Merkel ait réussi à organiser, lundi 25 avril, un « G5 » improvisé en invitant également à Hanovre le président français François Hollande, le premier ministre britannique David Cameron et le président du conseil italien Matteo Renzi ne fait qu’accroître ce sentiment de fierté nationale. « On sous-estime l’alliance » entre l’Allemagne et les Etats-Unis, note la Frankfurter Allgemeine Zeitung.

« Angela, une amie »

Trois dossiers en témoigneraient. En Afghanistan, l’Allemagne est restée épauler les Américains, alors que Français et Britanniques ont rapidement rapatrié leurs troupes. Lors de la crise ukrainienne, M. Obama a laissé Mme Merkel en première ligne face à Vladimir Poutine et c’est sous l’insistance de la chancelière qu’il a accepté de ne pas livrer d’armes à Kiev. Enfin, les deux dirigeants constituent les défenseurs les plus acharnés du projet de traité transatlantique de libre-échange (TTIP).

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A la veille de son arrivée à Hanovre, M. Obama s’est livré à une véritable offensive de charme. Dans une interview donnée – par écrit – à Bild, samedi, Barack Obama ne tarit pas d’éloges sur « Angela », qu’il considère comme « une amie » et qui incarne à ses yeux « nombre de qualités qu’il admire le plus chez un dirigeant ». Elle est « pragmatique » et le monde a pu voir dans sa gestion de la crise des réfugiés « son attitude courageuse », juge-t-il. De plus, par son histoire personnelle, « elle est une source d’inspiration pour les gens dans le monde entier et pour moi aussi », dit-il.

Faut-il y croire ? Josef Braml, spécialiste des Etats-Unis à la DGAP, la société allemande pour la politique étrangère, un grand think-tank allemand, en doute : « Peu importe en fait la relation personnelle entre les deux dirigeants. Pour Obama, ce qui compte, plus que tout le reste, c’est l’attitude du Congrès sur sa politique étrangère ».

Néanmoins, Berlin n’est pas insensible à l’attention que lui prête Washington. « Les relations diplomatiques entre l’Allemagne et les Etats-unis n’ont sans doute jamais été aussi bonnes depuis quarante ans », affirme un collaborateur de Frank-Walter Steinmeier, le ministre des affaires étrangères allemand, qui, de son côté, ne tarit pas d’éloge sur son homologue américain, John Kerry.

Pas de déclaration finale

Pourtant, à Hanovre, les échanges risquent de ne pas être toujours faciles. Ceux-ci sont d’ailleurs qualifiés d’« informels » et ne donneront lieu à aucune déclaration finale. Angela Merkel et Barack Obama vont certes essayer de relancer les négociations transatlantiques sur le TTIP. Mais il y a fort peu de chances que celles-ci aboutissent avant la fin de la présidence de M. Obama.

De plus, les Allemands sont de plus en plus sceptiques. Samedi, ils étaient entre 25 000 et 50 000 à manifester à Hanovre contre le TTIP. Selon une étude de la fondation Bertelsmann, moins de 20 % des Allemands jugent que ce traité est une bonne chose.

Et à l’approche de la présidentielle en France, François Hollande juge urgent... de prendre son temps. L’Elysée a fait savoir, jeudi, qu’il n’était pas question d’évoquer le sujet au cours du G5, contrairement à ce que souhaitaient Angela Merkel et Barack Obama.

A Hanovre, on devrait donc parler de la Syrie, de la Libye, de la lutte contre le terrorisme, de la crise des réfugiés et de l’attitude à adopter face à Moscou. Mais, là aussi, entre un Matteo Renzi, favorable à un allègement des sanctions, et un Barack Obama, qui reste sur une ligne dure face à Vladimir Poutine, le consensus n’est pas évident.

Enfin, il semble, d’après le Spiegel, que Barack Obama devrait demander à l’Allemagne de renforcer sa participation au sein des unités de l’OTAN stationnées en Europe de l’Est. Ce sera l’un des thèmes du sommet de l’Alliance de l’Atlantique-Nord, qui se tiendra en juillet à Varsovie. Un sujet extrêmement délicat pour la coalition au pouvoir à Berlin.