Photo prise au Cecos (Centre d’étude et de conservation du sperme humain) de Rennes le 30 novembre. | MARCEL MOCHET / AFP

Le Conseil d’Etat a autorisé, mardi 30 mai, le transfert, en Espagne, du sperme du mari défunt de Mariana Gomez-Turri, en vue d’une insémination post-mortem.

La jeune Espagnole était mariée à un Italien, Nicola Turri, mort en juillet 2015, à l’âge de 30 ans, des suites d’un cancer du système lymphatique. Quand le jeune homme est tombé malade, le couple vivait à Paris. Comme tout patient atteint d’un cancer, il a pu faire congeler ses gamètes avant de commencer une chimiothérapie, qui risquait de le rendre stérile.

Depuis sa mort, Mariana Gomez-Turri se battait pour obtenir l’exportation du sperme de son mari en Espagne, où elle vit désormais, au nom du respect de leur projet de conception d’un enfant et de son droit à décider elle-même de sa vie. Sa demande avait été, dans un premier temps, rejetée par un tribunal administratif.

Décision extraordinaire pour situation exceptionnelle

L’insémination post-mortem est interdite en France mais autorisée en Espagne. Le Conseil d’Etat a estimé que le refus d’exportation est « une atteinte manifestement excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale » et que « l’application de la loi française entraînerait des conséquences manifestement disproportionnées ». Il ordonne de prendre « toutes les mesures nécessaires pour permettre l’exportation des gamètes vers l’Espagne ».

« Il s’agit d’une décision extraordinaire au sens premier du terme qui est tout à fait liée à la situation exceptionnelle » de Mariana Gomez-Turri, a déclaré David Simhon, l’un de ses avocats. « Nous sommes extrêmement satisfaits de cette décision. Nous souhaitons le transfert des gamètes dans les plus brefs délais, dans les meilleures conditions possibles », a-t-il ajouté.

Le 27 mai, Aurélie Bretonneau, rapporteure publique du Conseil d’Etat, avait donné un avis favorable à sa requête, en mettant en avant le caractère unique de sa situation : « Il n’y a pas de volonté de contourner la loi française, avait-elle argumenté. La résidence en Espagne [de Mme Gomez-Turri] est durable. Ni Mme Gomez ni l’enfant n’entretiendront de lien avec la France, car le mari n’était pas français. L’implication des services publics français est faible. »

Il ne s’agissait donc pas, pour la rapporteure, de remettre en question la législation française ni le fait qu’elle s’applique à tous les résidents français, mais d’y faire une exception pour un cas imprévisible au moment où les gamètes ont été congelés.