Cadre permettant de comprendre l’impact du digital sur la ville, la notion de « smart city » « représente la nouvelle utopie urbaine proposée comme une explication globale de différents phénomènes de changement », écrit (en anglais), depuis Bilbao, le chercheur Manu Fernandez.

Un centre commercial désert de la ville nouvelle de Songdo, en Corée du Sud, dans laquelle les gens hésitent à s’installer. Photo personnelle prise en 2014.

Le terme voudrait bien tout dire du futur de nos villes mais, dans la réalité, il n’est parvenu, jusqu’à présent, qu’à entraîner un débat « limité, biaisé incomplet, et précipité ». Une partie de l’explication tient au fait, selon cet auteur, « que la gamme de solutions liées à la smart city sont généralement présentées de façon générique indépendamment des circonstances sociales techniques, politiques, démographiques et culturelles ».

En janvier, déjà, Adam Greenfield, critique acerbe de la ville intelligente, s’en était pris au fait que toutes les villes nouvelles se ressemblent. Ça leur donne un air de modernité qui plaît aux élites et cela vient de ce que ceux qui les dessinent ignorent tout du contexte dans lesquelles elles s’insèrent. Artificiel à l’extrême, le résultat donne des villes qui ont bien du mal à se peupler car personne ne s’y reconnaît.

Les développements partant de réalités locales ne manquent cependant pas.

· Barcelone, utilise une partie de son urbanisme particulier et de son tissu social intense pour réorganiser son centre-ville en « super pâtés de maisons » où la gestion citoyenne est pensable. Cela permettra de réduire la circulation et d’augmenter les espaces publics protégés.

· Le Japon cherche à parier sur la densité urbaine pour mieux satisfaire sa population de plus en plus âgée.

· Au Nigeria, Lagos n’hésite pas à créer une école flottante au milieu d’un bidonville sur pilotis alors même qu’elle attire des milliards de dollars de Dubaï et se dote de son propre Smart City Innovation Hub. Une approche diversifiée qui n’oublie pas ses réalités et invite à se demander si cette ville, de mieux en mieux gérée, ne peut pas « sauver le pays ».

Nous savons depuis un certain temps déjà qu’il n’y a ni définition, ni modèle de ville intelligente qui satisfasse tout le monde (voir mon livre sur ce sujet). Cela nous laisse une immense liberté… Elle s’exercera d’autant mieux qu’elle tiendra compte de cet avertissement de Manu Fernandez : « Il est impossible de continuer à comprendre et à décrire la technologie comme un espace étranger que nous devons assumer comme acquis, et les villes (la société) comme de simples bénéficiaires de cette technologie ».