Forte affluence au référendum sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes
Forte affluence au référendum sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes
Par Rémi Barroux
Le résultat de la consultation locale sur le transfert de l’actuel aéroport nantais vers Notre-Dame-des-Landes sera connu en fin de soirée dimanche 26 juin.
Des votants font la queue à Notre-Dame-des-Landes le 26 juin. | LOIC VENANCE / AFP
À l’heure du match entre la France et l’Irlande, dimanche 26 juin, tout s’est plus ou moins ralenti, en Loire-Atlantique comme dans tout le pays. Mais les électeurs qui doivent se prononcer sur le possible transfert de l’actuel aéroport de Nantes-Atlantique vers Notre-Dame-des-Lande s’étaient apparemment bien mobilisés, avant le début de ce huitième de finale de l’Euro. Dans le bourg de Notre-Dame-des-Landes (2 138 habitants) le taux de participation dépassait les 65 % à 16 heures, un chiffre supérieur aux consultations passées.
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Pour le maire Jean-Paul Naud, 57 ans, hostile à l’arrivée du nouvel aéroport, la mobilisation est forte et le nombre de procurations très important. Dans le département, seul convoqué pour cette consultation, la victoire du « non » au transfert est pour le moins incertaine, tous les sondages ayant donné le camp des partisans du transfert gagnant. « Le périmètre a été choisi par le gouvernement pour que le oui l’emporte », constate le maire de Notre-Dame-des-Landes.
Président du bureau de vote n° 1, qui jouxte sa mairie (le bourg comptant deux bureaux de vote), Jean-Paul Naud n’en espère pas moins la victoire des opposants. « Mais si le non l’emporte, il ne suffit pas que le gouvernement dise qu’il arrête le projet, il faut qu’il abroge la DUP [la déclaration d’utilité publique] de 2008, sinon, le prochain gouvernement, le prochain président de la République pourrait relancer l’ensemble du projet. »
La ZAD, paramètre de l’élection
Dans le couloir qui mène au bureau de vote, la file d’attente s’allongeait en fin de matinée. Au Bar des Landes, sur la place du village, un lieu toujours animé que son patron, Eric Villevalois, a déclaré « zone neutre » afin d’éviter les confrontations entre pro et anti-aéroport, à l’heure de l’apéritif, qui démarre tôt dans la matinée, Jacky Lebastard, électricien de profession, discute des deux matchs, football et aéroports.
« Moi je vote contre le transfert, on n’a pas besoin de ce nouvel aéroport. »
Car les zadistes, occupants de la zone d’aménagement différée, créée en 1974, et devenue zone à défendre, sont un paramètre important de cette consultation locale, explique le maire.
« En cas d’abandon du projet d’aéroport, certains zadistes partiront, d’autres voudront rester. Il y en a qui n’embêtent personne, qui font des légumes bio, il faudra juste organiser tout à, que les agriculteurs historiques qui veulent récupérer leurs terres le fassent, et que ceux qui veulent exploiter les terrains, les achètent ou payent un fermage. »
Pour l’heure, le vote se déroule encore et les résultats ne seront connus, pour l’ensemble du département, qu’en fin de soirée, les bureaux de vote restant ouverts jusqu’à 20 heures à Nantes.
A Nantes, Jean-Marc Ayrault, et sa femme Brigitte, participent au référendum, dimanche 26 juin. | LOIC VENANCE / AFP
De la lassitude
A une trentaine de kilomètres de là, à Bouguenais - l’une des deux communes qui accueille le site de Nantes-Atlantique, l’actuel aéroport destiné à déménager - la participation a aussi été forte. À midi, elle était de 26 %, soit plus que les dernières élections régionales et départementales. Pour la maire de cette petite ville de 19 164 habitants, Michèle Gressus, « c’est la preuve d’une bonne mobilisation, même s’il y a de la lassitude ». De fait, le dossier est ancien, plus de cinquante ans de palabres, de mise en sommeil et de confrontations parfois dures dans le bocage nantais.
Hostile au projet de nouvel aéroport, la maire, 62 ans, à la tête d’une majorité municipale, PS, PCF et écologistes, a changé d’avis après être arrivée à la tête de la ville. « Il faut pouvoir développer les activités et je n’ai plus de terrain disponible, sauf dézoner des terres agricoles, explique Michèle Gressus. Si le transfert ne se fait pas, il n’y a pas de plan B. Le nouveau plan d’exposition au bruit va considérablement handicaper cette ville et la commune voisine de Saint-Aignan. »
Pour madame le maire, les problèmes avancés par les opposants au transfert, dont son ancienne maire, Françoise Verchère, n’en sont pas. Le franchissement de la Loire rendu compliqué par l’existence d’un seul pont souvent saturé ? La destruction de terres agricolse ? Face à ces arguments, Michèle Gressus préfère rappeler la saturation future de l’actuel aéroport, les emplois qu’entraînera le déménagement. Surtout, l’élue socialiste critique les non-choix du gouvernement. « Je ne comprends rien à cette façon de ne rien décider, jamais. On a annoncé trois fois le démarrage des travaux, ce dossier a été traité mollement, ça nous pourrit la vie », proteste-t-elle.
Un dossier traité « mollement »
Dans les rues de sa petite ville, ce dimanche, avant pour certains d’aller voter dans l’un des quinze bureaux, les habitants font leurs courses auprès des commerces qui entourent la place de l’église. Bruno Foucault et son épouse Régine, 51 et 55 ans, viennent d’aller voter. « Oui », car disent-ils d’une seule voix, « il y en a ras le bol des zadistes, de cette zone de non droit ». Même s’ils habitent loin de Notre-Dame-des-Landes, ce restaurateur et cette fonctionnaire estiment que les occupants doivent partir. Mais, quand on leur parle de la nécessité pour Nantes-Atlantique de déménager, des nuisances sonores actuelles, Bruno et Régine affirment que « l’aéroport ne gêne pas ».
Mathis, jeune apprenti à la Boucherie de fins gourmets, est lui résolument contre le nouvel aéroport. « On dit que le transfert va créer de l’emploi, c’est complètement faux », dit le jeune homme, avançant aussi ses convictions écologistes. Son collègue, Christophe, votera plutôt « oui », pour des raisons inverses, « pour l’emploi et le développement économique ».
Ici, comme dans les autres communes de Loire-Atlantique, les arguments s’échangent et se renvoient d’un camp à l’autre, sans que jamais une vérité semble émerger. Et beaucoup pensent que les choses sont jouées, consultation ou pas. « Je suis sceptique, j’ai du mal à croire que si la population vote non, le projet va s’arrêter », résume Catherine Lecouvey, à la tête de la Boulangerie Lesout, sur la place de l’Église. Sollicitée en ce dimanche matin par la clientèle habituelle d’un dimanche matin, Catherine ne sait pas ce qu’elle votera. « J’ai du mal à me décider, l’aéroport est juste à côté aujourd’hui et c’est bien pratique, et pourquoi aller en construire un nouveau si celui-ci reste ouvert ? » En fin de soirée, ce dimanche, on saura comment la population de Loire-Atlantique a répondu à la question.