Ahmed Zewail, en 2012. | KHALED DESOUKI / AFP

Mort le 2 août à l’âge de 70 ans, l’Egypto-Américain Ahmed Zewail n’était pas photographe, mais il a en quelque sorte inventé l’un des appareils photo les plus rapides du monde. Il avait plus précisément contribué à ouvrir un nouveau domaine scientifique, la femtochimie. Le radical de ce nom un peu barbare désigne la discipline dans laquelle il a été couronné du prix Nobel en 1999. Le préfixe qualifie, lui, l’extraordinaire rapidité de son instrument : un laser dit femtoseconde, aux impulsions lumineuses très courtes, quelques millionièmes de milliardièmes de seconde.

Grâce à elles, le chercheur a photographié des réactions chimiques comme jamais auparavant. Les flashes lumineux très brefs « figent » les molécules à divers moments de leur vie, à la manière d’un stroboscope. Il devient alors possible de voir quasiment en temps réel des liaisons entre atomes se faire et se défaire ou des nouvelles molécules intermédiaires apparaître ou disparaître. La technique aide ainsi à mieux comprendre les processus à l’œuvre dans des réactions en biologie ou chimie. Si ces premières expériences, dans les années 1980, ont porté sur des systèmes simples comme la dissociation de l’iodure de sodium, la technique s’est rapidement étendue à des réactions plus complexes. Les durées des flashes ont depuis également été réduites.

Premier Egyptien à recevoir un Nobel en science

Ahmed Zewail est né en 1946 dans le delta du Nil, à Damanhur en Egypte. Il effectue sa scolarité jusqu’à l’équivalent du master à Alexandrie avant de partir aux Etats-Unis pour sa thèse, soutenue à l’université de Pennsylvanie. C’est dans le prestigieux campus de Caltech en Californie, qu’il rejoint en 1976, qu’il va réaliser la percée couronnée par le prix Nobel en 1999, qui fait de lui le premier Egyptien et même le premier Arabe à recevoir une telle distinction en science. En 1982, il acquiert la nationalité américaine. Sa carrière sera saluée par de nombreuses autres récompenses comme le prix Wolf en 1993. Il sera aussi élu membre étranger associé à l’Académie des sciences en 2005.

En 2009, le président américain Barack Obama le nommera au sein du Conseil de la science et de la technologie de la présidence ainsi que représentant américain de la science pour le Moyen-Orient. En 2013, il sera appelé par Ban Ki-moon au conseil scientifique de l’ONU.

Après la chute d’Hosni Moubarak en février 2011 en Egypte, son nom circulera pour devenir membre d’une assemblée constituante en mars 2012, dont il sera finalement écarté. En 2014, le président Abdel Fattah Al-Sissi l’appellera au sein du premier conseil scientifique et technique de son pays et confirmera le chantier d’un projet lancé en 1999 d’un campus technologique, la Zewail City of Science and Technology, qui attend son inauguration officielle.