Comment la NSA a espionné un militant pro-démocratie pour le compte de la Nouvelle-Zélande
Comment la NSA a espionné un militant pro-démocratie pour le compte de la Nouvelle-Zélande
Pour la première fois, l’identité d’une cible de PRISM, le programme de surveillance américain dévoilé par Edward Snowden, a été rendue publique.
Le siège de la NSA. | Reuters
L’existence de Prism, le programme de surveillance de la NSA, a été révélée en 2013 par Edward Snowden. Mais jusqu’ici, aucune information n’avait filtré sur l’identité des personnes ciblées par ce programme. Lundi 15 août, le site spécialisé The Intercept et Television New Zealand ont révélé, pour la première fois, le nom d’un homme visé, pendant plusieurs mois, par l’espionnage de la National Security Agency (NSA) américaine, en se basant sur des documents dévoilés par Edward Snowden.
Il s’agit du Néo-Zélandais Tony Fullman, soupçonné un temps par les autorités de son pays de fomenter une révolution aux Fidji, dont il est originaire. Ces deux médias se basent sur plus de 190 pages de communications privées, interceptées par l’agence américaine entre mai et août 2012. Ce militant pro-démocratie, né aux Fidji avant de s’expatrier en Nouvelle-Zélande à 21 ans, où il a été naturalisé, s’opposait au régime militaire qui régnait sur son pays natal. Prenant part à des réunions de militants pro-démocratie, ami d’enfance d’un Fidjien soupçonné de comploter contre le pouvoir, il a attiré l’attention des services de renseignement néo-zélandais en 2012.
Ce qui se concrétise rapidement : la police perquisitionne sa résidence et celle de plusieurs proches, à la recherche d’armes et d’autres types de preuves. Des ordinateurs, des téléphones et des documents sont saisis et, parallèlement, Tony Fullman se voit privé de passeport. Une lettre signée du ministre de l’intérieur d’alors, Chris Tremain, précise que « la plupart des informations sont classifiées mais en résumé, j’ai de bonnes raisons de croire que (...) vous êtes impliqué dans la planification d’une action violente visant à forcer un changement de gouvernement dans un pays étranger ; et vous projetez de vous impliquer, ou de faciliter une action terroriste ».
Finalement lavé de tout soupçon
Stupéfait, Tony Fullman dément. Mais il ne sait pas que les actions de son pays à son encontre sont allées un cran plus loin : elles ont fait appel à la puissante NSA, pour obtenir certaines de ses communications privées. Selon The Intercept et Television New Zealand, la NSA aurait eu accès à ses conversations menées sur Gmail et Facebook et les auraient transmises aux services de renseignement néo-zélandais. En 2013, le Washington Post et le Guardian avaient assuré que plusieurs géants du Web, comme Google, Apple, Microsoft ou encore Facebook, avaient accepté de coopérer avec la NSA pour leur donner accès aux informations de leurs utilisateurs. Ce que ces entreprises ont toujours démenti.
Le contenu des conversations de Tony Fullman interceptées par la NSA est banal, et rien ne vient appuyer les soupçons des services de renseignement néo-zélandais. En avril 2013, il finit par recevoir un nouveau courrier du ministre de l’intérieur, qui lui apprend qu’il ne « représente plus d’inquiétude pour la sécurité nationale », et lui annonce qu’il peut à nouveau faire usage de son passeport.
Bien que les soupçons se soient révélés infondés, Tony Fullman continue, dit-il, à subir les conséquences de cette affaire : il doit systématiquement passer par des contrôles de sécurité plus poussés dans les aéroports, et affirme que les perquisitions de 2012 continuent à peser sur sa réputation, ce qui a compliqué sa recherche d’emploi.