Le sort de la « jungle » de Calais lié à l’ouverture du camp parisien
Le sort de la « jungle » de Calais lié à l’ouverture du camp parisien
Par Maryline Baumard
Dans la perspective du futur démantètement de la « jungle », l’Etat a besoin de 6 000 places d’hébergement en centres d’accueil et d’orientation. Et ce afin d’éviter que les migrants délogés ne s’installent dans des campements voisins.
Le camp de migrants de Calais, le 16 août 2016. | PHILIPPE HUGUEN / AFP
Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, a promis, vendredi 2 septembre, d’évacuer la « jungle » de Calais « avant la fin de l’année ». Lundi 5 septembre, son entourage évoquait l’idée d’une opération concomitante à l’ouverture du camp humanitaire parisien, fin septembre ou début octobre.
Sur la question des migrants, Paris et Calais sont en prise directe. Mener ces deux opérations de front éviterait un afflux massif de migrants calaisiens cherchant un hébergement à Paris. Cela limiterait aussi les départs vers la « jungle » de Calais des migrants que l’Etat ne souhaite pas héberger en province à l’issue des cinq jours passés dans le camp d’accueil parisien. Notamment ceux qui, d’après les règles européennes, devraient faire leur demande d’asile dans le premier pays d’Europe qu’ils ont foulé.
Mais, pour lancer le démantèlement de la « jungle », le ministre de l’intérieur a besoin de deux conditions. D’une part, il lui faut l’aval du Conseil d’Etat pour fermer les commerces informels de la zone nord du camp, puisque, le 12 août, le tribunal administratif de Lille ne lui a pas reconnu ce droit. D’autre part, il a besoin de plus de 6 000 places d’hébergement disponibles dans d’autres régions de France en centres d’accueil et d’orientation.
L’Etat souhaite en effet éviter que les migrants ne s’installent dans les campements voisins, comme cela s’était produit au lendemain du démantèlement de la zone sud en février dernier. Une partie des exilés délogés se sont entassés dans la zone nord et les autres ont rejoint les petits campements du littoral, de la Bretagne à Rotterdam.
Si M. Cazeneuve assure aujourd’hui avoir toujours voulu démanteler le plus grand campement de France, il avait d’abord été question, en mai, après le démantèlement de la moitié sud de la jungle, d’aménager la zone nord. Après que toutes les télévisions du monde eurent filmé la démolition des cabanes et la réinstallation de familles en zone nord, il n’était plus vraiment question, alors, de détruire le bidonville.
Blocage de l’autoroute
L’opposition de la maire de Calais à ces projets d’aménagement a sans doute pesé dans la décision récente du ministre. Aujourd’hui, la population du camp a atteint des records : 6 900 migrants selon l’Etat, 9 000 selon des associations, provoquant des appels multiples au démantèlement total de la part d’acteurs économiques et politiques locaux.
La journée de lundi 5 septembre, à Calais, a été marquée par des manifestations des acteurs économiques. Le blocage de l’autoroute aurait même été prolongé « [s’il n’y avait] pas eu confirmation du démantèlement rapide de la “jungle” », a déclaré David Sagnard, président départemental de la Fédération nationale des transporteurs routiers, à l’issue du mouvement. Les routiers éprouvent des difficultés croissantes à travailler, car les attaques des migrants sont de plus en plus violentes contre les camions.
Si une partie des migrants a renoncé à rejoindre l’Angleterre, les nouveaux venus tentent leur chance. D’autant que, malgré les démentis des autorités, et en dépit du renforcement de la présence policière, chaque nuit, un certain nombre d’entre eux parviennent à passer en Grande-Bretagne.