Le gouvernement est-il prêt à assumer la sélection à l’université ?
Le gouvernement est-il prêt à assumer la sélection à l’université ?
Par Camille Stromboni, Claire Ané
Le terme de « sélection » est désormais endossé par le secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur, Thierry Mandon.
Najat Vallaud-Belkacem et Thierry Mandon, le 16 septembre 2015. AFP PHOTO PATRICK KOVARIK | PATRICK KOVARIK / AFP
« Une sélection à l’entrée de certains masters me semble légitime », « pour moi, la sélection n’est pas un gros mot » : dans Le Monde et Le Parisien, mardi 20 septembre, le secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur, Thierry Mandon, s’est prononcé en faveur d’un processus que sa ministre de tutelle, Najat Vallaud-Belkacem, se gardait de nommer clairement.
« C’est un mot qui convient à la ministre, sinon je ne l’utiliserais pas », prend-il soin de préciser au Parisien. Mais invitée de la matinale d’i-Télé, la ministre de l’éducation nationale refuse de reprendre cette sélection à son compte : « Je veux croire que les propos [de Thierry Mandon] ont sans doute été tronqués, et qu’il aura l’occasion de les repréciser. »
Najat Vallaud-Belkacem: "Je veux croire que Thierry Mandon aura l'occasion de repréciser ses propos" - Le 20/09/2016 à 10h12
Durée : 11:13
Une heure plus tard, l’occasion d’une « reprécision » paraît toute trouvée : les deux membres du gouvernement tiennent une conférence de presse conjointe, à l’occasion de la rentrée universitaire. « Nous n’avons peur de rien. Nous avons cosigné un décret listant 1 300 masters 2 sélectifs, persévère Thierry Mandon. Mais nous n’utilisons pas de mots pour des provocations. »
La ministre campe également sur ses positions : « Il faut arrêter avec les vieilles lunes et les visions simplistes et réductrices. La question n’est pas celle de la sélection ou pas de la sélection. Nous sommes beaucoup plus ambitieux. » Et de rappeler que les négociations en cours avec les présidents d’universités et les syndicats étudiants visent à écrire une loi respectant deux principes : celui du « recrutement » à l’entrée du master 1 et celui du droit à la poursuite d’études pour les étudiants. D’un côté, les universités ont besoin de « s’organiser dans des masters où le nombre de places est limité », a répété Najat Vallaud-Belkacem. De l’autre, les étudiants qui souhaitent poursuivre après la licence doivent, s’ils n’ont pas été « recrutés » dans un master qu’ils demandaient en « premier vœu », avoir un autre choix.
Finalement, le différend avec M. Mandon n’apparaît que sémantique : la ministre de l’éducation nationale met derrière le terme « recrutement » les attributs habituels de la sélection que réclament les présidents d’universités.
L’aspect le plus délicat de la négociation, dont la ministre souhaite qu’elle débouche sur un texte de loi en octobre, sera finalement le contenu de ce « droit à la poursuite d’études », prôné par l’UNEF et que la ministre a repris à son compte. Le syndicat étudiant réclame, pour le concrétiser, qu’« au moins une proposition de master soit faite à chaque étudiant dans l’établissement où il a obtenu sa licence ». Une mesure que les présidents d’université jugent inapplicable, et sur laquelle ni M. Mandon ni Mme Vallaud-Belkacem n’ont pris position.