A Florange, Montebourg cajole sa gauche
A Florange, Montebourg cajole sa gauche
Par Cédric Pietralunga (Florange (Moselle) - envoyé spécial)
Le candidat tente de mobiliser l’électorat ouvrier en ciblant François Hollande, Alain Juppé et le Front national.
Arnaud Montebourg dejeune avec des salariés et des syndicalistes, à Yutz, près de Florange, le 13 octobre. | Nicolas LEBLANC / item pour "Le Monde"
A gauche, toute ! En « tournée industrielle » de trois jours en Lorraine, Arnaud Montebourg a profité de sa visite à Florange (Moselle), jeudi 13 octobre, près de quatre ans après la fermeture des hauts-fourneaux d’ArcelorMittal contre laquelle il s’était battu, en vain, pour donner une tonalité plus radicale à sa campagne. Avec un objectif : convaincre le « peuple de gauche » qu’il existe une « candidature alternative » à François Hollande… mais également à Alain Juppé.
Lors d’un déjeuner avec des délégués SUD de plusieurs entreprises locales, l’ancien ministre, aiguillonné toute la journée par sa compagne Aurélie Filippetti, députée de Moselle, a d’abord promis qu’il abrogerait la loi travail s’il était élu président de la République, alors qu’il réclamait jusqu’ici qu’elle soit seulement « renégociée ».
« On ne peut pas construire sur cette loi, a-t-il justifié entre deux bouchées de couscous. Même en supposant qu’il y ait des choses bonnes (…), je pense qu’on ne peut pas rebâtir la confiance sur la base d’un texte qui a autant détruit la croyance dans l’action publique », ajoutant que « le code du travail n’est pas responsable du chômage en France ».
« Moi, je suis fidèle au discours du Bourget »
Devant les représentants CGT, CFDT et SUD d’ArcelorMittal, rencontrés dans différents cafés de la cité ouvrière, M. Montebourg a également endossé le rôle de la victime, rappelant que la décision de laisser fermer les deux derniers hauts-fourneaux lorrains du groupe avait été prise par « deux personnes », François Hollande et Jean-Marc Ayrault, alors premier ministre.
« Je reviens ici le cœur serré », s’est ému l’ancien avocat, assurant que s’il était élu chef de l’Etat, il n’hésiterait pas à nationaliser l’ensemble des activités d’ArcelorMittal en France en cas de nouveau conflit. « Il est normal qu’un coup d’arrêt soit mis aux pratiques de la famille Mittal », a-t-il justifié face à un auditoire qui n’en demandait sans doute pas tant.
« Moi, je suis fidèle au discours du Bourget et aux ouvriers de Florange », a aussi lancé le candidat, dans un coup de pied de l’âne à François Hollande, dont la venue en Moselle est annoncée, lundi 17 octobre, sans être encore confirmée par l’Elysée. Les syndicats SUD et CGT ont déjà annoncé qu’ils manifesteraient à cette occasion, aidés d’une délégation de salariés de l’usine Alstom de Belfort.
Selon l’entourage de M. Montebourg, ce visible coup de barre à gauche s’explique par la nécessité de mobiliser l’électorat, alors que de plus en plus de sympathisants socialistes se disent tentés de voter à la primaire de la droite pour peser sur une élection qu’ils considèrent comme déjà perdue. « Mais voter Juppé, c’est avoir une loi El Khomri puissance dix [et] un programme d’austérité qui finirait de couler l’économie française », a insisté à plusieurs reprises l’ancien dirigeant d’Habitat.
« La chasse aux plus démunis »
Surtout, M. Montebourg s’inquiète de son déficit d’image parmi les électeurs socialistes : s’il fait jeu égal dans les sondages avec François Hollande au second tour de la primaire, le président de la République le bat dès le premier tour chez les seuls sympathisants PS. L’ancien ministre fait ses meilleurs scores parmi les électeurs hors parti. « Il ne faut pas se tromper d’élection, c’est une primaire de la gauche, il faut donc parler aux électeurs de gauche », reconnaît François Kalfon, le directeur de campagne de M. Montebourg.
Coïncidence ou pas, le candidat a profité de son passage à Hayange (Moselle) pour dénoncer « la chasse aux plus démunis » menée par la municipalité Front national (FN), qui a décidé de fermer le bâtiment de l’antenne locale du Secours populaire, accusée de tenir un discours promigrants. « Le FN a décidé de persécuter une association reconnue d’utilité publique et mène une action particulièrement inhumaine, s’est indigné M. Montebourg au milieu des bénévoles du Secours populaire, qui disent venir en aide à 760 personnes, dont 276 enfants, de la région. C’est inadmissible et nous ne laisserons pas faire. » Taper sur le FN, quoi de mieux pour mobiliser un électeur socialiste ?