Ygor Coelho, le 14 août à Rio. | MARCELO DEL POZO / REUTERS

Le schéma est souvent le même : c’est l’histoire d’un enfant des favelas qui sort de la misère en devenant footballeur professionnel. Mais cette fois-ci, le parcours sort un peu de l’ordinaire. Ygor Coelho, originaire de la favela de Chacrinha dans la zone ouest de Rio, n’a, lui, jamais manié le ballon mais est devenu cet été le premier badiste brésilien à participer aux Jeux olympiques. A domicile, à trente minutes à peine de son quartier, le jeune homme de 19 ans a offert un coup de projecteur sur un sport encore méconnu au Brésil, même s’il n’a pas franchi le premier tour. « Pendant les JO, je me suis senti comme un joueur de football. Tout le monde m’encourageait et voulait m’étreindre », se souvient-il.

Eliminé hier après un abandon au deuxième tour des qualifications des Internationaux de France de badminton, organisés au stade Pierre-de-Coubertin à Paris du 25 au 30 octobre, Ygor Coelho, numéro 58 mondial, peut être satisfait : il rivalisait avec le Malaisien Ginting, classé à la 40e place mondiale, jusqu’à ce qu’il souffre de crampes. L’essentiel est ailleurs pour le Carioca qui s’entraîne actuellement à l’Insep, invité pour un stage de trois mois par la Fédération française de badminton. « Les JO ont coûté beaucoup d’argent. Il n’y a du coup plus d’argent pour les sportifs de haut niveau. La France m’a donné cette opportunité et je voulais remercier le président ainsi que Peter Gade [directeur de la performance]. J’apprends beaucoup et je sens que je progresse. J’ai atteint par exemple un quart de finale à l’Open des Pays-Bas… », raconte Ygor Coelho, tout sourire.

Ygor Coelho, fou du volant
Durée : 02:35

Samba et badminton

Le Brésilien a débuté le badminton à l’âge de cinq ans. C’est son père qui est à l’origine de cette vocation. Initié par un professeur italien, puis formé par un Chinois et un Portugais, Sebastian Coelho a ouvert son école de badminton en 1998. Elle accueille 300 élèves. « Mon père m’a toujours poussé vers le badminton. Il ne savait même pas que ça existait avant qu’on lui en fasse la démonstration. Et son école est selon moi aujourd’hui le meilleur endroit au Brésil pour apprendre le badminton », confie Ygor. Plus que le désir de former des champions, l’école de Chacrinha met en avant un projet éducatif. « On utilise le badminton avec une ambition sociale. Les enfants viennent pour le sport mais on leur donne des cours de portugais, de mathématiques ou d’art. Il y a des professeurs. On ne fabrique pas que des champions en badminton », affirme-t-il.

Si l’ambition dépasse le simple cadre sportif, il n’empêche que la méthode utilisée par Sebastian Coelho est originale. La samba est utilisée dans le cadre de l’entraînement de ses jeunes sportifs. « Mon père a commencé à utiliser la samba, notamment pour sortir de la préparation physique classique, que personne n’appréciait vraiment. Le badminton est comme une danse, vous avez besoin d’être souple, d’avoir de bons appuis. A l’école, on pratique les deux », confie Ygor Coelho.

Le prochain objectif du jeune Brésilien passe par Lima, au Pérou, en 2019, lors des prochains Jeux panaméricains. Après avoir remporté la compétition dans la catégorie juniors, Ygor Coelho y visera son premier titre d’importance. L’année suivante, il espère disputer ses deuxièmes Jeux olympiques : « Je veux arriver encore mieux préparé à Tokyo. J’espère être dans le top 20 à ce moment-là. Et passer la phase de groupes. Pour ça, j’aimerais revenir en France pour m’entraîner dur… »