Secret-défense, la menace qui pèse sur Hollande
Secret-défense, la menace qui pèse sur Hollande
Par Jean-Baptiste Jacquin
La justice a été saisie par Eric Ciotti. Avant la fin du mandat, aucune enquête ne sera lancée.
François Hollande, à Paris, le 7 novembre. | CHRISTIAN HARTMANN / AFP
Le parquet de Paris a été saisi lundi 7 novembre par un courrier du député Les Républicains (LR) Eric Ciotti dans lequel il dénonce des faits « de nature à porter atteinte à la défense et à la sécurité nationale ». Le député des Alpes-Maritimes se réfère à un article publié dans Le Monde du 25 août, titré « Le jour où Obama a laissé tomber Hollande », relatant les heures pendant lesquelles la France s’apprêtait à frapper la Syrie fin août 2013. En illustration de l’article signé Gérard Davet et Fabrice Lhomme, dont les soixante entretiens avec le chef de l’Etat donneront lieu à la publication en octobre du livre « Un président ne devrait pas dire ça… », Le Monde a reproduit un document « confidentiel défense » présentant le déroulé théorique de l’intervention.
M. Ciotti dénonce la « divulgation volontaire de documents et d’informations classés confidentiel défense », par le président de la République ou son entourage. Un délit passible de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende. Il estime que la divulgation de ces informations par Le Monde constitue également une infraction.
Procédure de destitution
Compte tenu du statut pénal du chef de l’Etat, le procureur de la République ne peut donner suite à cette saisine tant que M. Hollande est en fonction, c’est-à-dire jusqu’en mai 2017, à moins qu’il soit réélu. Ensuite, il pourra « classer sans suite s’il estime que les faits ne sont pas constitutifs d’une infraction, ouvrir une enquête préliminaire, ou saisir directement la Cour de justice de la République (CJR) qui dispose de sa propre chambre de l’instruction », détaille Marie Dosé, avocate. Puisque les faits se sont déroulés dans le cadre des fonctions présidentielles de M. Hollande, cette CJR composée de quinze juges (douze parlementaires et trois juges du siège de la Cour de cassation dont son président) serait compétente, et non un tribunal ordinaire.
Cette même procédure a été utilisée dans le volet financier de l’affaire Karachi (soupçon de financement de la campagne d’Edouard Balladur en 1955) qui visait Nicolas Sarkozy. La plainte déposée alors qu’il était à l’Elysée n’a prospéré qu’à l’issue de son quinquennat.
Par ailleurs, Pierre Lellouche, député LR, a lancé lundi à l’Assemblée une proposition de résolution pour une procédure de destitution du président de la République. Selon l’article 68 de la Constitution, le Parlement réuni en Haute Cour peut destituer le chef de l’Etat « en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ». Cette initiative symbolique de M. Lellouche a peu de chance d’aboutir.