Malgré sa promesse, Donald Trump ne pourra pas enrayer le déclin du charbon aux Etats-Unis
Malgré sa promesse, Donald Trump ne pourra pas enrayer le déclin du charbon aux Etats-Unis
LE MONDE ECONOMIE
Le président élu veut relancer la production dans les mines de charbon et ainsi recréer des milliers d’emplois. Un discours démagogique qui se heurtera rapidement à la réalité.
Un mineur de charbon avant le début de son quart dans une mine de charbon près de Gilbert, en Virginie-Occidentale, le 22 mai 2014. | Robert Galbraith / Reuters
Voilà une promesse que Donald Trump, élu président des Etats-Unis le 8 novembre, ne pourra pas tenir : relancer la production de charbon pour recréer des milliers d’emplois dans le Wyoming, le Kentucky, la Virginie-Occidentale et revivifier des régions durement touchées par la désindustrialisation. 95 % de ce minerai est destinée aux centrales électriques et les grandes compagnies ont trouvé dans le gaz un combustible de substitution moins émetteur de gaz à effet de serre et surtout moins cher. La révolution des gaz de schiste outre-Atlantique a condamné à mort – et probablement sans appel – la bonne vieille houille.
Durant sa campagne, M. Trump a répété que le réchauffement climatique n’était qu’une invention des Chinois pour pénaliser la compétitivité de l’économie américaine et qu’il reviendrait sur les choix de son prédécesseur, Barack Obama, en matière d’énergie.
Durant son second mandat, celui-ci avait adopté un plan visant à réduire de 32 % d’ici à 2030 (par rapport à 2005) les émissions de gaz à effet de serre liées à la production d’électricité. La nomination à la tête de l’Agence fédérale de protection de l’environnement d’un climatosceptique pur et dur, Myron Ebell, a été vécue comme une provocation par les défenseurs de l’accord de Paris sur le climat.
Un tiers de charbon dans le « mix électrique »
Dans un discours sur l’énergie prononcé en mai dans le Dakota du Nord, l’un des quinze Etats charbonnniers américains, le candidat républicain dénonçait la « stupidité » de la réglementation, « qui oblige des centaines de centrales à charbon à fermer et qui bloque la construction de nouvelles ». Quelques mois plus tôt dans le Michigan, il claironnait :
« Nous allons remettre au travail nos mineurs de charbon et nos ouvriers sidérurgiques, c’est ce qu’ils veulent. »
Selon le ministère du travail, le nombre de mineurs est tombé de 85 000 début 2008 à 56 700 en mars 2016. La production de houille a baissé de 10 % en 2015 et devrait encore reculer de 16 % en 2016, selon le département de l’énergie.
Le discours du milliardaire de l’immobilier a trouvé un large écho. Et même si de nombreux éléments interviennent dans un vote, force est de constater qu’il est arrivé largement en tête dans quatre des cinq plus grands Etats producteurs de charbon, à l’exception de l’Illinois, acquis à Hillary Clinton. Il y a pourtant une bonne dose de démagogie dans ce discours « trumpien » au moment où l’Amérique réduit l’emprise de « king coal ».
La part du charbon dans son « mix électrique » est passé de 48 % en 2008 à 33 % en 2015, selon l’agence américaine d’information sur l’énergie, et cette tendance va se poursuivre. Non seulement parce que le prix du gaz va rester bas encore longtemps en raison de la surproduction des Etats-Unis, qui commencent à en exporter depuis les terminaux de gaz naturel liquéfié du Texas et de Louisiane. Mais aussi car de plus en plus d’investisseurs font pression sur les producteurs d’électricité pour qu’ils sortent du charbon et fournissent une électricité plus propre.
Des projets arrêtés dans de nombreux pays
M. Trump a dit vouloir « du charbon propre, beaucoup de charbon propre ». Une illusion : le coût des centrales disposant d’installations de capture-stockage du CO2 s’est révélé exorbitant après des premiers pilotes installés aux Etats-Unis (Mississippi…) ou en Europe.
Dans de nombreux pays occidentaux, le charbon est devenu l’ennemi énergétique numéro un, même s’il domine encore dans les grands pays émergents comme la Chine, l’Inde, l’Afrique du Sud ou l’Indonésie. Investir dans une centrale qui fonctionnera avec ce combustible pendant quarante ans sans visibilité sur le prix futur de la tonne de CO2 émise est devenu très risqué et dissuade les investisseurs.
D’ailleurs, de nombreuses compagnies dans le monde se débarrassent de leurs centrales au charbon. Engie a renoncé à des projets en Turquie et en Afrique du Sud (mais pas au Brésil ni en Mongolie), ainsi qu’à une centrale très contestée en Australie. EDF cherche à céder des actifs charbonniers en Pologne et aux Etats-Unis. L’italien Enel a une ambitieuse politique de sortie des énergies fossiles au profit des renouvelables.
Les allemands E.ON et RWE ont cantonné les actifs fossiles dans des structures ad hoc et cherchent surtout à valoriser les énergies renouvelables. Depuis le début de la décennie, les compagnies américaines comme Duke Energy ou American Electric Power ont fermé des dizaines de centrales au charbon.
Le charbon peut rester une énergie d’appoint. Il est plus facile à stocker que le gaz, bon marché et très abondant. Les États-Unis, qui disposent de 27 % des réserves mondiales (près de 300 ans de production au rythme actuel), restent le deuxième producteur derrière la Chine. Ils en sont les troisièmes consommateurs après la Chine et l’Inde.