Une amende de 440 000 dollars pour Mossack Fonseca
Une amende de 440 000 dollars pour Mossack Fonseca
Par Anne Michel
La firme d’avocat panaméenne au centre des Panama Papers est visée par une amende aux Iles vierges britanniques pour « violation des règles anti-blanchiment et financement du terrorisme ».
L’immeuble du cabinet Mossack Fonseca à Panama City. | CARLOS JASSO / REUTERS
Une amende de 440 000 dollars (411 492 euros) aux Iles vierges britanniques, pour Mossack Fonseca, le sulfureux cabinet d’avocats panaméen au centre du scandale des « Panama Papers », spécialisé dans l’immatriculation de sociétés écrans dans les paradis fiscaux des Caraïbes et au-delà, dans la zone Asie-Pacifique.
Sur son site Internet, la Financial Services Commission (FSC), l’autorité de régulation des services financiers de ce territoire d’Outre-mer du Royaume-Uni, annonce qu’elle a prononcé, le 11 novembre, « une sanction administrative record » envers l’antenne locale de Mossack Fonseca. Cette sanction vise des faits multiples de « violation des règles anti-blanchiment et financement du terrorisme » et « violation de la réglementation financière ».
Dirigeants corrompus
Les investigations des Panama Papers – cette enquête parue en avril, coordonnée par le consortium d’investigation américain indépendant (ICIJ), à laquelle Le Monde a contribué – avaient, de fait, montré que le cabinet panaméen avait créé 240 000 sociétés offshore, sans discernement, dont une partie pour des fraudeurs au fisc, des réseaux criminels (trafiquants de diamants, d’armes, d’art…) et des dirigeants corrompus. La moitié d’entre elles ont été domiciliées aux Iles vierges britanniques, situées à 2 000 km du Panama et deux heures de vol, véritable base arrière commerciale pour Mossack Fonseca et ses activités offshore…
Dans son communiqué, le régulateur financier des Iles vierges britanniques précise que huit infractions ont été recensées après dix mois d’enquête. Mossack Fonseca, relève l’autorité de contrôle, a manqué à ses obligations « d’établir un système de contrôle interne anti-blanchiment et financement d’activités terroristes adéquat », de « connaissance de ses clients » et des risques encourus, de « vérification de leur identité de ses clients et de surveillance de leurs transactions », de « conservation de ces données »… La firme panaméenne conserve toutefois sa licence.
La sanction décidée par les autorités des Iles vierges britannique n’est pas seulement symbolique. Elle témoigne d’un changement de discours et de comportement de ce paradis fiscal bien connu des Caraïbes vis-à-vis de l’argent sale. Visé pour sa part, en 2013, par les révélations de la première enquête sur l’évasion et la fraude fiscales coordonnée par l’ICIJ, « OffshoreLeaks », ce centre financier spécialisé dans l’accueil de sociétés écrans a choisi, sous la contrainte, de modifier ses pratiques et de renforcer ses lois anti-blanchiment… Un changement de cap opéré pour enrayer la fuite des investisseurs constatée après la publication d’« OffshoreLeaks ».
Tortola – du nom de la capitale des Iles vierges – a alors accepté de se ranger aux préconisations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en matière de transparence et de coopération fiscales, et d’appliquer les normes internationales. La seule option pour retrouver du crédit auprès de la communauté internationale… La politique de contrôle des risques de la Financial Services Commission a du même coup été renforcée.
Amende insuffisante pour Transparency International
« Cette sanction apporte la preuve de l’efficacité de notre autorité de régulation indépendante, de la fermeté avec laquelle elle punit les violations de ses règles et (…) de son
engagement résolu en faveur du renforcement de sa doctrine, afin de s’assurer que celle-ci soit ajustée à nos objectifs », a commenté le premier ministre du territoire, Orlando Smith. Il ajoute que les autorités des Iles vierges britanniques ont coopéré activement avec l’ensemble de leurs homologues étrangères ayant lancé leurs propres investigations.
Toutefois, pour l’ONG anti-corruption Transparency International, si l’amende infligée à Mossack Fonseca est « bienvenue », elle reste insuffisante : « c’est trop peu, trop tard », estime son directeur au Royaume-Uni, Robert Barrington, dans un communiqué daté du 15 novembre, comparé à « l’ampleur des révélations des Panama Papers et aux dommages causés par le secret bancaire offshore ».
Avant cette sanction record, le régulateur financier des Iles vierges britanniques avait infligé une première pénalité de 31 500 dollars (29 460 euros) à Mossack Fonseca, pour des défaillances de contrôle.