On a testé… « Watch Dogs 2 », le jeu qui vous met dans la peau d’Anonymous
On a testé… « Watch Dogs 2 », le jeu qui vous met dans la peau d’Anonymous
Par Damien Leloup
Pour son deuxième épisode, le jeu en monde ouvert d’Ubisoft propose toujours d’incarner un hackeur surdoué, cette fois au cœur de la Silicon Valley.
« – Et maintenant ?
– C’est toi qui vois mec, t’es libre de faire tout ce qui t’intéresse. »
En deux phrases, ce dialogue à l’issue d’une mission réussie résume tout ce que propose Watch Dogs 2, sorti mardi 15 novembre sur PS4, Xbox One et PC : la liberté. Vous y incarnez Marcus, un hackeur de génie, capable de pirater à peu près tous les objets connectés de la terre : feux de signalisation, téléphones, caméras de vidéosurveillance… Plongé dans une reconstitution de San Francisco et de ses environs, Silicon Valley comprise, Marcus fait partie de DedSec, un groupe de hackeurs très largement inspiré d’Anonymous. Ce groupe vise à faire tomber Blume, la gigantesque multinationale qui gère le CTOS, un logiciel qui contrôle à peu près tous les éléments de la ville… et collecte des quantités astronomiques de données personnelles sur ses habitants.
Watch_Dogs 2 – Trailer de lancement
Durée : 02:26
Ça, c’est pour le décor. Manette en main, on retrouve très vite la plupart des éléments qui ont fait le succès de GTA et de ses successeurs spirituels : on choisit les missions que l’on veut accomplir, on peut voler tous les véhicules de la ville, et on peut foncer dans le tas arme au poing ou bien s’infiltrer de la manière la plus discrète possible. L’approche discrète est souvent la plus efficace, notamment parce que Marcus bénéficie de tout un tas de gadgets, dont des drones, qui permettent de pénétrer dans un bâtiment et de pirater des données à distance, ou encore de contrôler caméras, véhicules ou panneaux électriques pour piéger les ennemis et contourner des obstacles.
Bref, ça ressemble à du GTA avec une couche high-tech, ça se joue comme du GTA avec une couche high-tech, et c’est plutôt réussi. Transformée en bac à sable 2.0, la baie de San Francisco offre un gigantesque terrain de jeu bien vivant, plus animé que le Chicago de Watch Dogs premier du nom. On se perd volontiers dans les quêtes secondaires, bourrées de clins d’œil à l’actualité – les opérations d’Anonymous contre la scientologie, les vols de données personnelles… Et si les missions d’infiltration se ressemblent, chacune offre un puzzle différent, avec plusieurs approches possibles en fonction des goûts personnels et des compétences que l’on aura choisi de développer.
Pour les amateurs de course-poursuites, les ruelles vallonées de San Francisco offrent un terrain de jeu stimulant. | Ubisoft
Incohérences
Mais pour réussir à concilier la liberté d’action presque totale du jeu et son scénario, qui convoque les pires spectres de la surveillance de masse, Watch Dogs 2 est contraint de faire le grand écart. Comment expliquer que dans ce San Francisco surveillé de toute part, il soit possible de voler littéralement n’importe quel véhicule sans se faire repérer ? Qu’il soit parfois ridiculement aisé de semer des policiers dont l’intelligence artificielle souffre assez largement ? Que Blume, avec toutes les données à sa disposition, se fasse en permanence pirater par DedSec ?
Les professionnels appellent cela la dissonance ludonarrative, c’est-à-dire l’incompatibilité entre ce que le jeu raconte et ce que le jeu propose de faire. Au bout de quelques heures, Watch Dogs 2 révèle toute l’ampleur des incohérences qu’il impose au joueur : dans une œuvre qui dénonce les risques de la surveillance de masse, les caméras de vidéosurveillance sont ses meilleurs alliés. Elles ne repèrent jamais Marcus, mais ce dernier peut s’en servir à loisir pour surveiller ses ennemis, activer des objets à distance ou créer des pièges. Quant à l’instrument qui permet de mesurer les progrès de la révolution en cours contre Blume, c’est tout simplement le nombre de « followers » – des fans qui installent l’application de DedSec et acceptent que leur machine soit utilisée pour participer à des piratages. On a connu plus révolutionnaire.
Non, vos amis de DedSec n’ont pas peur de flirter avec la caricature. | Ubisoft
Le jeu est régulièrement ambigu dans les différents messages qu’il essaye de faire passer, comme lorsqu’une mission propose de pirater la webcam de la jeune cousine d’un membre de DedSec pour lui « donner une leçon ». Guerres des gangs, basses vengeances personnelles, lutte contre les sectes et les multinationales, un peu à la manière d’Anonymous, le Marcus de Watch Dogs 2 est de tous les combats – sans qu’on sache jamais très bien si c’est « pour de vrai » ou « juste pour le lulz ». Et même s’il existe presque toujours une option non violente pour terminer une mission, Marcus laissera vraisemblablement dans son sillage beaucoup de corps criblés de balles. Un peu cher payé pour pouvoir publier une nouvelle vidéo sur les réseaux sociaux qui rapportera quelques milliers de « followers » supplémentaires.
A ces paradoxes insolubles s’ajoutent quelques problèmes d’écriture dans les dialogues – qui décrivent par exemple l’application de DedSec comme un logiciel « propriétaire et open source », ce qui est impossible – et des personnages secondaires plus caricaturaux les uns que les autres. Mais c’est aussi, finalement, l’un des bons points de Watch Dogs 2 : contrairement à son prédécesseur, qui se prenait trop au sérieux, cette suite manie beaucoup mieux l’autodérision et le second degré. A commencer par son personnage principal, nettement plus charismatique que le vendeur taciturne qu’il remplace.
L’avis de Pixels
On a aimé :
- La reconstitution de San Francisco, plus animée et plus vivante que le Chicago du premier opus
- Un personnage principal sympathique et amusant, des missions variées
- Les drones, amusants à piloter et customisables
On a moins aimé :
- Beaucoup d’incohérences
- Des fusillades très classiques et pas spécialement exaltantes
C’est plutôt pour vous si :
- Vous aimez les GTA-like
- Sur Twitter, votre avatar est le masque de Guy Fawkes (mais c’est ironique)
- Vous adoreriez porter un sweat à capuche pour taper du code
C’est moins pour vous si :
- Vous avec un diplôme d’ingénieur en informatique et vous hurlez dès qu’une scène de piratage irréaliste passe dans un film
- Ces finasseries de piratage vous gonflent, vous préférez foncer dans le tas avec un fusil d’assaut
- Vous êtes M. Robot
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