Un food truck anti-langue de bois
Un food truck anti-langue de bois
Par Joël Morio
Elizabeth Tchoungui et Philippe Besson font sortir les politiques de leur cadre habituel pour parler de la diversité.
« Menu Président », sur Numéro 23, a notamment reçu Jean-François Copé. | Numero 23
Mardi 22 novembre, François Fillon reconnaissait dans les colonnes du Parisien que son passage dans l’émission de Karine Le Marchand « Une ambition intime », sur M6, l’avait aidé dans sa campagne de la primaire. « Si l’on en juge par le nombre de réactions, c’était énorme, expliquait-il. Les téléspectateurs ont en tout cas découvert que j’avais d’autres passions dans la vie que la politique. »
Objet de nombreuses critiques (l’une étant de faire le jeu des communicants et d’être totalement complaisant), ce programme de divertissement qui invite les politiques à dévoiler leur intimité a cependant rencontré son public : 3,1 millions de téléspectateurs le 23 octobre et 2,7 millions le 6 novembre.
« Une ambition intime » n’est pas la seule émission à proposer une approche différente du modèle classique. Depuis le 8 octobre, dans « Menu Président », sur Numéro 23, Philippe Besson et Elizabeth Tchoungui reçoivent eux aussi des hommes et des femmes politiques, prétendant ou non à la magistrature suprême. Et ce, non pas dans un canapé cosy, mais devant un food truck où les invités sont interrogés debout, au début et à la fin. Un moment où, loin des configurations habituelles des plateaux de télévision, ils font des déclarations inattendues. « Lorsque Henri Guaino déclare qu’il n’est pas féministe, il crée la surprise. Il n’aurait sans doute jamais lâché une chose pareille ailleurs », juge Elizabeth Tchoungui.
Convier un homme politique dans un décor qui sort de l’ordinaire permet-il de le faire sortir de la langue de bois ? « Le food truck est à la fois moderne et mobile, capable de nous transporter au cœur du bruit de la ville », raconte Philippe Besson. Le camion s’est déjà installé dans l’écoquartier des bords de Seine à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), sur la place du Colonel-Fabien et à la porte de Versailles à Paris.
Chaque fois, les invités sont conviés à table. Ce jour-là, dans les entrepôts de la douane en plein 10e arrondissement, avec Benoît Hamon et Philippe Poutou, le chef Ghislain de Fontclare a préparé quelques desserts bretons au premier – Benoît Hamon étant né à Saint-Renan (Finistère) et ayant vécu ses premières années à Brest. Un gadget ? Pas pour Elizabeth Tchoungui, en tout cas, qui juge « les goûts culinaires révélateurs de la personnalité des gens ».
« Au cœur du bruit de la ville »
Pas question néanmoins de mettre « Menu président » sur le même plan qu’« Une ambition intime », « une émission de divertissement qui n’a rien à voir avec ce que nous faisons et qui rend les politiques sympathiques, ce qui n’est pas non plus notre propos », tranche Elizabeth Tchoungui.
Programmé le samedi à 13 heures sur Numéro 23, ce rendez-vous politique new-look a pour ambition de traiter de la diversité. « On aborde des sujets qui sont plutôt absents du débat, comme l’égalité femme-homme, le handicap, l’homophobie… », note la présentatrice.
Si les interviews – souvent détendues – que mènent Philippe Besson et Elizabeth Tchoungui sortent des sentiers battus, il n’en demeure pas moins que l’écrivain et ex-animateur de « Paris Dernière » se laisse parfois aller à quelques longues interventions, ou à interrompre brutalement la parole de ses invités. « J’assume une part de subjectivité et de malice, reconnaît-il. Mais une rigueur journalistique était aussi nécessaire à cette émission. D’où notre duo avec Elisabeth Tchoungui. »
Cette dernière, qui ne se considère pas comme une journaliste politique, revendique quant à elle sa spontanéité sur ces sujets qui lui tiennent à cœur. Avant les fêtes de fin d’année, « Menu président » recevra Philippe Poutou, Jack Lang et Nicolas Dupont-Aignan.