A Saint-Didier-au-Mont-d’Or (Rhône), dans la banlieue cossue de Lyon, le vote Juppé ne semble pas majoritaire. | Romain Etienne/ITEM pour Le Monde

De Marseille à Paris en passant par Lyon, Pontivy, Angoulême et Bagneux, les envoyés spéciaux du Monde racontent le second tour de la primaire de la droite. Dans les bureaux de vote, l’enthousiasme semble moindre qu’au premier tour, et beaucoup d’électeurs rencontrés veulent « transformer l’essai » en faveur de François Fillon.

A Pontivy : pour qui voteront les nouveaux votants ?

A Pontivy (Morbihan), une question domine dans le bureau de vote installé dans le palais des congrès, où la participation pourrait dépasser celle de la semaine dernière : à qui profiteront les voix de ces nouveaux votants ?

C’est petit, Pontivy : 15 000 habitants dont « on connaît à peu près la sensibilité politique », confie André Tanguy, l’un des assesseurs du début d’après-midi. Selon lui, les nouveaux votants sont « essentiellement des gars de chez nous », politiquement s’entend. Pas des électeurs de gauche donc, mais des sympathisants de droite qui auraient retrouvé le chemin des urnes. Dans cette commune où François Fillon a obtenu 50,69 % des voix au premier tour, lui s’attend à un « rééquilibrage » en faveur d’Alain Juppé, même s’il voit toujours ce dernier battu.

Marseille, dans les quartiers chics : « C’est un plaisir de dégager Hollande et les bobos »

Dans cette ville où l’immense majorité des grands élus ont soutenu Nicolas Sarkozy, avant de se ranger cette semaine derrière François Fillon, l’élimination de l’ancien président de la République n’a pas provoqué de démobilisation.

Les votants sont même venus plus tôt que la semaine dernière. « Je pensais qu’en arrivant à l’ouverture des bureaux, j’attendrais moins », souffle, à l’école Mermoz (8e arr.), Isabelle, pimpante quadragénaire qui a quand même dû patienter une heure quarante-cinq. Malgré l’attente, l’exaspération reste feutrée : « C’est un plaisir de voter pour dégager Hollande et tous les bobos germanopratins », vitupère en sortant enfin du bureau un des rares trentenaires croisés là.

A Angoulême : « Juppé, je ne peux pas ! »

Dominique Damperat, responsable administrative dans une entreprise de cartons, vient de glisser un bulletin Fillon dans l’un des bureaux de vote d’Angoulême. « Fillon est plus dans le mouv’, plus réformateur. Juppé, quand je l’ai entendu le critiquer sur sa réduction des fonctionnaires, je me suis dit “je ne peux pas !” », explique cette femme de 62 ans.

Pascal Garcia, 37 ans, qui travaille dans une banque, a fait le même choix, après avoir choisi le maire de Bordeaux au premier tour : « Il faut lancer une dynamique Fillon en vue de la présidentielle. »

A Boulogne-Billancourt, « Alain Juppé est bien, mais… »

Dans cette commune des Hauts-de-Seine où la mobilisation a été l’une des plus fortes de France au premier tour, François Fillon avait atteint 59 % dans certains bureaux de vote. Aujourd’hui encore, il ne faut pas chercher bien loin pour trouver des fillonistes. La « sérénité » du candidat Fillon, c’est ça qui a convaincu Marc, père de famille de 36 ans qui travaille dans le conseil financier, venu, comme tous les dimanches, faire ses courses au marché Escudier.

« Le monde politique et social est aujourd’hui incertain, instable. François Fillon est tout l’inverse […] Et puis il parle aux trentenaires actifs, comme moi, qui veulent un monde qui change. »

Il avoue avoir voté pour son candidat dès le premier tour et ne pas avoir été surpris du score de son champion. « Alain Juppé n’est pas mauvais, mais il est un peu trop âgé, je n’arrive pas à me projeter avec lui. »

A Saint-Didier-au-Mont-d’Or, balais de grosses voitures

A Saint-Didier-au-Mont-d’Or (Rhône), dans la banlieue cossue de Lyon, les cloches sonnent à la volée, quelques enfants vendent le calendrier des scouts d’Europe à la sortie du bureau de vote. Sur le parking, le ballet des grosses voitures est continu. A l’intérieur, on croise des électeurs de François Fillon comme d’Alain Juppé.

Mais la tendance en faveur du maire de Bordeaux n’est pas majoritaire. Pour Antoine Streichenberger, « François Fillon est plus à même de réinculquer nos valeurs de Français, de valoriser la culture française ».

A Paris, ce n’est plus l’affluence du premier tour

En début d’après-midi, il y a en moyenne 40 % de votant en moins dans deux bureaux du 7e arrondissement, dans la circonscription de François Fillon. Est-ce lié à l’absence d’enjeu du scrutin ?

« Entre Alain Juppé et Francois Fillon, c’est blanc bonnet et bonnet blanc », reconnaît une retraitée, qui s’est spécialement déplacée pour aller voter après avoir lu les deux programmes et qui a mis un bulletin Juppé dans l’urne, car « c’est le moins pire ». Dans ce quartier, le vote « anti-Sarko » semble avoir été prépondérant la semaine dernière.

A Tourcoing : « On est déçus que Sarkozy ait été éliminé »

A Tourcoing, où un tiers des électeurs ont choisi François Fillon alors que leur maire, Gérald Darmanin, était le directeur de campagne de Nicolas Sarkozy, les partisans de l’ancien président ont décidé de suivre les consignes de vote. « On est déçus que Sarkozy ait été éliminé », explique Michel Lazare, 69 ans, retraité du textile.

Avec son épouse, il est allé au meeting de François Fillon. Il espère que le Sarthois va tenir ses promesses, « surtout pour nos enfants ».

A Morteau, « transformer l’essai » ou « l’amplifier »

En cette terre catholique du Doubs, dont les fermes dissimulaient les prêtres réfractaires pendant la Révolution française, au point qu’on la surnomme parfois « la petite Vendée », M. Fillon est arrivé confortablement en tête au premier tour, avec 59 % des voix.

Au long des files d’attente qui se sont constituées dès l’entrée du bâtiment, place de la Halle, la plupart sont venus « transformer l’essai » ou « l’amplifier ». Ici, on est souvent de droite et on le revendique.