Les étudiants enfants d’immigrés sont « plus pessimistes » sur leur avenir
Les étudiants enfants d’immigrés sont « plus pessimistes » sur leur avenir
Par Adrien de Tricornot
Une vaste étude menée par l’Observatoire de la vie étudiante montre néanmoins que la plupart pensent avoir une vie meilleure que leurs parents, souvent de condition modeste.
Lors de la « Welcome Week » de l’Université Pierre-et-Marie-Curie, à Paris, en septembre 2012. | Camille Stromboni
Les étudiants dont les parents sont issus de l’immigration sont « plus pessimistes » que les autres « quant à leur chance d’insertion professionnelle en France après leurs études », et « les moins nombreux à envisager une poursuite d’études au-delà du bac +5 » : tel est le constat dressé par l’Observatoire de la vie étudiante (OVE), qui publie, jeudi 8 décembre, les premiers résultats de son « enquête nationale conditions de vie des étudiants 2016 », une vaste étude réalisée tous les trois ans.
Malgré ce pessimisme, les étudiants descendants de deux parents immigrés sont les plus nombreux « à considérer que leur avenir sera meilleur que celui de leurs parents, dont les positions sociales sont en moyenne plus modestes que celles des étudiants sans ascendance migratoire », explique l’OVE. L’étude montre en effet que 41 % d’entre-eux sont d’origine ouvrière, ce qui n’est le cas que de 16 % des étudiants sans ascendance parentale migratoire.
« Les enfants d’immigrés pensent à juste titre avoir un avenir meilleur par rapport à leur univers de référence. Mais c’est aussi le cas, en général, des enfants d’ouvriers », explique Feres Belghith, directeur des études de l’OVE.
Pour les enfants de cadres, c’est l’inverse : « Il existe une peur du déclassement qui les amène à être plus réservés sur leur avenir. Or cette peur n’est pas confirmée par les données : les enfants de cadres sont surreprésentés partout dans l’enseignement supérieur, et plus l’on évolue dans les études et dans les filières prestigieuses et plus la surreprésentation des enfants de cadres est forte », ajoute Feres Belghith.
L’enquête menée par l’Observatoire de la vie étudiante repose sur les réponses à un questionnaire couvrant tous les domaines de la vie (logement, santé, budget, rapport aux études, relations familiales....), auquel 46 340 étudiants en cours d’études ont intégralement répondu. De nouvelles questions ont aussi été posées dans cette édition, notamment sur les parcours des enfants issus de l’immigration mais aussi l’usage du numérique, la situation de handicap, celle de parent-étudiant ou les relations affectives. | OVE
L’origine migratoire, et sociale, des parents détermine aussi les choix d’études. Les enfants dont les parents sont issus de l’immigration sont notamment moins présents que les autres en classes préparatoires aux grandes écoles ou dans les écoles d’ingénieurs. Leur poursuite d’études post-bac s’effectue par les sections de technicien supérieur (STS), où étudient 12 % des enfants issus de deux parents immigrés, contre 8 % des enfants dont aucun ou un seul parent est immigré.
Mais les filières universitaires du droit et de l’économie sont celles qui font le plus recette : 26 % des étudiants dont les deux parents sont immigrés les choisissent, quand c’est le cas de 17 % des étudiants sans ascendance migratoire parentale.
« L’effet de l’origine sociale est nettement moins marqué sur d’autres données » de la vie étudiante, note cependant Feres Belghith. Par exemple sur la santé, où l’origine sociale des étudiants joue mais où l’âge a un effet plus marqué : « Les jeunes, proches de leur famille, ou les jeunes salariés, sont en meilleure santé. Il existe une période charnière, entre 23 et 25 ans, où les jeunes prennent leur indépendance par rapport à leur famille et ne sont pas encore protégés par le salariat. De même, l’effet de l’origine sociale sur la situation financière est moins marqué que ce que l’on pourrait penser, ce qui montre l’efficacité du système de bourses », conclut Feres Belghith.