Si vous n’avez rien suivi à la crise politique en Corée du Sud
Si vous n’avez rien suivi à la crise politique en Corée du Sud
Le Monde.fr avec AFP
Le Parlement sud-coréen a voté, vendredi 9 décembre, la destitution de la présidente, conséquence d’un gigantesque scandale de corruption.
Le portrait défiguré de Park Geun-hye, le 9 décembre, à Séoul, avant le vote du Parlement. | Ahn Young-joon / AP
Les députés sud-coréens ont voté, vendredi 9 décembre, la destitution de la présidente sud-coréenne, Park Geun-hye, la privant de ses pouvoirs exécutifs, notamment celui de chef des armées. « Je suis tellement désolée pour tous les Sud-Coréens d’avoir créé ce chaos national par ma négligence », a-t-elle regretté à la télévision.
Mme Park, dont le mandat devait s’achever théoriquement dans un an, conserve toutefois son titre, le temps que la Cour constitutionnelle entérine ou non la destitution. Ce processus pourrait prendre jusqu’à six mois.
Si la Cour suit le vote des parlementaires, la dirigeante sera définitivement déchue de son poste et un scrutin présidentiel sera organisé dans les soixante jours. En attendant, le pays reste englué dans une crise politique majeure.
Que lui est-il reproché ?
La motion de destitution adoptée par l’Assemblée nationale accuse Mme Park de violations de la Constitution et de délits pénaux, corruption et abus de pouvoir. Mais la véritable femme au cœur du scandale est Choi Soo-sil, une amie proche de la présidente. Cette dernière est accusée d’avoir conseillé Mme Park sur la conduite des affaires de l’Etat, dont d’importantes nominations, et d’avoir eu accès à des documents confidentiels alors qu’elle n’occupe aucune position officielle.
Mais, surtout, cette conseillère de l’ombre est accusée d’avoir utilisé ses relations d’amitié avec la présidente pour forcer les conglomérats locaux – les chaebols – à verser de l’argent à des fondations douteuses, argent qu’elle aurait détourné à des fins personnelles.
De quoi faire d’elle une « Raspoutine » aux yeux de la presse locale, qui la compare à l’imposteur russe qui influença la cour impériale de son pays au début XXe siècle. Selon les médias sud-coréens, Choi Soon-sil allait jusqu’à corriger les discours présidentiels. Arrêtée début novembre, elle attend son procès pour extorsion et abus de pouvoir. L’audience préliminaire est prévue le 19 décembre.
Qui est Choi Soon-sil ?
Choi Soon-sil est la fille d’une figure religieuse autoproclamée, Choi-Tae-min, chef d’un culte aux allures sectaires, l’Eglise de la vie éternelle. Il était devenu le mentor de Park Geun-hye après l’assassinat de sa mère, en 1974, affirmant avoir vu cette dernière en rêve lui demandant d’aider sa fille.
Selon les médias sud-coréens, Choi Soon-sil aurait hérité à la mort de son père, en 1994, de l’influence qu’il possédait sur Mme Park. L’ex-époux de Choi Soon-sil a été un des principaux adjoints de Mme Park jusqu’à son élection en 2012.
Comment réagissent les Coréens ?
Depuis la mi-octobre, la révélation de ce scandale a poussé des centaines de milliers de manifestants chaque samedi dans les rues de la capitale, Séoul, demandant la démission de la présidente. Ces manifestations monstres, les plus importantes en Corée du Sud depuis les années 1980, ont rassemblé jusqu’à un million de personnes dans l’ensemble du pays, selon les organisateurs, la police parlant de chiffres dix fois moindres.
Dans une tentative d’apaiser la colère populaire, la présidente a présenté plusieurs fois des excuses, limogé de hauts responsables et a même accepté de renoncer à certaines de ses prérogatives, mais en vain.
A qui est transféré le pouvoir ?
Dans l’attente de la décision de la Cour constitutionnelle, les pouvoirs exécutifs de la présidente sont confiés dès lors au premier ministre, Hwang Kyo-ahn, un ancien procureur qui n’a jamais été élu.