Au mois de mars, Zein Al Rifai ainsi que deux autres journalistes syriens, Louai Abo Aljoud et Reem Fadel, avaient participé à un chat avec les lecteurs du Monde.fr, à Paris. Alépin d’origine, il réside désormais à Gaziantep, en Turquie, et explique assister « impuissant » à la destruction de sa ville.

La dernière fois que l’on s’est vu, vous étiez en convalescence après avoir été blessé aux jambes par un tir d’obus de mortier à Alep. Comment allez-vous aujourd’hui ?

Je vais mieux, merci. J’habite à Gaziantep, en Turquie, avec ma famille. Après ma venue en France je n’ai pas tenté de retourner à Alep : ma ville est assiégée par le régime d’Assad, son allié russe et les milices chiites.

Comment vivez-vous à distance ce qui se passe en ce moment à Alep ?

Je suis maintenant spectateur, comme tout le monde, totalement impuissant alors qu’une partie de l’humanité agonise en ce moment à Alep. L’un de mes amis qui est là-bas me dit que la situation est identique au jour du Jugement dernier.

Depuis le premier jour, nous sommes habitués au silence de la communauté internationale envers la révolution syrienne

Vivez-vous la chute de la ville, qui n’est plus qu’une question d’heures, comme une fatalité étant donné l’échec systématique des négociations internationales ?

Militairement, la chute de la ville n’est plus qu’une question d’heures, effectivement. Mais, pour mes amis qui habitent encore à Alep, la volonté de la vie est la plus forte. En Syrie, depuis le premier jour, nous sommes habitués au silence de la communauté internationale envers la révolution syrienne.

Comment parvenez-vous à vous informer sur la situation sur place ?

Grâce à mes amis. Lorsqu’ils parviennent à se connecter à Internet, ils nous décrivent la terrible situation sur place.

En mars, vous nous disiez que la voix de la population syrienne était totalement absente des médias qui étaient trop focalisés sur le groupe Etat islamique. Le pensez-vous toujours aujourd’hui ?

Oui. Le moindre crime commis par l’organisation Etat Islamique trouve un important écho dans la presse internationale alors que les crimes du régime ou les centaines de milliers de personnes qui fuient les barils d’explosifs jetés du ciel et les civils assiégés n’intéressent pas beaucoup les médias occidentaux. Malgré la difficulté de pénétrer dans les zones contrôlées par le régime, il y a des crimes qui sont connus de tous, mais ceux-là n’intéressent pas les grands médias occidentaux.

Voir l’interview de Zein Al Rifai en mars 2016 :

Trois questions à Zein Al-Rifai
Durée : 02:38