Retour à la case départ. Le 8 décembre, le Conseil constitutionnel a censuré une mesure de la loi Sapin 2 permettant de résilier chaque année l’assurance de son prêt immobilier. S’ils n’ont pas contesté le fond, les « sages » ont jugé que cette nouveauté, introduite par les députés avec un amendement, n’avait pas de lien direct avec le texte.

« C’est une mauvaise nouvelle pour les emprunteurs car cela aurait permis d’ouvrir plus largement la concurrence sur le marché de l’assurance de prêt », estime Sandrine Allonier, directrice des relations banques chez Vousfinancer.com.

L’assurance emprunteur n’est en théorie pas obligatoire, mais dans la pratique les prêteurs l’exigent généralement pour accorder un crédit immobilier. Elle permet de couvrir les remboursements du prêt en cas de décès, d’invalidité ou encore d’incapacité temporaire de travail. Contrairement à une assurance auto ou une multirisque habitation, ce contrat ne peut pas, pour l’heure, être résilié à son échéance annuelle.

Le problème est que les contrats « maison » proposés par les banques au moment de souscrire un crédit immobilier assurent tous les clients de la même façon et quasiment au même tarif. Ce sont des « contrats groupe », qui mutualisent les risques de décès de tous leurs emprunteurs quel que soit leur âge. Conséquence : les trentenaires payent souvent plus cher que ce qu’ils devraient.

« Jusqu’à 40 % du coût du crédit »

Pour alléger la facture, ces derniers ont toutefois le droit de souscrire leur contrat auprès d’un autre établissement que celui qui leur a accordé le prêt : c’est la « délégation d’assurance » (loi Lagarde de 2010). Cela leur permet d’obtenir une couverture individuelle sur mesure fixée en fonction de leur âge et de leur état de santé. Une option à envisager car cette assurance coûte cher. « Elle peut représenter jusqu’à 40 % du coût total du crédit », précise Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux.com.

Et les emprunteurs plus âgés peuvent aussi y trouver leur intérêt. « Passé 65 ans, beaucoup de contrats groupe n’assurent plus pour l’invalidité mais seulement le décès. Des contrats en délégation permettent aujourd’hui d’être couvert pour ce risque, qui plus est à des tarifs avantageux », explique Maël Bernier.

Malgré ses atouts, la délégation d’assurance ne rencontre pas un succès fou auprès des emprunteurs - elle représentait en 2015 seulement 18 % du marché, et on s’attend à une baisse à environ 16 % pour 2016. « Chez Cafpi, c’était 50 % des contrats avant 2014, pour tomber aujourd’hui à 36 % », indique Philippe Taboret, directeur général adjoint de ce courtier en prêt immobilier et président de l’Association professionnelle des intermédiaires en crédits.

Notez que le principe de non-résiliation subit tout de même une exception. Depuis la loi Hamon, adoptée en 2014, le souscripteur peut changer d’assureur dans les douze mois qui suivent la signature de son contrat. A condition que l’assurance offre les mêmes garanties. Mais pour l’heure, peu d’assurés y ont recours. Chez Meilleurtaux.com, seuls 11 % des dossiers d’assurance emprunteur résultent de cette possibilité. « Après un long parcours pour acheter et financer leur bien, les souscripteurs ont du mal à se remettre dans la paperasse pour trouver une assurance moins chère », note Maël Bernier.

D’autant que changer d’assureur peut rapidement devenir un chemin de croix. Certaines banques ne jouent pas le jeu en continuant à imposer leurs contrats groupe. « Les lois Lagarde et Hamon avaient pour objectif de délier l’emprunt et l’assurance afin de laisser le choix aux souscripteurs, rappelle Philippe Taboret. Mais dans les faits, ces derniers n’ont pas toujours cette liberté. » Il a donc fort à parier qu’un nouvel amendement sur la résiliation annuelle soit déposé dans le cadre d’un futur projet de loi.